Essai
Nouvelle parution
Ph. Dagen, Primitivisme II. Une guerre moderne

Ph. Dagen, Primitivisme II. Une guerre moderne

Publié le par Université de Lausanne

Philippe Dagen

Primitivismes II. Une guerre moderne

Hors série Connaissance, Gallimard

Parution : 04-02-2021

464 p. — ISBN : 9782072906657.

 

Extrait de l'introduction :

Dans la suite de Primitivismes. Une invention moderne, ce deuxième volume continue l’analyse des manifestations artistiques qui s’arment du primitif contre la société moderne, processus que l’histoire a pris l’habitude de nommer primitivisme. Il la reprend au moment où elle avait été suspendue, le début de la décennie 1910, et la pousse jusqu’à l’immédiat après-Seconde Guerre mondiale. La géographie est, comme précédemment, double : celle des mouvements artistiques et intellectuels, européens principalement, d’une part ; celle, d’autre part, des cultures africaines, amérindiennes, eurasiatiques et océaniennes, anciennes et contemporaines, qui sont les agents et les enjeux des primitivismes. Dans cette période, cette géographie et l’histoire qui lui est liée sont en expansion continue. Cette expansion est l’un des facteurs essentiels de cette étude.

Celle-ci suit la méthode qui a été définie et appliquée dans le premier volume. Elle peut être rappelée brièvement. Elle postule que l’histoire des primitivismes ne peut se faire qu’en réunissant des données de trois ordres. Il y a celles que l’on peut dire sommairement culturelles et qui relèvent de la connaissance et de la compréhension des comportements et créations considérés comme primitifs, lesquels ne se réduisent pas aux peuples dits « sauvages » ou « arriérés », mais incluent les enfants, les fous, les préhistoriques et les rustiques : les éléments d’une historiographie de la notion de primitif dans la seconde moitié du xixe siècle à laquelle contribuent simulta- nément anthropologie, ethnographie, archéologie, psychiatrie et psychanalyse. Il y a des données idéologiques d’une critique des sociétés capitalistes qui se développent grâce aux révolu- tions scientifiques et industrielles dans la même période : les éléments d’une histoire des idées politiques et sociales qui est étudiée en se fondant principalement sur les écrivains contemporains. Et il y a les données artistiques : les œuvres plastiques, considérées en elles-mêmes – dans leurs formes et leurs matérialités –, dans leurs relations avec le primitif et dans leurs rapports avec la critique politique.

La conviction première est que la compréhension des artistes et des œuvres ne saurait se passer de tout ce qui les environne au moment de leur apparition, des connaissances et des convictions qui les animent. En matière de primitivismes, cela signifie qu’il est exclu de s’en tenir à la définition du primitif par le « tri- bal » – en reprenant ce terme impropre du sous-titre de l’ex- position Primitivism qui eut lieu en 1984 à New York –, mais qu’il faut y intégrer les aliénés ou les hommes de « l’âge de la pierre taillée » puisqu’ils sont aussi des primitifs. Cela fait aussi un devoir de ne pas s’en tenir aux relevés – hypothétiques sou- vent – de ressemblances visuelles entre des œuvres primitives et des modernes, mais qu’il importe de prendre en considéra- tion ce que peintres et sculpteurs ont pensé et écrit, en écho à ce que pensent et écrivent leurs contemporains poètes et romanciers, qui sont, parfois, leurs proches. […]

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