Essai
Nouvelle parution
Réédition Hugo/Ubersfeld : Le Roi et le Bouffon

Réédition Hugo/Ubersfeld : Le Roi et le Bouffon

Publié le par Thomas Parisot (Source : Dramatica)

Nous signalons la réédition du classique d'Anne Ubersfeld sur le théâtre de Victor Hugo, dans une version entièrement revue par l'auteure :


Anne Ubersfeld, Le Roi et le bouffon, essai sur le théâtre de Victor Hugo, Paris, Éditions José Corti, novembre 2001, 712 p., ISBN : 2-7143-0761-2, 195 F.
 
Édité pour la première fois en 1974, cet essai sur le théâtre de Victor Hugo fit date. Plus de 25 années après, et avant le bicentenaire de l'une nos gloires nationales, Anne Ubersfeld nous en propose une version revue.
Même si, intellectuellement, Victor Hugo remporta la bataille d'Hernani, son théâtre fut un échec renouvelé - ce qu'étudie la première partie consacrée à la genèse des drames et à leur accueil par la critique et le public. Hugo, tout arriviste qu'il soit, refuse de flatter, tour à tour l'élite et le grand public. Il s'efforcera de créer un nouveau public qui serait un et populaire, en donnant la même année une pièce à la Porte Saint-Martin et l'autre à la Comédie Française, déjà subventionnée.
Les drames de Hugo ont été approuvés ou condamnés (surtout condamnés) en fonction d'une idéologie qui n'était pas la sienne ou, plus exactement, pas la leur. Ce que ses ennemis ne peuvent pas lui pardonner et ce que ses amis ne peuvent pas comprendre, c'est une subversion de plus en plus affirmée de l'écriture dramatique, c'est l'invention d'un code qui n'est ni celui de la tragédie, ni celui du drame bourgeois, ni celui du mélodrame : l'utilisation simultanée du sublime et du grotesque. Si le théâtre de Hugo ne fut pas de son temps, c'est pour quatre raisons essentielles :
- Le poète se détache du je lyrique ;
- Il fait parler le je grotesque ;
- Ce je étant théoriquement inapte à la parole, la parole du grotesque-peuple finit par n'être plus parole de personne ;
- Cette mise en question du sujet entraîne la destruction simultanée du je et de l'autre. Si notre temps l'accepte, c'est par l'inacceptable cruauté de Hugo, proclamant la légitimité de la revendication du monstre et l'anéantissement mutuel du bourreau et de la victime. [info. éditeur]
 
CE VOLUME CONTIENT :
 

PREMIÈRE PARTIE
 

Introduction
I. - 1830
A) Retour au théâtre
Le moi fracturé. - La faille de l'histoire. - La blessure du moi et le drame personnel. - Fatalité individuelle, fatalité historique. - Une pause : roman ou drame ? - Notre-Dame de Paris.
B) La courtisane et le roi décapité : projets
La Mariposa, personnage. - Sabina Muchental. - Gennaro. La Mariposa (Histoire de Don Pantaleon Sá). - L'enfance de Pierre le Cruel. - Philippe II. - La mort du roi : Louis XI. - Charles Ier. - Justification de Bonaparte (la mort du duc d'Enghien). - Le masque de fer. - Néron, tragédie romaine. - Projets abandonnés.
 

II. - HUGO ET LE THÉÂTRE : 1830-1831
A) Hugo et les théâtres dans l'été 1830
Les théâtres et leur public : Théâtre Français, Odéon, Porte Saint-Martin. - L'irritante question de la subvention. - Décadence des subventionnés. - La censure.
B) Marion de Lorme et le choix d'une scène
Adieux à la Comédie. - Avoir un théâtre : reprendre les Français ? - Le projet de Dumas et de Hugo, son échec. - La Porte Saint-Martin, tractations et traité : Hugo se lie à ce théâtre.
C) Une épreuve : Marion de Lorme à la scène
Marion jouée : mise en scène et distribution. - Didier pardonne : Hugo écrit un nouveau dénouement. - La représentation : public, interprétation, recettes. - La presse - les critiques se réservent : incertitudes, partage non politique de l'opinion. - Passions et passion. - Marion et l'histoire : hésitation de la presse. - Le rire et la mort : le grotesque. - On oppose à Hugo le grand siècle. - Hugo n'est pas fait pour le théâtre ; - l'article de Nodier. - On voit naître les grandes accusations encore peu assurées d'elles-mêmes.
  

