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Pour une nouvelle économie du savoir et de la littérature. Genres narratifs et logique de marché

Pour une nouvelle économie du savoir et de la littérature. Genres narratifs et logique de marché

Publié le par Vincent Ferré (Source : Alessandro Leiduan)

Ce colloque s’inscrit dans le cadre de la XXIVe édition des Journées des Romanistes allemands organisée, cette année, à l’université de Mannheim (26-29 juillet 2015 http://www.romanistentag.de/index.php?id=912). Le thème général de la Journée est le suivant : « Romanistique et économie : structure, culture et littérature ». A l’intérieur de ce colloque, la section thématique « Pour une nouvelle économie du savoir et de la littérature »  vise à étudier l’imbrication entre économie et littérature par le biais de la notion de sérialité dans le domaine des genres narratifs.

Description : La notion de littérature a été longtemps l’otage d’une idéologie qui tendait à circonscrire ses effets sociaux à la sphère esthétique. Celle-ci s’est affirmée, dans la tradition culturelle de l’Occident, comme le lieu par excellence du plaisir désintéressé: la méconnaissance des intérêts qui ont toujours présidé à l’interaction entre l’imaginaire social et les œuvres littéraires est ainsi devenue le trait distinctif du crédo esthétique moderne (Gadamer: 1960). Au fur et à mesure que le capitalisme s’affirmait, sous l’égide des politiques libérales, comme le seul et unique mécanisme régulateur de la vie sociale, le déni des in­térêts extra-esthétiques a pris la forme d’un reniement de la dimension économique de l’art (Bourdieu: 1998). Un sort semblable a été réservé à cet autre pendant de la littérature imaginaire qu’est la littérature de « divulgation scientifique », (qu’on pourrait aussi appeler, d’un terme plus général, « factuelle »), c’est-à-dire la littérature vouée à affiner la compréhension sociale du monde : l’idéal humaniste du savoir a, en effet, incliné les intellectuels à condamner toute forme de marchandisation du savoir ou à l’assimiler à une sorte de dégénération culturelle (Adorno: 1989). Enjoliver l’apparence d’un genre narratif factuel pour en augmenter l’attrait commercial a été considéré comme une trahison de la vocation scientifique qui devrait présider aux finalités sociales de ce type de communication.

Mais, sommes-nous sûrs que l’ingérence de l’économie sur les pratiques d’écriture narrative produise uniquement des œuvres dépourvues de toute valeur esthétique ou scientifique? Ne s’agit-il pas plutôt d’un phénomène qui devrait nous amener à repenser les catégories esthétiques et scientifiques tradition­nelles?

C’est cette deuxième option que nous voudrions pouvoir développer dans le cadre d’une section thématique consacrée à l’analyse des genres narratifs contemporains qui, sous l’influence du marché, affichent des caractères ir­réductibles à l’idéologie esthétique et scientifique traditionnelle.

Dans le sillage des recherches sémiotiques d’U. Eco, F. Jost, R. Baroni, F. Revaz et tant d’autres, nous chercherons, à travers l’étude des formes commerciales de la narration sérielle contemporaine, à repenser les catégories qui définissent la valeur esthétique et scientifique des œuvres littéraires.

Nous articulerons notre réflexion autour de trois champs thématiques:

1.    l’incidence de l’économie sur les formes narratives d’œuvres uniques, en­visagées indépendamment de la série à laquelle elles appartiennent (effets de tension narrative, suspense, curiosité, surprise, etc.)

2.    l’incidence de l’économie sur les formes narratives d’œuvres sérielles entre­tenant des liens de dépendance réciproque (reprise, série, saga…)

3.    l’incidence de l’économie sur les catégories esthétiques et scientifiques qui régissent le rapport que le public entretient avec les genres narratifs fiction­nels et factuels auxquels la société est redevable de son univers imaginaire ou de sa perception de la réalité.

Ces axes de travail sont donnés à titre indicatif et toute proposition de communication sera étudiée avec intérêt.

Les propositions de communication en français ou en italien d’une longueur de 300 mots environ, ainsi qu’une courte notice bio-bibliographique sont à envoyer à l’adresse suivante : leiduanalex@hotmail.com  pour le 31 décembre 2014.

Le coût d’inscription au colloque est de 60 euros. Les frais de transport et d’hébergement sont à la charge des participants.

Bibliographie :

Adorno, T.-W. (1989), Théorie esthétique, trad. française de M. Jimenez et E Kaufholz, Klinckseick.

Adorno, T.-W. & Horkheimer, M. (1997), Dialettica dell’illuminismo, trad. Ital. di S. Solmi, Torino: Einaudi.

Baroni, R. (2007), La tension narrative. Suspense, curiosité et surprise. Paris : Seuil.

Baudrillard, (1979), De la séduction, Paris, Editions Galilée.

Bourdieu, P. (1998), Les règles de l’art. Genèse et structure du champ littéraire, Paris : Seuil.

Eco, U. (1964), Apocalittici e integrati, Miano: Bompiani.

Eco, U. (1985), Sugli specchi e altri saggi, Milano: Bompiani.

Eco, U. (1978), Il Superuomo di Massa, Milano : Bompiani.

Gadamer, H.-G. (1960), Verità e metodo, Milano: Bompiani.

Gervais, B. (1990), Récits et actions, Québec : Le Préambule.

Ginzburg, C. (1986), Miti, emblemi, spie, Torino : Einaudi.

Jost, F. (2005), Comprendre la télévision, Paris : Colin.

Prince, G. (1982), Narratology: The Form and Functionning of Narrative, Berlin: Mouton.

Revaz, F. (2009), Introduction à la narratologie. Action et narration, Bruxelles : De Boeck, Duculot.

Ryan, M.-L. (1991), Possible Worlds, Artificial Intelligence, and Narrative Theory, Bloomington: Indiana University Press.

Ryan, M.-L. (2005), “Narrative”, Routledge Encyclopedia of Narrative Theory, Herman, D., Jahn, M. et M.-L. Ryan (eds), London: Routledge, pp. 344-348.

Schaeffer, J.-M. (1999), Pourquoi la fiction ? Paris : Seuil.

Searle, J. (1982), « Le statut logique du discours de la fiction » dans Sens et expression. Paris : Éditions de Minuit.