Questions de société

"Refonder les Refondateurs", SLR - 14/10/10

Publié le par Bérenger Boulay

Sur le site de SLR:

Refonder les Refondateurs

Par Emmanuel Saint-James, le 14 octobre 2010

Sort en librairie en ce mois d'Octobre 2010 un livre intitulé Refonderl'université, Pourquoi l'enseignement supérieur reste à reconstruire,signé par quatre professeurs d'université et un directeur de l'EHESS. Ce livre poursuit une réflexion entamée vers la fin du grand mouvement de contestation des décrets d'application de la loi LRU. Il comporte 3 parties de 2 ou 3 chapitres, ainsi qu'une annexe constituée de deux articles rédigés à l'époque. Le découpage adopté est visiblement le produit d'un travail rédactionnel pas toujours concerté, aussi la critique ci-dessous procédera-t-elle d'abord à une analyse chapitre par chapitre, avant de livrer une réflexion globale sur des conclusions qui parfois rejoignent celles de Sauvons La Recherche, et parfois s'y opposent radicalement.

Le chapitre Le « feu sous la cendre » ou l'exaspération croissante d'une corporation excédée, mais excessivement passive explique le mouvement de 2009 par l'exaspération face à une classe politiqueempilant des réformes dans l'ignorance de la réalité du terrain, l'avant-dernière en date, qui a réorganisé le cursus en Licence-Master-Doctorat (LMD), bénéficiant d'un examen approfondi sur le plan juridique. Cette dimension inédite vaut la peine d'être lue, mais cette analyse reste très partielle, les auteurs s'étonnant d'ailleurs que le LMD n'ait pas rencontré dans notre pays l'opposition qu'il a rencontré ailleurs. Pour notre part, dès Juin 2007 (voir Autonomie des universités : la démission des audacieux) nous avions expliqué pourquoi la réforme bâclée du LMD était la raison profonde du mouvement strictement estudiantin contre le CPE, dont l'ampleur avait paru disproportionnée. Si les auteurs dénoncent à raison dans le processus de Bologne une marchandisation du savoir, ils ne discutent aucunement les aspects économiques que les gouvernements successifs invoquent pour se justifier, à tort selon nous (voir l'article précité et également L'étrange réforme Hommage à Marc Bloch). Il est même franchement consternant que la seule analyse économique de ce livre se réduise à deux graphiques montrant une baisse de 20% en 20 ans du pouvoir d'achat des enseignants-chercheurs : celle des autres personnels statutaires, des collègues précaires et des étudiants, il n'en sera nulle part question. Pour un collectif qui prétend s'attaquer au problème dans son ensemble, voilà qui ne laisse pas d'interroger.

Le chapitre Retour sur le mouvement : entre analyse des impasses de la contestation et signification profonde du conflit retient deux acteurs dans le mouvement : la Coordination Nationale Universitaire, et le Collectif pour la Défense de l'Université. Ce dernier est loué pour son unité et son expertise des textes ministériels successifs, ce qui aurait permis au Syndicat Autonome d'arracher quelques concessions au ministère. Quant à la CNU, elle est présentée comme un groupement informe se radicalisant jusqu'à l'impasse politique.

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