III. - L'ANNÉE 1832
A) Le double projet de 1832.
La Préface de Marion. - Guizot et l'Éloge de Shakespeare : une poétique paternaliste : le théâtre et le peuple ; - civiliser le peuple ; - peuple et nation : une confusion générale. - « Le peuple que le théâtre civilise » : la thèse de Hugo, ses rapports avec celle de Guizot ; changement de lieu du peuple ; - contre un théâtre politique ; - défense et illustration d'une idéologie ; - celle de Guizot ? quelque différences à la base. - « Le peuple où tout va », le peuple destinataire ; qu'est-ce que le peuple pour Hugo ? Comment faire exister le peuple ? Les solutions ; - le double projet : investir le théâtre par le moyen des deux grandes scènes et par une sorte de travail croisé.
B) Juana ou le repaire de la Guérilla
Un drame moderne. - La Tor Quemada. - Adieux à Napoléon : l'histoire irréconciliable ; - pas de drame un.
C) Le roi s'amuse
Genèse : richesse des renseignements génétiques. - Le Jocrisse et Corcova. - Encore la Mariposa II. - Le drame paternel : Lessing, Emilia Galotti. - Premiers fragments : Corcova (printemps 1830). - Notre-Dame de Paris et Quasimodo. - Rabelais et Triboulet : le Tiers Livre. - Scarron. - Les Deux Fous de P. Lacroix ; Le Roi et le Fou ; - un seul bouffon - concentration et aspect passionnel ; - transformation de la structure en miroir. - Lectures de Hugo. - L'avant-texte. - La révélation. - Maguelonne. - La décapitation : brouillon de la tirade de Saint-Vallier. - Hugo écrit le Roi s'amuse. - Le Roi s'amuse au Théâtre Français. - Le contrat. - Ligier pleure, Bocage s'en va : distribution, décors, costumes. Le grand Coësre et le bey de Titeri. La représentation. Le manuscrit de théâtre : l'auto-censure de Hugo après la première. - Caliban : Le Roi s'amuse et la presse. - La critique dans la réprobation ; - les bienséances. - Le grotesque : le bouffon ; Rolle dans le National analyse le r
ôle du laid : Caliban ; la double nature ; le grotesque populaire : la trivialité ; Hugo et la matière toute pure - que Hugo renonce au théâtre ! - Une provocation : acharnement général ; le drame de Hugo est tenu pour provocateur.
D) Une bataille perdue : le procès du roi s'amuse
La pièce interdite : suspension, interdiction ; Hugo intente un procès à la Comédie, pour lutter indirectement contre la censure ; la presse libérale obligée de le soutenir. - La pudeur des gendarmes : la Préface du Roi s'amuse. - Le procès : un avocat libéral. - La thèse de Hugo ; il veut Odilon Barrot pour avocat. - L'audience : plaidoirie d'Odilon Barrot. - La plaidoirie de Hugo : la liberté accuse. - La réponse de Chaix d'Est-Ange, avocat du ministère, présentant la défense de la censure préventive et soutenant la légalité de l'interdiction. - Le jugement : le tribunal se déclare incompétent. - Fortune du Roi s'amuse : cinquante ans après.
E) Lucrèce Borgia
Genèse : Ma vie est en deux parts : Avant-texte et brouillons. - La peste Borgia : Sources historiques : Comines ; - Brantôme ; - Sismondi ; - Guichardin ; - Alexandre Gordon (la Vie du Pape Alexandre VI). - La Tour de Nesle : Lucrèce Borgia, réécriture. - La Gaule poétique de Marchangy, fausse source ? - Portrait d'un monstre : la Vie de César Borgia, de Tomasi. - Le duo d'amour et son effacement : l'écriture de Lucrèce ; rapidité relative : les tranches quotidiennes du 8 au 20 juillet. - Ajouts et modifications : le problème capital du dénouement et les additions ultérieures.
Un triomphe
Lucrèce aux Boulevards : tractations avec la Porte Saint-Martin. - Le traité. - Monstres sacrés : Georges et Frédérick. - Mise en scène : distribution, décors, Hugo metteur en scène. - Une revanche : triomphe de Lucrèce.
Accueil nuancé
Succès : la presse le constate ; Hugo a) est devenu classique ; b) a écrit un mélo. - Critiques modérées : Hugo s'est assoupli (mais ce n'est pas encore suffisant). - L'action dramatique : en général éloges. - Le monstre : réticences devant le monstre Lucrèce ; violence et immoralité. - Mélodrame : Lucrèce est un mélo pour la Porte Saint-Martin. - Gustave Planche et l'idéologie libérale : la poétique de Hugo est une poétique matérielle ; elle occupe la vue, non l'âme.
 

