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Qu'appelle-t-on classer ? Rencontre interdisciplinaire autour des pratiques et des théories classificatoires

Qu'appelle-t-on classer ? Rencontre interdisciplinaire autour des pratiques et des théories classificatoires

Publié le par Marc Escola (Source : Moreau Sandra)

Qu’appelle-t-on classer ? »

Lundi 21 Septembre 2015, 9h30-17h

Maison Archéologie & Ethnologie, René-Ginouvès, Salle du Conseil, 4ème étage, Université Paris Ouest Nanterre La Défense

Si on peut dire que toute connaissance du monde vivant commence par un effort pour en identifier et en recenser les parties, au moyen d’une classification et d’une nomenclature qui permettent de se familiariser avec elles, de se les approprier, la diversité des manières de classer interroge. En effet, lorsque l’on s’intéresse à la classification à la fois comme méthode et comme résultat de cette méthode, il apparaît difficile de rassembler les diverses expériences que cette notion recouvre. La question se pose alors de savoir si l’on peut établir une continuité entre, d’une part, les classifications populaires et scientifiques, si telle distinction a un sens, et d’autre part, à l’intérieur de la science, des entreprises comme celle de Théophraste, prolongement des travaux zoologiques d’Aristote qui établissent un lien essentiel entre science et métaphysique[i], et la systématique linnéenne, distinguant clairement des niveaux de conjonction entre les plantes, dans un prétention à faire de la systématique une science, ou encore la taxinomie phylogénique contemporaine, qui disqualifie les classifications antérieures pour privilégier les hiérarchies de caractères reflétant un processus évolutionniste sous-jacent.

C’est que si toutes les classifications, profanes ou scientifiques, peuvent être jointes sous le titre de « taxinomies » en vertu du fait qu’elles imposent une « hiérarchie des classes d’organismes, ou taxons »[ii], cette hiérarchie doit elle-même être rapportée à des visées qui divergent fondamentalement et ne sont pas toujours jugées légitimes. En effet, une classification peut avoir une portée clairement ontologique, davantage épistémologique, ou encore utilitaire[iii], aucun de ces aspects n’étant bien sûr exclusif des autres. Elle peut chercher à rendre compte des rapports intimes entre les individus, ou entre ces individus et leur milieu naturel ou anthropisé. Elle peut enfin avoir une dimension critique, comme le montre, pour le cas de l’anthropologie, Philippe Descola qui remet en question, à partir par exemple des classements opérés par les Ashuar d’Amazonie, le rapport entre intériorité et physicalité et, à partir de là, la relation entre nature et culture qui fonde notre science naturaliste[iv]. Cette diversité dans les pratiques, qui s’assortit parfois d’une prétention à l’hégémonie, doit nous conduire à réinterroger l’action même de classer. Que classe-t-on exactement lorsqu’on prétend classer les êtres et les choses et à quelle fin le fait-on ?

La journée d’étude « Qu’appelle-t-on classer ? » cherchera à apporter des éléments de réponse à cette question en développant une visée interdisciplinaire et en s’attachant à parcourir divers lieux et diverses époques.

 

Programme de la journée :

9h30 : Accueil des participants

9h45 : Anne Videau, Université Paris Ouest Nanterre La Défense.

 

10h00-10h45 : Marie-Elisabeth Boutroue, CNRS

« Différences et classes : la situation pré-linnéenne. »

 

10h45-11h30 : Philippe Selosse, Université Lumière Lyon 2

« La position d'Andrea Cesalpino sur les classements de plantes à la Renaissance :

étude du De Plantis (1583). »

 

11h30-12h15 : Jean-Marc Drouin, Muséum National d’Histoire Naturelle,

Centre Alexandre Koyré

« Métaphores spatiales et classifications botaniques. »

 

12h15-13h : Thierry Hoquet, Université Jean Moulin Lyon 3

« Dénommer et classer : l’inventaire du vivant au siècle des Lumières. »

 

13h-14h30 : Pause déjeuner

 

14h30-15h15 : Georges Métailié, Centre Alexandre Koyré

« Classifications ethnobotaniques en Chine - Aperçu historique. »

 

15h15-16h : Sandra Moreau, Université Paris Ouest Nanterre La Défense

« La classification linnéenne et ses monstres. »

 

16h-16h45 : Guillaume Lecointre, Muséum National d’Histoire Naturelle

« Les enjeux cognitifs et scientifiques de la classification. »

 

16h45-17h : Clôture

 

[i] Pierre Pellegrin, La classification des animaux chez Aristote. Statut de la biologie et unité de l’aristotélisme, Paris, Les Belles Lettres, 1982.

[ii] Scott Atran, Fondements de l’histoire naturelle. Pour une anthropologie de la science, Editions Complexe, 1986, p. 14.

[iii] Pour le cas de Linné, par exemple, Lisbet Koerner a montré comment la démarche scientifique du naturaliste suédois était étroitement liée à l’identification de ressources à l’échelle de la nation (Linnaeus. Nature and Nation, Harvard University Press, 2000).

[iv] Philippe Descola, Par-delà nature et culture, Gallimard, 2005.