Questions de société

"Que faire de la démocratisation à l'Université ?" par A. Andro et M.-H. Bacqué

Publié le par Arnauld Welfringer

Que faire de la démocratisation à l'Université ?

Dans un article paru sur le site Mouvements, Armelle Andro et Marie-Hélène Bacqué discutent de la pertinence de la loi LRU pour permettre à l'Université de mieux transmettre les savoirs et d'assurer l'insertion professionnelle des étudiants, et à partir d'une analyse des insatisfactions des enseignants et des étudiants, esquissent une série de propositions alternatives :

"Le constat est partagé : « ça ne peut plus durer ». Les inégalités sociales dans les parcours universitaires sont criantes. L’université accueille de la plus grande partie des bacheliers peu dotés en capitaux (économiques, sociaux, scolaires) alors même qu’elle est elle-même nettement moins dotée en moyens de formation que les classes préparatoires, les grandes écoles mais aussi les filières courtes. La massification scolaire a produit une recomposition forte des filières sélectives dans le champ de l’enseignement supérieur et a construit une université à deux vitesses dans laquelle l’échec est le lot d’une majorité des étudiants.

Bien que justifiée par ce constat, la réforme proposée par la loi LRU reste une réforme institutionnelle qui non seulement n’aborde pas les enjeux centraux qu’une réforme de fond du système nécessiterait, mais qui risquent de renforcer une bonne part des dysfonctionnements pointés actuellement.

Les craintes du corps enseignant sur les conséquences de la loi LRU sont claires : le risque de remise en cause du statut d’enseignant-chercheur est patent, le développement de formes d’autoritarisme local est inquiétant, la mise en concurrences des universités inégalement pourvues fait craindre un renforcement du système à double vitesse. Mais le malaise va au-delà de ces enjeux institutionnels. [...]

Quand aux étudiants, leurs craintes sont multiples et elles sont portées à la fois par les « bloqueurs » et les « anti-bloqueurs » pour reprendre les deux figures emblématiques du mouvement. Les étudiants « bloqueurs » craignent le démantèlement du service public d’enseignement supérieur, la fin du libre accès et de l’existence de certaines filières de l’université, la détérioration du statut d’étudiant. Mais les étudiants « anti-bloqueurs » sont aussi à de nombreux égards des étudiants mobilisés. Au-delà de leur revendication de pouvoir suivre les cours, ils sont aussi porteurs d’un discours sur les enjeux différenciés de l’accès à l’enseignement supérieur pour tous ceux qui sont issus de la massification du système universitaire. [...] Dans ce contexte, la mobilisation étudiante doit être analysée à la fois du point de vue des « bloqueurs » et des « anti-bloqueurs » dont la fracture ne peut se réduire à une opposition gauche/droite mais recoupe très largement ces lignes de clivage politique.

Répondre à ces préoccupations diverses appelle à disjoindre l’enjeu de la transmission des savoirs universels de celui de la construction de l’insertion sociale. Surtout, il convient de revenir sur une représentation simpliste opposant ces deux visions qui empêchent d’avancer dans la réflexion..."

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