IV. - Un point d'aboutissement : Marie Tudor
Genèse : Un conflit. - Un texte de commande ; - la querelle avec Harel : un duel manqué ; - Hugo promet une pièce. - Origine de Marie Tudor : une documentation déjà ancienne que Hugo rafraîchit. - La reine et le favori : documentation historique : une longue liste empruntée au catalogue de la Bibliothèque Royale ; - l'ouvrage de base : Griffet, Nouveaux éclaircissements sur l'histoire de Marie ; - Le Livre, d'Antonio Perez, met l'accent sur la chute du favori. - Date de ces lectures : vers 1829 (la Mariposa II ?) ; liens avec le projet Philippe II. - Amy Robsart ; - Christine. - Hugo récrit Hugo : Marie Tudor, réécriture de textes antérieurs ; politisation par rapport aux drames antérieurs. - Comédiens : Marie Tudor est-elle écrite pour Juliette ?
Hugo écrit marie tudor
Les deux versions du 1er acte : entrée en scène de l'histoire. - Décapitation du double : les deux dénouements. - Madame Pochet et les corps sans tête : quelques aménagements pour la scène.
Une bataille interne
Le nerf de la guerre : le traité et ses modifications. Hugo veut des reprises de ses pièces, il veut aussi des décors somptueux ; marchandages ; un nouveau contrat. - Bocage contre Hugo : - Distribution : le cas Chilly ; les intrigues Bocage-Harel-Dumas ; attaques contre Juliette ; le drame Bocage. - Le pavé de l'ours : l'article de Granier de Cassagnac et les attaques contre Dumas ; - la défense de Hugo ; - brouille. - Le bourreau : dernières hésitations. - Hugo metteur en scène : la distribution définitive ; les notes de répétition. - En un combat douteux : la représentation ; pas de liste d'invités ; - la jeunesse romantique ; une bataille à l'issue incertaine ; - l'interprétation : à part Mlle Georges, tout le monde assez faible, Juliette désastreuse.
Drame bourgeois contre marie tudor
L'accueil : Hugo organise la contre-offensive à l'aide de la petite presse littéraire : Europe Littéraire et Vert-Vert. - Violence des réactions : Hugo intéresse, mais il n'est pas un homme de théâtre. Viol du public. - Plagiat. - Mélodrame. - La trivialité. - Hugo révolutionnaire ? Oui pour l'Écho de la Jeune France, non pour la Tribune. - Hugo et l'art matérialiste. - Hugo et le drame bourgeois.
 

