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Rétif de La Bretonne et la violence

Rétif de La Bretonne et la violence

Publié le par Marc Escola (Source : Françoise Le Borgne)

Rétif de La Bretonne et la violence

Dans les premières pages de Monsieur Nicolas, Rétif insiste sur la violence de ses passions : « j’ai été emporté, brutal, furieux, d’un caractère impatient au joug, dur, impérieux, sacrifiant tout au penchant frénétique pour les femmes, me livrant, pour le satisfaire, à des excès punissables ; ne respectant ni la pudeur, ni la décence ; m’exposant moi-même, exposant des âmes encore pures aux suites affreuses du libertinage, achevant de précipiter, dans ce gouffre immonde, des jeunes filles qui ne s’en étaient encore qu’approchées. »  

Cette complaisance dans l’excès, voire l’abjection, s’inscrit dans un dispositif complexe qui fait de la chute la condition de la rédemption et vise au sublime par la démesure et le contraste des vices et des vertus. Cette veine irrigue tout un pan de l’œuvre rétivienne : du Paysan et de La Paysanne pervertie aux Nuits de Paris, en passant par Ingénue Saxancour ou La Femme séparée et L’Anti-Justine – où Rétif a néanmoins soin de se distinguer explicitement de « l’infâme M. de Sade ».

Dans le cadre du numéro 48 des Études rétiviennes, nous nous proposons d’analyser les modalités et les enjeux de l’exploitation de la violence dans l’œuvre de Rétif de La Bretonne. On pourra se demander pourquoi la violence, infligée (lors du viol de Colette Parangon, par exemple), subie (de la part du gendre honni, dont les accusations d’inceste envahissent le paratexte du Thesmographe) ou représentée, est à ce point constitutive de l’identité littéraire de Rétif. On pourra également s’interroger sur le rapport à la violence sexuelle, intergénérationnelle, sociale et/ou révolutionnaire que mettent en scène Les Nuits de Paris mais aussi Le Paysan et La Paysanne pervertis, dont les célèbres illustrations exacerbent le trouble pouvoir de fascination. Quels sont les présupposés anthropologiques, philosophiques, religieux et esthétiques de cette violence ? En quoi celle-ci relève-t-elle de la mode « sombre » ou « noire » qui s’impose en France à partir de la fin de l’Ancien Régime ? Quelle idéologie sociale et politique véhiculent des topiques narratives renvoyant inlassablement à ce que le Dictionnaire de l’Académie définit en 1762 comme « la force dont on use contre le droit commun, contre les lois, contre la liberté » ? Telles sont quelques-unes des pistes qui pourront être explorées par les contributeurs dans le prolongement des recherches récentes consacrées à cette thématique (notamment Representing violence in France (1760-1820) sous la direction de Thomas Wynn, SVEC, 2013) et des derniers colloques consacrés à Rétif (« Le Drame conjugal » en 2012 et « Rétif et le modèle biblique » en 2014).

Les propositions d’articles sont à envoyer avant le 10 mai 2016 à Françoise Le Borgne (Francoise.Le_BORGNE@univ-bpclermont.fr) et les articles seront à remettre pour le 20 août 2016.