Essai
Nouvelle parution
R. Pedot, Le Seuil de la fiction : essai sur le secret

R. Pedot, Le Seuil de la fiction : essai sur le secret

Publié le par Marielle Macé (Source : Richard Pedot)

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Richard PEDOT

Le Seuil de la fiction : essai sur le secret

Paris : Michel Houdiard, 2010

ISBN : 978-2-35692-009-6

18 euros

Présentation de l'éditeur:

Le retour fréquent de la figure du seuil dans l'universimaginaire de la fiction suggère l'existence d'un lien complexe entre les deux.Cette figure ne peut être considérée comme un maniérisme insignifiant, à viséeexclusivement ornementale ou un procédé pour créer à peu de frais le frissonassocié au secret. Mon projet est d'explorer la relation entre seuil et fictionautour de la notion de secret, et de montrer que l'espace aporétique du seuilest le lieu privilégié du récit, en raison de son indécidabilité foncière.

Sur le seuil, en effet, l'intérieur de la maison s'avancejusqu'à son dehors : c'est sa fonction d'accueil. C'est un lieu qui, s'iln'est pas encore rigoureusement à l'intérieur, le désigne déjà, en n'étant plusrigoureusement à l'extérieur, car construit avec la maison. L'inverse se déduitlogiquement, mais il est encore moins apparent parce que c'est la fonctiond'accueil qui prédomine, surimposant un sens positif sur la direction qui mènedans la demeure — de la même manière que l'on parle de porte d'entrée, bienqu'en tout état de cause, elle serve tout autant à sortir. Sur le seuil, donc,le dedans communique intimement avec son dehors, le dehors avec le dedans mais,comme surface cadastrée, il produit une reterritorialisation au lieu de la plusgrande déterritorialisation, puisque s'y affole le partage réglé entre dedanset dehors.

D'où l'intérêt de cette figure dans une approche de lafiction. En premier lieu, le seuil peut être vu comme une manière d'illustrerles moments de transition et d'indécision dont anthropologues et philosophes oupsychanalystes nous disent qu'ils appellent un traitement symbolique — rituelou artistique. Mais il convient de dépasser cette perspective encore tropthématique, mon argument étant que la fiction elle-même est affaire de seuils,intrinsèques (incipit, excipit, par exemple) et extrinsèques (dans ses liensincertains avec d'autres modes discursifs comme le mythe, l'histoire, laphilosophie, ou encore la critique littéraire). Je voudrais démontrer que le récitde fiction est une forme de déambulation sur ce territoire indécis du seuil,qu'il crée tout autant qu'il le révèle.

Ceci n'est pas sans intérêt quant à la façon dont nousenvisageons la question du secret. L'examen attentif de la figure du seuil dansla fiction montre que le secret ne peut se définir en termes exclusivementherméneutiques, même dans sa version psychanalytique, ou en termestranscendantaux, comme lorsque secret signifie mystère. Le secret, à ladifférence de l'énigmatique ou du mystérieux, n'est pas susceptible derévélation, car il y va toujours en lui du secret de sa représentation ou deson interprétation, et finalement du langage — dit autrement : il y va dusecret du seuil qui mène à la révélation.

Le Seuil de la fictionest pour une très grande part fondé sur une lecture de la fiction britanniquecontemporaine, mais fait également fréquemment appel à des oeuvres plusanciennes ou en provenance d'autres aires culturelles ou artistiques, selon lesbesoins de l'argumentation. Ce travail en outre s'appuie sur la philosophie etla critique contemporaines dont le lien à la littérature est à son tourexaminé. Il se distingue des études postmodernes sur la question du seuil (la liminality des anglo-saxons) en ce qu'il prétend que la figuredu seuil est inhérente à la dynamique textuelle et narrative de la fiction etqu'elle aide à la définir — et de la sorte n'est en aucun cas spécifique à uneépoque ou à une aire culturelle, la spécificité n'appartenant qu'auxreprésentations idéologiques dominantes. Il se différencie également d'unevision du secret comme extérieur à la fiction, qui joue dès lors un rôled'obstacle à lever, posant au contraire qu'il n'y a de secret dans la fiction qui ne soit en quelque manière secret de la fiction. Enfin, ce travail plaide pour unedéconstruction du rapport critique entre objet et sujet d'interprétation,fiction et critique de la fiction, dans la pratique même de l'interprétationlittéraire.

Richard Pedot est Professeur de littérature anglaise àl'Université de Paris Ouest Nanterre. Ses précédentes publications incluent Perversionstextuelles dans l'oeuvre d'Ian McEwan etHeart of Darkness de Joseph Conrad : le sceau de l'inhumain.

TABLE DES MATIÈRES

I. LE RÉCIT SUR LE SEUIL

Le tableau indécis

Le récit sur le seuil

LeTemps et laVérité

II. LE SECRET DU VOILE

En un miroir confus

Entre image et texte : le travail de lamémoire

Le leurre du seuil

Secret, mystère, énigme

III. FRANCHIR LE SEUIL

Histoire d'une porte

Un drame à huit clos

De l'autre côté de la porte, et cequ'Utterson n'y trouva pas

Bienvenue au royaume de l'inimaginable

IV. L'INTIME ALTÉRITÉ

Étrange intimité

Rencontres secrètes

L'intimité de l'âme retrouvée

Détour par Freud

V. LA VACANCE DU SECRET

Des clés et des serrures

Cryptes et traces

... et autres labyrinthes

VI. LE DÉBARRAS DE LA FICTION

Sortilège des seuils

L'embarras de la mort

Figures du corps

Identité de fiction

VII. DE L'INCIPIT À L'EXPLICIT

Faux départs

Fins de partie

Entre réel et imaginaire

SEUILS CRITIQUES (CONCLUSION)