V. - VERS UN COMPROMIS
A) Le roi et le bouffon : De madame louis xiv à maglia
1) 1834 - L'assaut de la critique. - Hugo décadent. - La campagne de l'Écho de la Jeune France : Hugo et sa « mission de désorganisation ». - Le National. - Les campagnes simultanées de la Revue des Deux Mondes et de la Revue de Paris ; - Planche et Nisard ; - l'intervention de Jules Janin. - G. Planche et la beauté classique. - Lettre à M. Victor Hugo. - D'un poète nommé Lucain. - Nisard et les Poètes latins de la Décadence : classicisme et décadence ; Racine et Hugo. - L'ami fidéle : Sainte-Beuve et la rupture avec Hugo ; - l'Europe Littéraire. - D'un poète nommé Saint-Amant : la réponse de Gautier dans la France Littéraire.
2) Madame Louis XIV. - La perruque de Louis XIV : une réponse à la glorification de l'âge classique ; le grotesque du XVIIe siècle ; l'ancien régime oppressif. - Scarron et sa veuve : brindilles et fragments. - Madame Louis XIV : le projet et son échec.
3) Maglia. - De Tafalta et quelques autres. - Maglia et son nom. - La paraphrase de Maglia. - Une crise.
B) Angelo, tyran de padoue
Genèse : Sabina Muchental ou l'homme entre deux femmes. - Juliette écrit. - Shakespeare et Musset : modèles littéraires : Voltaire (Zaïre) ; - Shakespeare (Roméo et Juliette, Othello, Mesure pour Mesure) ; - Musset (André del Sarto) ; - Dumas (Teresa, La Vénitienne). - L'Italie et la documentation historique : Amelot et Daru. - Mars et Dorval : retour à la Comédie. - La présence de Dorval.
Le drame dénaturé
Le travail régulier de l'écriture ; - un drame resserré et classique ; - le travail aux répétitions ; - la suppression du bouge d'Homodei : un compromis.
La pièce jouée
Un bon contrat. - Répétitions : conflit avec Mlle Mars. - Comment on fait un succès : la représentation, applaudissements, réussite financière. - Le compromis : le texte et ses concessions ; provocations réduites.
Angelo et la presse
La critique se répète : attaques du Courrier des Théâtres. - Les reproches habituels, cette fois plus modérés : monotonie et manque d'originalité, amour du décor, trivialité du langage ; - les défenseurs de Hugo : Granier dans la Revue de Paris, Gautier dans le Monde dramatique : le fantastique. - Pourquoi Janin n'a pas fait d'article favorable.
C) Le conflit avec la comédie française
Premiers démêlés
Angelo et Don Juan d'Autriche. - Jouslin arrête les représentations d'Angelo ; - Hugo réclame les reprises d'Hernani et de Marion. - La gestion de Védel. - Censure littéraire. - Quel théâtre peut accueillir Hugo ?
La crise
Situation de la Comédie ; - l'incident Volnys ; - automne 1837: un échange de lettres entre Hugo et Védel ; - la rupture.
Le procès
Premières passes d'armes : les arguments de la Comédie l'improvisation du poète. - Une éclatante victoire : le jugement donne raison au poète sur tous les points. Le problème des recettes : Hugo a fait faire des bénéfices à la Comédie ; - Hugo démasque la censure littéraire ». - Le jugement en appel confirme toutes les thèses de Hugo. - Les lendemains : fureur d'une partie de la presse ; le Moniteur des Théâtres souligne le conflit du poète avec le public. - Védel à Canossa.
 
