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Révolutions homériques

Révolutions homériques

Publié le par Sophie Rabau

Le 18 Mars 2006, Larry Norman (Université de Chicago) et Sophie Rabaud (Groupe Fabula à l'ENS/Université de Paris 3) proposent une journée d'étude intitulée « Révolutions homériques » dont on trouvera l'argument ci-dessous.

 

Des interventions de Michel Briand, Marie Blaise, Daniel Ferrer, Glenn Most, Larry Norman, Sophie Rabaud sont d'ores et déjà programmées, mais nous serions heureux d'entendre d'autres intervenants intéressés par la problématique proposée.

 

Merci, le cas échéant, de faire parvenir une proposition d'intervention sous la forme d'un résumé à Sophie Rabau (srabau@free.fr) avant le 15 Janvier 2006

 

Révolutions homériques 

 

Journée d'étude du 18 Mars 2006 organisée par Larry Norman et Sophie Rabau (Groupe Fabula. Ecole normale supérieure)

 

 

Au royaume des lettres, détrôner Homère n'est pas chose aisée, même pour le plus révolutionnaire des poètes. Au cours de l'histoire littéraire, le poète aveugle ne fut pas seulement adoré par les partisans de la tradition littéraire, les nostalgiques d'une origine parfaite et indépassable qu'on devait se contenter d'imiter à défaut de la surpasser. Curieusement, Homère a aussi été des ruptures les plus radicales et des nouveaux élans littéraires : il fut convoqué et imité, sollicité, voire revendiqué par différents écrivains ou mouvements qui mettaient en avant leur modernité et leur radicale nouveauté. De Lucien, qui au deuxième siècle de notre ère, fait d'Homère son allié au moment où il invente avec l'histoire véritable ce qui pourrait bien être le premier récit métafictif européen jusqu'à Joyce, Borges et John Barth modernes et post-modernes s'il en fut jamais, en passant par d'autres modernes – Houdar de la Motte et Marivaux, et par les romantiques, la rupture et l'expérimentation littéraires s'accompagnent avec une régularité que l'on aimerait interroger d'une référence au prince des poètes, soit qu'on revendique ouvertement l'imitation de son oeuvre, soit qu'on le représente sous les traits et avec les idées d'un moderne. Homère en somme est révolutionnaire au double sens où il revient régulièrement à chaque nouveau cycle et où il est aussi une figure, voire un garant du changement et de l'avant-garde. Ce sont ces successives révolutions homériques dont nous aimerions préciser les contours et interroger le sens. On voudrait d'abord, en réunissant des spécialistes des différentes avant-gardes qui convoquèrent Homère esquisser une histoire et une rhétorique de ces révolutions, les comparer et en confronter les stratégies : pourquoi et comment utilise-t-on le texte ou la figure du passé quand on veut rompre avec le passé ; toutes les avant-gardes ont-elles été homérisantes ; certaines ont-elles fait, et pourquoi, l'économie de la référence à Homère ? On voudrait surtout commencer d'explorer l'évident paradoxe de toute révolution homérique : toute modernité littéraire aurait-elle besoin, au moment même où elle prétend inaugurer une ère nouvelle, d'une figure d'autorité qui garantit sa continuité avec le passé et l'origine ? Plus radicalement, parce que toute revendication de la modernité est expérience de la rupture et de la caducité des choses littéraires, n'est-ce pas une nostalgie de l'éternité et de la permanence qu'exprime l'appel à l'auteur de l'Iliade et de l'Odyssée : au moment où l'on marque l'histoire en y instillant une rupture, où l'on s'installe résolument dans le temps ne chercherait-on pas à se réfugier dans l'ombre d'Homère pour y échapper au temps, pour marquer sa révolution du sceau de l'immortalité et d'une glorieuse survie ?

C'est pour examiner ces questions et en inventer quelques autres, que nous aimerions réunir des spécialistes de différentes avant-gardes littéraires, pour penser la modernité mais du point de vue de l'antique, pour réfléchir à la révolution mais au nom d'Homère.