Questions de société
Quelle logique pour les concours : 100 000 candidats

Quelle logique pour les concours : 100 000 candidats "de trop" ?

Publié le par Vincent Ferré

[copie d'un échange d'emails sur la liste de diffusion de la coordination nationale des universités, liste destinée à l'échange d'informations et à la préparation de rencontres de la Coordination Nationale des Universités]
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1) Message initial de Pedro Cordoba : pedrocor@club-internet.fr [nom et email indiqués avec son accord]

Je n'ai pas vu de commentaire sur cette déclaration de Darcos à l'Assemblée :

"Par ailleurs, nous voulons rompre avec le système qui a prévalu jusqu'à ce jour, qui pousse un grand nombre d'étudiants à s'inscrire dans ces filières de formation, certains avec très peu de chances d'aboutir, au point que, chaque année, 100 000 d'entre eux s'engagent dans des formations professionnelles sans réussir le concours."

C'est très nouveau et très énigmatique.
Pour ne pas changer, il y a d'abord une inexactitude : les 100 000 en question ne s'engagent pas dans une formation professionnelle, ils s'inscrivent dans une année de préparation au concours. Qu'ils ne réussissent pas fait partie de la logique des concours. Dura lex sed lex. Le taux de réussite aux concours administratifs est, en règle générale, encore plus bas que celui des concours de l'Education nationale. Le gouvernement pense-t-il changer les règles du jeu pour l'ensemble des concours de la fonction  publique ?

Et en ce qui concerne « ses » propres concours, comment Darcos compte-t-il s'y prendre pour limiter le nombre de candidats ? Une sélection draconienne à l'entrée en M1 [...] ? Est-ce une solution ? Elle a déjà été essayée par les IUFM, surtout pour le CRPE (80% des candidats sont exclus de la préparation) avec pour seul résultat un effondrement continu de leurs résultats au fil des ans : ils ne forment guère plus désormais que la moitié des lauréats. Les mêmes causes ayant les mêmes effets, toute sélection à l'entrée d'un master "professionnalisant" entraînera nécessairement une augmentation proportionnelle du nombre des candidats libres, choisissant un autre parcours de master. Il y aura des reçus parmi ces candidats libres malgré eux, victimes de la sélection. Ils seront d'autant plus nombreux que la sélection sera plus sévère à l'entrée en M1. Mais ils n'auront pas eu droit à une seule heure de stage. Avec quel bagage professionnel s'engageront-ils dans la carrière ?

L'idée d'une sélection avant le concours est absurde. S'il y a des concours, c'est le concours qui fait la sélection, il ne peut pas y en avoir d'autre.


2) [commentaire]
La logique semble claire : le nombre de stages prévus par le Ministère, notoirement insuffisant pour tous les préparationnaires actuels, nécessitera une sélection, à la charge des universités. Cela  permettra de faire baisser le nombre de candidats aux concours. Si on  admet qu'il y a actuellement 150 000 candidats et qu'il y aura 50 000  stages proposés, on est bien dans l'estimation du ministre : 100 000 candidats de trop.

3) [remarque connexe]

Les projets de Darcos concernant les stages sont d'autant plus stupéfiants qu'ils consistent ni plus ni moins à mettre en place un dispositif qu'il a lui-même dénoncé lors de sa mémorable interview du 12 février, et dont il a voulu faire croire qu'il correspondait à la réalité:

"Aujourd'hui (...) les professeurs passent un concours, ils sont mis dans l'Institut de formation des maîtres, où on leur apprend des théories générales sur l'éducation et de temps à autre, ils vont remplacer un professeur absent. C'est pas comme ça qu'on forme des gens. Autrement dit, ils sont sans arrêt devant un simulateur de vol. Alors que dans le système que je propose, ils ne seront pas dans un simulateur de vol" "