VI. - LE THÉÂTRE DE LA RENAISSANCE
A) Le théâtre de la renaissance
Réconciliation avec Dumas. - Un second théâtre français ? Les promesses du duc d'Orléans ; tractations : Hugo et Guizot, difficultés. - Vers le premier privilège : drame romantique ou drame bourgeois ? - Anténor Joly, futur directeur, fait jouer l'opinion. - Lettre au ministre de Hugo, Delavigne et Dumas réclamant l'ouverture d'un second théâtre français, avec subvention. - Appétits et concurrence. - La Comédie Française se défend. - Le droit à la musique ? L'Opéra-Comique le conteste. - 4 novembre 1836 : signature du privilège. Réaction de la presse. - Le second privilège : la réouverture de l'Odéon remet en cause le premier privilège. Pétition des auteurs et compositeurs, le 22 juillet 1837. - Joly obtient le droit à la musique. - Le second privilège, septembre 1837 ; restrictions. - Une naissance difficile : le problème du local ; - conflit avec l'Opéra-Comique ; - Joly n'obtient ni le titre de Théâtre Royal, ni la subvention. - Manouvres d'arrière-garde. - Le Théâtre de la Renais
sance : la salle ; la troupe.
B) « Ruy blas », drame de la synthèse
Hugo en 1838. - Le silence du poète : difficultés publiques, difficultés privées ; - la vie personnelle, les amis. - La mort d'Eugène.
Genèse : Le Jocrisse : maître et valet ; - le canevas 632 ; - le valet déguisé. - L'homme découronné : le texte du Victor Hugo Raconté ; le Journal d'Adéle. - Fusion décalée de deux schémas. - La double mort de César de Bazan : Don César ; - le mort-vivant et la double mort ; figure fraternelle ; - le schéma complexe. - Ruy Blas, un rébus biographique. - Drame total et tragédie grotesque : le déchaînement de l'intertextualité ; - reprise des textes antérieurs. - Une tragédie de l'histoire : une documentation énorme, ancienne, en couches successives ; - la documentation de base ; d'Aulnoy, Vayrac, Louville. - De l'usage des documents : l'amalgame ; - ne pas particulariser l'histoire.
Une écriture facile
Un faux départ ; - une rédaction aisée ; les brouillons du IVe acte.
« Ruy blas » joué
Distribution : Frédérick et Juliette, le rôle de la Reine ; difficultés pour Don César de Bazan. - Hugo metteur en scène : les stalles ; - la rampe ; un vrai travail de mise en scène. - La représentation.
Un jugement sans appel
Les doctes ne veulent pas voir. - Contradictions. - Les ultras ne sont pas contents. - La reine et le laquais : accusations politiques : offense à la majesté royale ; les libéraux dénoncent les sympathies démocratiques de Hugo. - Le grotesque : trivialité et mise en question de la personne ; - le vulgaire et le laid ; - Hugo poète de la matière. - Solitude et folie.
  

VII. - LES JUMEAUX
Genèse :
Le mythe du Masque de fer : un prisonnier inconnu ;
- Voltaire et la légende ; les Mémoires de Richelieu. - L'exploitation littéraire ; - la Prison de Vigny et ses rapports avec le texte de Hugo. - La constellation de 1830 : le fatal, l'individu et l'histoire ; la Révolution ; - Caïn. - Le « creux dépressif», de 1830 ; - reprise de la même constellation en 1839: les poèmes du printemps 1839. - Détails historiques : Laporte, Mme de Motteville ; les Mémoires de la marquise de Créquy ; - le nom de Ponthieu ; Mme de Sévigné et les noms des frondeurs. - Les lieux et leurs problèmes, contradictions chronologiques. - La Mazarinade de Scarron. - Relais des Jumeaux : Madame Louis XIV et le dix-septième siècle ; Britannicus : Hugo veut-il écrire une anti-tragédie ? - Calderón, la Vie est un Songe, modèle probable des Jumeaux.
Un relais : « Ruy blas »
Les habits d'un autre. - L'avant-texte : entre Ruy Blas et les Jumeaux. - Dernières brindilles.
Le drame interrompu
Un délai. - Hésitations dans l'écriture. - L'inachèvement du IIIe acte : témoignages contradictoires ; la leçon du manuscrit. - La fin des Jumeaux : une reconstitution possible à l'aide des canevas subsistants. - L'interruption : maladie ; les théâtres ; la censure ; incertitudes : la question de l'Académie. - Où se dissout le drame : panique des personnages devant l'histoire, éclatement et réduction des éléments du drame ; l'identité perdue. Seule l'analyse de l'écriture peut nous apporter des éléments plus concluants.
L'ouverture des jumeaux
La transparence autobiographique. - Le grotesque et la pulvérisation du théâtre. - L'ouverture sur les Burgraves.
Écriture et pratique du théâtre
1) Le projet hugolien d'investissement de la scène ;
2) Hugo ne s'insère pas dans la pratique dramaturgique de ses contemporains il refuse la tragédie, le mélodrame, le drame bourgeois et contemporain ;
3) Un mode particulier de rédaction (du schéma à l'écriture) ;
4) Le drame modifié par la pratique de la scène ;
5) La réception : les critiques opposent à Hugo un contre-discours idéologique ;
6) L'histoire de cette lutte s'éclaire à la lumière d'une analyse de l'écriture des drames.
 

