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L’obsession en littérature : formes et enjeux (Tozeur, Tunisie)

L’obsession en littérature : formes et enjeux (Tozeur, Tunisie)

Publié le par Marc Escola (Source : Meriem AHMED)

Université de Gafsa

 

Institut Supérieur des Etudes Appliquées en Humanités de Tozeur

Unité de Recherche : URLDC - Université de Sfax

 

Colloque international

L’obsession en littérature : formes et enjeux

Tozeur 12-14 mars 2018

 

Concept essentiellement psychanalytique et lié à l’inconscient freudien, l’obsession est un trouble de la pensée, une angoisse ou une névrose. Elle se définit comme une pathologie dont les manifestations sont à la fois somatiques, psychiques mais aussi linguistiques. C’est le ressassement d’une idée, la répétition d’un comportement déréglé ou la reprise de formules ou d’énoncés dont le sujet n’arrive pas à se libérer.

Ce colloque n’a pas pour but l’étude psychanalytique de l’obsession. Il s’agit plutôt d’examiner le concept d’un point de vue littéraire, question qui a été peu étudiée. Le propos est de repenser les multiples formes et enjeux de l’obsession dans le champ littéraire en interrogeant les effets que produit cette forme de névrose dans le corps du texte, l’architecture de l’œuvre et le style de l’écrivain.

Par une approche psychocritique s’inspirant de l’étude de Charles Mauron Des métaphores obsédantes au mythe personnel -mais sans se limiter à cette méthode-, ce colloque pourrait interroger les représentations de l’obsession et les manières de la transcender. A travers les métaphores obsédantes, les leitmotive, les personnages et les situations récurrentes, on essaiera de définir le « mythe personnel » de l’écrivain. Beaucoup plus qu’une tendance pathologique, l’obsession devient, dans le domaine artistique, une source de création et permet à l’artiste d’affirmer sa singularité.

Le colloque pourrait étudier les troubles que révèle la représentation du personnage obsédé. Chez Molière, les pères sont prisonniers d’une idée fixe qui perturbe leurs relations sociales et constitue une source de comique. Phèdre est déchirée entre l’exigence de pureté et le sentiment obsédant de la faute, ce qui révèle l’ambivalence des sentiments. Quant aux personnages de Sade, ils manifestent une recherche effrénée de toutes les formes de perversion sexuelle. Et Jacques Lantier, dans La Bête Humaine, sujet à des troubles de l’identité, vit «  dans son être, de subites pertes d’équilibre, comme des cassures, des trous par lesquels son moi lui échapp[e][1] » : pour reprendre la formule de Pierre Bayard, Zola, comme Maupassant, écrit « juste avant Freud ».

Mais la sociocritique a montré que le texte littéraire révèle un discours social. Les thèmes obsédants des textes pourraient donc être étudiés à la lumière de l’Histoire. On s’interrogera sur la prééminence du corps chez Rabelais, l’omniprésence du bonheur au XVIIIe siècle (Robert Mauzi) ou la fascination pour l’Orient au XIXe siècle (qui selon Edward Said, ne serait pas sans lien avec le colonialisme). Il existe des obsessions collectives, qui s’expriment dans la littérature comme dans la société : l’obsession identitaire peut aboutir à des idéologies totalitaires, à la phobie de l’Autre et à la fascination pour les idéologies (Céline).

Cependant, il ne faut pas confondre l’artiste et son œuvre. La critique traditionnelle identifie volontiers le romancier à ses personnages, ce quoi conduit Brunetière à refuser tout talent à Zola qui, selon lui, est prisonnier de ses fantasmes et refait toujours la même œuvre. Or, le processus de la création est complexe. Chez certains écrivains, l’obsession est une source féconde de la création ; elle engendre un désir intense d’exorciser le mal, de se libérer par l’écriture. Liée à la faute, au scrupule, à la transgression de l’interdit, elle conduit à la sublimation des pulsions (Mauriac). Afin de se délivrer de ses fantasmes et d’éviter la folie (Artaud), l’écrivain peut aspirer à un  Absolu : l’Art pur (Flaubert), l’Idéal (Baudelaire,  L’Azur (Mallarmé). On de demandera comment un écrivain arrive à donner forme à l'obsession et à l'inscrire dans un processus de production et de réception littéraires.

 À titre indicatif,  nous proposons les axes de réflexion suivants :

-L'obsession phobique et la  névrose obsessionnelle.

-Les manifestations thématiques de l'obsession.

-L'obsession et le thème du regard (Robbe-Grillet).

-L’obsession de lieux (l’Orient) ou d’époques (Barbey d’Aurevilly).

- L’obsession des origines et la quête identitaire.

- La stylistique de l’obsession.

 -La production et la réception de l'obsession.

-Rapports de l’obsession avec la morale et la religion.

-L’obsession et le contexte historique.

-Rapport de l’obsession et de la modernité (Blanchot, Beckett).

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Bibliographie :

-         Amfreville Marc,  Les Formes de l'obsession dans la littérature anglaise et américaine, Michel Houdiard, 2007.

-        Anzieu Didier, « Le discours de l’obsessionnel dans les romans de Robbe-Grillet », Les Temps Modernes, octobre 1965.

- Borel A. et  Cénac M., « L'Obsession », in  Revue  française Psychanalytique., Paris, 1932.

-  Brusset Bernard, Couvreur Catherine et coll., La Névrose obsessionnelle, Presses Universitaires de France, 1993.

-Green  André, « La névrose obsessionnelle », in Revue française de psychanalyse1967.

   -Jacques André, « L’identité ou le retour du même. Les discours sur   l’identité et les configurations de la parenté », Les Temps modernes, n° 441-442, p. 2027.

-    Klima Yvan, « L'obsession de la perfection », Le Magazine littéraire, 2002.

 -   La Licorne, N° 20, octobre 2005 : « L'obsession de la faute ».

   -          Mauron Charles, Des métaphores obsédantes au mythe personnel, Paris, José Corti, 1963.

   -   Vadé Yves, Rabaté Dominique,  Écritures du ressassement,  Modernités 15, Presses Universitaires de Bordeaux, 2001.

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Le colloque se tiendra du 12 au 14 mars 2018 à l'Institut Supérieur des Etudes Appliquées en Humanités de Tozeur. Les communications seront d'une durée maximale de 20 minutes. Les propositions de communication doivent être envoyées au plus tard le 15 février 2018, accompagnées d'une notice biobibliographique à :

moufida.aliou@gmail.com

meriemahmed13@gmail.com

malek.khbou@gmail.com

 

Date limite de réponse et de confirmation : 25 février 2018

Remise des articles : 30 juin 2018

 

Responsables : ISEAH Tozeur/ URLDC Sfax

Comité d’organisation : Meriem Ahmed, Moufida Aliou, Malek Khbou, Tarek Sahbi Meddeb.

 

[1] Emile Zola, La Bête humaine, Le Livre de Poche, 2015, p. 98.