Édition
Nouvelle parution
Paul Valéry, Cahier 3-1943

Paul Valéry, Cahier 3-1943

Publié le par Alexandre Gefen (Source : Marie Joqueviel-Bourjea)

Les Editions Fata Morgana (Montpellier) viennent de publier un Cahier inédit de Paul Valéry (Cahier 3, 1943) dans une édition présentée et annotée par Serge et Marie Bourjea. Cette transcription intégrale respecte l'économie de l'écriture valéryenne, disposée en fragments, selon le régime caractéristique de la double page. Elle donne, pour la première fois, l'idée (l'image) de ce qu'est un « cahier » valéryen, et en montre le fonctionnement en une période particulièrement troublée de l'Histoire.
[Ed. Fata Morgana, Montpellier, février 2006, 172 pages, suivies de la reproduction en fac simile de deux doubles pages.]

En 1943, dans le tragique du temps, Valéry ouvre un nouveau cahier sous la seule autorité d'une date tracée d'une main nerveuse : « 6.XI.43 ». On y retrouvera le kaléidoscope des éléments qui y trouvent lieu depuis l'origine ou presque : « la grande découverte 1892 », le « que peut un homme ? », la question phénoménologique de l'« attention », celle des analogies avec les données scientifiques, le souvenir de Mallarmé…

La lecture se repèrera aux plis d'une écriture, comme à l'habitude accentuée dans ses marges : « Ego », « Fiducia », « Implexe », Mémoire, Histoire, Méthode, Corps, et la cohorte des signes grecs : θ, π, ϕ, ψ… Mais ce sont les circonstances, notées par quelques fragments d'« éphémérides » (la générale du Soulier de Satin, tel film de Chaplin, tels dîner ou rencontre…), qui teintent l'écriture de tons sombres, révélant – en quelque sorte dans le filigrane – l'angoisse profonde et les tensions, psychologiques comme politiques, qui sous-tendent à présent l'écriture. Un thème, de plus, insiste à même la chair des mots : celui de la mort.

L'écriture du cahier est plus que jamais au plus vif de l'être, illustration profonde de ce que Valéry écrit au Révérend Père Rideau, en cette même année 1943 : « Vivre me paraît être une suite d'approximations ou d'adaptations, une série dont la convergence est toujours douteuse ».