 
DEUXIÈME PARTIE

 

I. - STRUCTURES : LES GRANDES UNITÉS
A) Le modèle actantiel
Syntaxe du drame hugolien - schémas des pièces - quelques conséquences - incertitudes sur les actants. - Le cas particulier des Burgraves. - Limites.
B) Deux espaces dramaturgiques: la division A/B
Origine de la division A/B - dédoublement - A/non A - Une détermination sans ambiguïté. - Ouverture et fermeture: A fermé, B ouvert - une ouverture à sens unique. - Lisibilité immédiate du système A/B - l'exemple de la première scène de Marion de Lorme. - Lucrèce Borgia. - Le mouvement dramatique : analyse des pièces. Schémas simples : Marion de Lorme - Le Roi s'amuse - Lucrèce Borgia - Angelo - Ruy Blas. Schémas complexes : Marie Tudor, Hernani (changement de sens), le cas particulier des Burgraves ; les Jumeaux, schéma inerte.
Inventaire de l'espace A
Personnages A par nature, A par situation. - a) Les maîtres de A : le Roi, le Ministre, les Seigneurs (personnage collectif - Lexique (redoublement du langage par les éléments de la régie): l'Or, la Clé, le Blason. - b) Instruments de A: le sbire, le bourreau, le bouffon - Lexique : l'échafaud, la hache. - c) Otages de A: la Femme, mouche et araignée. - d) Lieu A : le Palais-Prison, - Fête et fermeture - Lexique: la Fête nocturne et le Flambeau. - Mots-clefs dans le théâtre et dans la poésie lyrique: l'exemple de Noces et Festins.
Inventaire de l'espace B
Le héros B : le héros non-A et la conquête de l'espace B.
- Le truand et sa position particulière : le « loup libre ». -
Le lieu B: espace ouvert ou fissuré ; la réduction du lieu B.
C) Le système A/B.
Généralités. - Lois du système dans la dramaturgie hugolienne : raideur et caractére littéraire du système ; - problèmes posés ; - les lois, leur caractère logique. - Conséquences dramaturgiques.
Hugo et le drame romantique
Le système A/B et ses implications idéologiques - asymétrique, non-diachronique. - Le «contenu» de A : A à la fois l'ordre, le luxe et le mal, l'oppression. - L'espace B : confusion des sèmes ; B et l'idéologie de progrès ; refus de l'intégration, négation du «progrès » ; la migration de la valeur : la valeur B en B reste inerte. - Il est nécessaire d'approfondir les sèmes de B. - Le bouffon n'est bouffon que s'il est chez le roi.
 
