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POEtiques L'influence de Poe sur les théories et les pratiques des genres dans le domaine français du XIXe au XXIe siècles

POEtiques L'influence de Poe sur les théories et les pratiques des genres dans le domaine français du XIXe au XXIe siècles

Publié le par Marielle Macé (Source : Nicole Biagioli)

Colloque International POEtiques L'influence de Poe sur les théories et les pratiques des genres dans le domaine français du XIXe au XXIe siècles Appel à communications Modalités Lieu : Centre de Recherche Transdisciplinaire en Epistémologie de la Littérature, EA1758, UFR Lettres Arts et Sciences Humaines, Université Nice-Sophia Antipolis, 98 Bd. Herriot, 06 Nice, France. Dates : jeudi 22 et vendredi 23 janvier 2009. Durée : deux journées Date limite de dépôt des propositions : 30 août 2008 A envoyer à : biagioli@unice.fr Directeur du colloque : Nicole Biagioli, professeur de langue et littérature française, co-responsable de l'axe Identités Génériques au CTEL. Comité scientifique : Yann Baetens (professeur, université de Leuwen), Daniel Bilous (professeur, université de Toulon), Jacques Neefs, (professeur Paris 8 et Johns Hopkins University, Baltimore), Michel Remy (professeur, université de Nice-Sophia Antipolis), Jean-Marie Seillan (professeur, université de Nice-Sophia Antipolis) Partenaires associés : Johns Hopkins University, Baltimore, ambassade des USA en France. Cadre théorique L'identité d'un genre littéraire se construit à travers les interactions entre producteurs et récepteurs en réaction aux oeuvres et en fonction des horizons culturels. La célébration du bicentenaire de la naissance d'Edgar Poe (20 janvier 1809) offre l'occasion de réévaluer l'influence d'une des oeuvres les plus novatrices et les plus internationales de la littérature moderne. Poe fait en effet partie des auteurs qui, aux questions que se posait leur siècle, ont apporté des réponses à la fois si inattendues et si adaptées qu'elles ont modifié l'horizon culturel bien en-delà des frontières de leur propre langue-culture.

La conception du genre littéraire comme construction culturelle, que prend sa source dans les travaux de M. Bakhtine (cf. «Le discours dans la vie et le discours dans la poésie» in T. Todorov, M. Bakhtine, le principe dialogique, Seuil, Poétique, 1981, pp.124-132) se fonde sur les échanges inter-discursifs mais aussi les échanges interlinguistiques (un des auteurs étudiés par Bakhtine est Rabelais). Le décalage linguistique a pour vertu de sensibiliser aux régularités et aux différences des langues mais aussi à celles des textes, aussi bien dans la culture du traducteur que dans celle de l'écrivain traduit. Un auteur qui attire les traducteurs est donc aussi potentiellement un auteur qui donne envie d'écrire et de réfléchir sur les problématiques croisées de la langue et de la littérature.

