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Portraits du poète en chercheur (19-20e s.)

Portraits du poète en chercheur (19-20e s.)

Publié le par Hugues Marchal

Journée d'études du programme ANR
Euterpe : la poésie scientifique en France de 1792 à 1939

La poésie scientifique qui chante en vers savoirs et savants, et qui atteint son apogée des années 1770 à la Restauration, apparaît comme le fleuron d'une culture unifiée dont les membres se définissent par leur maîtrise de compétences allant des « épines des mathématiques aux fleurs de la poésie » (Voltaire). Au détour des Trois règnes de la nature, Delille se met en scène disséquant un polype et nombre de savants, tels La Condamine, Carnot ou l'obstétricien Sacombe, composent des poèmes de nature diverse.

Cette unité éclate au fil du 19e siècle, à mesure que sciences et littérature se spécialisent, et que de part et d'autre, des voix s'élèvent pour condamner tout mélange des genres : Baudelaire proclame le « caractère extra-scientifique » de la poésie, et le géologue Flower invite les poètes à ne pas se mêler de science. De norme, la circulation entre vers et recherche contemporaine devient exception. Le cas de Charles Cros, auteur du Coffret de santal et co-inventeur du phonographe, est résolument isolé, et l'histoire culturelle n'a guère retenu les poèmes de Boucher de Perthes ou Laennec.

Pourtant, la manière dont le rôle social des poètes a été redéfini à partir du romantisme, et la façon dont les avant-gardes esthétiques ont valorisé la novation, ont conduit à faire de la figure du « chercheur » une catégorie à laquelle les deux fonctions désormais bien distinctes du poète et du scientifique persistent à s'identifier. Alors que, par son étymologie, le verbe trouver continue à renvoyer aux termes de trope et de trouvère, Rimbaud fait du poète un « suprême Savant », qui « cherche lui-même » et dont les « inventions d'inconnu réclament des formes nouvelles », tandis qu'Apollinaire invite ses pairs à imiter les expérimentations des hommes de science – une posture reprise tout au long du 20e siècle par des courants aussi divers que l'Oulipo ou, tout récemment, la « biopoésie ».

Avec la figure du chercheur, c'est donc à un point de jonction et de concurrence entre scientifiques et poètes que cette journée d'études s'attachera, pour en étudier la construction, les enjeux et l'évolution au 19e et 20e siècles.

Programme


14 h 00 – Hugues Marchal (Euterpe / UMR 7171)
Présentation

14 h 30 – Dominique Combe (Euterpe / UMR 7171)
La poésie philosophique, entre science et spéculation

15 h 00 – Marta Caraion (Lausanne)
Poètes, savants, inventeurs ou le jeu des chaises musicales

15 h 30 – Discussion et pause

16 h 00 – Caroline de Mulder (Euterpe / UMR 7171)
"Regarder et savoir voir": les qualités scientifiques du poète dans la prose après 1850

16 h 30 – Hugues Marchal (Euterpe / UMR 7171)
Expérimentation biologique et avant-gardes poétiques dans la revue transition

17 h 00 – Maxime Del Fiol (Montpellier 3)
Lorand Gaspar : un dépassement poétique du partage traditionnel entre la poésie et la science ?

17 h 30 – Discussion et fin des débats.

Lieu et informations pratiques

Université de Paris III – Sorbonne nouvelle
Centre Censier. Salle 410 (4e étage)
13, rue de Santeuil
75005 Paris
M° Censier-Daubenton
Entrée libre

Le programme Euterpe : la poésie scientifique en France de 1792 à 1939, disparition d'un genre et reconfiguration d'une frontière vise à localiser, analyser et rendre accessible le corpus de la poésie scientifique française publié entre la Convention et le début de la seconde guerre mondiale, période durant laquelle ce genre, aujourd'hui oublié, a progressivement disparu. Plus largement, le projet s'attache à reconstituer le contexte socio-discursif dans lequel cette disparition a eu lieu, pour mieux comprendre comment et pourquoi les cultures littéraires et scientifiques ont pu connaître une scission fondatrice de la modernité. Soutenu par l'Agence nationale de la recherche, dans le cadre de son programme « Jeunes chercheurs », le projet réunit des chercheurs en littérature et en histoire des sciences. Il est piloté par l'UMR 7171 « Ecritures de la modernité » (CNRS-Paris III Sorbonne nouvelle), en partenariat avec l'UMS Caphès, Gallica (Bibliothèque nationale de France) et l'Université de Montréal.