II. - LE DRAME CARNAVALESQUE
A) D'une théorie du grotesque
Mikhaïl Bakhtine et la notion de Carnaval ; carnaval populaire, carnaval littéraire, écriture «dialogique». - La Préface de Cromwell : la diachronie hugolienne du grotesque (et son parallélisme avec celle qu'établit Bakhtine). - Polysémie du grotesque : le rire, le fantastique, l'horreur, la mort ; - la polysémie, racine du grotesque. - Dramaturgie du Carnaval : liberté de l'art et inversion des codes ; - cassure du discours tragique ; - cassure du discours historique ; - inversion de l'action, mise en question des actants ; - mise en question du Je de l'écrivain ; - le paradoxe du théâtre : peut-il y avoir écriture dialogique à la scène ? - L'affirmation du sublime et la prédominance du grotesque : le sublime et l'unité perdue.
B) Le drame carnavalesque
Les actants. - Le Je de l'écrivain - ne se dit dans le théâtre de Hugo, ni directement, ni indirectement. - Le Je hugolien et son nom : la présence indirecte du nom : Jean. - Le sujet : le sujet double, au départ polarisé ; le double nom du sujet, indice de sa double nature ; - le sujet monstrueux et sa quête ; - faiblesse du sujet ; - faiblesse et fracture du sujet, au niveau de l'histoire ; - dégradation du sujet historique du fait de son appartenance à un clan ; - l'exemple des Jumeaux, combinant toutes les formes d'affaiblissement du suiet. - Une dramaturgie du sujet volatilisé : le dévoilement progressif du sujet, l'action liée à une crise du sujet, le désastre final. - Le grotesque et le sujet : le rôle du bourreau. - L'Objet et son rapportavec le sujet : la réversibilité possible - le rapport sujet-objet défini en fonction de la division intérieure du sujet ; - échec du rapport et solitude du sujet. - Adjuvant et opposant : ambivalence de leurs rôles ; l'adjuvant destructeur e
t le traître-adjuvant ; - évaporation du traître. - Le Destinateur : le Grand Destinateur et l'ironie de la Providence, disposant l'action pour le mal ; - la prière inverse ; - pas d'intercesseur ; le creux de la fonction-destinateur et la place vide du personnage du père. - L'Action : Intronisation-Détronisation - Analyse de l'action des drames hugoliens en fonction de ce double mouvement. - Chute du puissant. - Carnaval : la double image de l'inversion de la puissance. - Cromwell, premier exemple - Marion de Lorme et Hernani en retrait par rapport à ce mouvement dramatique ; - les fables de la décapitation ; - Le Roi s'amuse ou la détronisation manquée ; - Lucrèce Borgia et la parodie de la décapitation, présence du Carnaval-mort ; - Marie Tudor et la détronisation du favori. - Angelo, ou la détronisation «parlée» : le grotesque en retrait. - Ruy Blas ou le Roi de Carnaval : carnavalisation de l'action ; - Les Jumeaux ou l'escamotage du processus ; - les Burgraves ou le passage du
processus au sérieux. - Inachèvement du processus carnavalesque. - Le Carnaval et le Commandeur.


III. - L'ÉCRITURE DES DRAMES
A) Une rhétorique : le roi s'amuse
1) Le code tragique et son inversion
Hugo accepte le code tragique : - la tirade et l'alexandrin ; - importance de la tragédie historique en vers ; - les discours. - les grandes unités, et leur coïncidence avec les actes. - Le personnage tragique et son inversion : constellations paradoxales - division intérieure du sujet - parole abusive - distorsion de la psychologie tragique. - Les trois unités et le jeu qu'elles autorisent : le jeu avec la durée ; « duplicité» et fissuration du lieu ; le lieu-cour des Miracles. L'inversion de l'action, le processus carnavalesque, et le déplacement du tragique. - Le paradoxe du grotesque : absence de comique ou de parodie : la contestation du tragique est contestation sérieuse. - Les scènes à micro-séquences : émiettement du dialogue et des personnages (acte I) ; - les scènes contrapunctiques.
2) Le Discours dans le Roi s'amuse ou la Parole inutile
De quelques définitions. - Le Discours et les actants. - Importance du destinataire-spectateur. - Discours et contexte.
Les discours
a) Le discours de Saint-Vallier. - b) Le discours de Triboulet, Acte V, scène 1 ; - le moi grotesque et l'histoire. - c) Le second monologue de Triboulet, Acte V, scène 3. - Quelques remarques pour conclure : exemples de discours de la dérision.
3) Décentrement du discours ou la dramaturgie de la vaine parole.
Discours redoublé par la régie - Discours sans destinataire ; - la question du public ; - le discours-bouteille à la mer ; - Qui parle ? le discours du mort, le discours du masque. - Comment Hugo brouille la communication. - Vacuité du contenu sémantique du discours. - Inadéquation du discours au contexte. - Dialogisme : la voix de l'Autre. - Contexte et superposition. - Le comédien et le pluriel du texte. - Discours et poétique dramatique. - Raminagrobis et la souris ou le procès avorté. - Le qui-perd-gagne du procès. - Où l'accusé court au-devant de la sentence, ou le plaidoyer se mue en accusation et l'accusation en vaine provocation. - La rhétorique de la souris devant le juge Rami- nagrobis. - Caliban parle : l'homme du peuple parle l'histoire, sans avoir le droit ni le moyen de le faire ; - inefficacité de la parole non étayée sur la puissance ; - nommer l'autre. - La parole parlementaire : mise en péril du pouvoir de la parole ; - la force des choses.
B) Du mélodrame au drame
Une poétique du Drame : Lucrèce Borgia
1) Mélodrame et tragédie. - Structure, code actantiel, signification idéologique. - Présence du mal ; la vertu bourgeoise dans le camp sadique du malheur ; - évacuation du mal social. - Politique du mélo. - Lucrèce Borgia et le mélodrame : des actants de mélodrame ? Ficelles mélodramatiques. - leur inversion : poison et reconnaissance. Éclatement du mélodrame. - Lucrèce et le code tragique : tragédie familiale, tragédie des Grands - concentration tragique.
2) La double structure : le sujet Gennaro et sa quête ; - échec et structure itérative. - Lucrèce, sujet monstrueux ; - destruction du schéma mélodramatique ; - Lucrèce, drame non-manichéen. - Les actants : Gennaro, objet divisé ; - les adjuvants-opposants. - Absence du destinateur.
3) La fête : le Souper à Ferrare (Acte III, sc. 1) - la fête : lectures possibles - le référent sociologique ; introduction du Carnaval dans l'espace aristocratique. - Scène première de l'acte III : 8 séquences ; le cas particulier de la séquence 7 et de sa réécriture pour la scène. - La dispersion dramaturgique dans cette scène. - La fête et l'espace-temps carnavalesque ; - éléments carnavalesques et espace-temps du carnaval, espace de la dérision ; - les deux voix, tragique et dérision. - La fonction poétique : mise en abyme ; - le paradigme Borgia ; - le double registre ; l'ambivalence. - Lecture et lectures : drame hugolien et poétique de l'écart.