Problématique Sur un domaine aussi vaste que celui de l'influence littéraire du plus connu des auteurs américains du XIXe siècle, des restrictions de champ s'imposaient. Nous avons d'abord choisi de nous cantonner au domaine français et francophone, considérant qu'il existait entre Poe et la France une relation privilégiée qui invite à considérer l'influence exercée par son oeuvre comme une sorte d'attraction-retour. Deux de ses plus célèbres nouvelles : Le double assassinat de la Rue Morgue et La lettre volée ne sont-elles pas situées à Paris, et leur héros, Dupin, l'enquêteur alter ego du narrateur, n'est-il pas français ? Nous avons également centré notre propos sur une relation transtextuelle particulière : celle de l'architextualité, définie par Genette (Introduction à l'architexte, Seuil, Poétique, 1979, p. 88) comme «la relation d'inclusion qui unit chaque texte aux divers types de discours auxquels il ressortit». En effet, les citations, allusions et emprunts à l'oeuvre ou à la légende personnelle de Poe sont trop nombreuses pour ne pas se diluer dans la diversité des projets et des styles. La relation intertextuelle qui met en correspondance deux oeuvres ou fragments d'oeuvres particuliers fonctionne souvent comme un embrayeur et/ou un indice d'attraction générique, elle ne la constitue pas tout entière. Quant à la relation hypertextuelle, définie comme la dérivation d'un texte à partir d'un autre par transformation simple ou indirecte (cf. Genette, Palimpsestes, Seuil, Poétique, 1979, p. 14) elle n'implique pas nécessairement l'adéquation architextuelle. Même dans le cas qui paraît le plus évident, celui de la continuation, comme Le sphinx des glaces, dans lequel J. Verne prolonge le récit des Aventures d'Arthur Gordon Pym, la conformité générique à l'hypotexte mérite d'être interrogée. Le thème du colloque sera donc limité aux productions où s'atteste la reprise globale des déterminations thématiques, modales, formelles, culturelles, configurées par Poe dans l'ensemble de son oeuvre, et qui sont particulièrement révélatrices du travail des genres, ces catégories pratiques qui orientent la création en faisant apparaître, sous la diversité des approches singulières des auteurs, une certaine communauté de pratiques. L'objectif sera de décrire la migration des formes génériques à travers les frontières linguistiques, culturelles, historiques, sémiotiques, depuis leur «étymon», les oeuvres de Poe que leur «fortune» a rendues à un moment ou un autre, modélisantes. Pour ménager une phase d'application et un prolongement vers la didactique de la littérature, un atelier d'écriture sera proposé aux participants pour tester quelques consignes d'écriture tirées des mécanismes architextuels abordés par les différentes communications. Pistes de travail : Si l'oeuvre de Poe a été et est encore ressentie comme profondément originale, c'est qu'elle est le produit d'une volonté manifeste de jouer avec les genres, de les mélanger (le poème dans la nouvelle), de les hybrider (la fiction et le reportage dans les mystifications), de les déplacer (vers la littérature depuis la presse, la chronique scientifique, l'essai philosophique), de les comparer (par la mise en équivalence du poème et de la nouvelle). Pour comprendre l'acclimatation de ces nouveautés dans la culture française et francophone, on pourra s'attacher aux vecteurs suivants : - la traduction : prérequise à la diffusion de l'oeuvre, elle a, dans le domaine français, suscité une telle émulation qu'elle a rapidement constitué sa propre histoire : celle des traductions et des traducteurs de Poe, et de ses problématiques, éclairant les théories générales de la traduction et contribuant à faire reconnaître la traduction comme genre à part entière ; - la transposition : corollaire de la traduction, qui change le code linguistique,elle confronte le rescripteur aux mécanismes de la restitution du sens dans le changement de medium. En raison de ses traits stylistiques et génériques (notamment, mais pas seulement, l'utilisation des registres fantastique et symbolique) l'oeuvre de Poe se prête aux transpositions dans l'image fixe ou en mouvement, à la théâtralisation, à la mise en musique. Les genres éclos au XXe et XXIe siècle : bande dessinée, jeux vidéos, productions plurimédias, ont largement assuré sa diffusion, souvent auprès de spectateurs qui n'étaient pas son public d'origine ; - la prose : catégorie hypergénérique qui regroupe commodément les genres créés ou lancés par Poe dans le domaine du récit, bref ou long, et caractérisés par une tendance au déguisement scénographique (par exemple de la nouvelle en dialogue philosophique, Colloque entre Monos et Una) et à l'hybridation des registres (par exemple grotesque et scientifique, Petite discussion avec une momie). Ces textes ont suscité dans le domaine français de nombreuses vocations, certaines évidentes mais épisodiques comme chez J. Verne, d'autres moins repérables mais plus constantes, comme chez les humoristes de presse à la fin du XIXe siècle ; - la poésie : noyau de l'oeuvre, son influence sur les poètes français est loin de se limiter à la filiation bien connue Baudelaire, Mallarmé, Valéry et dépasse largement le milieu du XXe siècle; - le discours critique : La genèse du poème a fait l'objet de réappropriations régulières par les générations littéraires qui se sont succédées depuis deux siècles. Le ou les modèles herméneutiques proposés par Poe ont été repris et généralisés dans le champ de la littérature (critique avec Barthes) mais aussi dans celui, connexe, des sciences humaines (psychanalyse avec Lacan).