IV. - UNE SYMBOLIQUE DE L'HISTOIRE
Une symbolique de l'histoire
Préliminaires : le saut symbolique ou le langage indirect. - La Prétace de Ruy Blas ; la symbolisation propre à Hugo et les méthodes pour la lire ; difficultés.
A) Une dramaturgie de l'objet : régie et symbole
Qu'est-ce que l'objet au théâtre ? une classification possible. - 1) L'objet historiquement daté et son fonctionnement sur l'axe métonymique ; l'objet relais du passé ; - l'objet et la lisibilité des signes qui le constituent. - 2) Les objets-clefs et la métaphorisation : leur petit nombre ; - le double registre ; - une combinatoire ; - métaphorisation. - 3) Retour à la métonymie : le double fonctionnement de l'objet et le double registre ; - individu et société ; - la tension historique.
B) Une symbolique du récit
Triangulation métaphorique de la fable ; - mythes et récits : les trois grands schémas. - 1) Le retour offensif du passé : sa signification et son renvoi à l'histoire. - 2) La décapitation-castration : le texte du Rhin ; l'ancienneté du schéma ; son histoire chez Hugo et son rapport au moi ; - Le Roi s'amuse ; Lucrèce Borgia ; Marie Tudor, miroir de la révolution de juillet. - 3) Ruy Blas et le Mythe de Caïn : a) l'homme du peuple au pouvoir ; b) Caïn et le mal historique ; c) l'illusion du rôle historique ; d) la mort de l'histoire. - Analyse du Bon Appétit, Messieurs. - 4) Les Jumeaux et le silence de Hugo.
  
CONCLUSION
Le théâtre en question
Hugo dramaturge aujourd'hui. - Un théâtre épique ; dramaturgie de la distance, dramaturgie de la violence. - Le projet hugolien et sa destruction. - Le Je du dramaturge et l'occultation du sujet. - Le discours de l'Âne. - Sade et la destruction. - Traverser la profondeur. - Le refus. - Le moi de l'Infini. - La réponse de l'autre. - La Ménippée-Maglia ou le Roi et le Bouffon.
Appendice : Le Roi s'amuse, acte V, 1 et 3, Lucrèce Borgia, acte III, 1
Bibliographie
Index des noms propres
Index des ouvres, titres, projets
Table