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Nouvelles Vues no 18 :

Nouvelles Vues no 18 : "Cinéma, roman, espace"

Publié le par Marc Escola (Source : Thomas Carrier-Lafleur)

Référence bibliographique : Nouvelles Vues no 18 : "Cinéma, roman, espace", , 2015.

 

 

Numéro 18 (printemps-été 2016) – Cinéma, roman, espace
Sous la direction de David Bélanger (UQÀM) et Thomas Carrier-Lafleur (Université de Montréal)

Pierre Nepveu parlait du « complexe de Kalamazoo » en littérature québécoise, provoquant le « sentiment profond du rien ou du nulle part » face aux petites villes : « ce sentiment est en même temps un cliché qui s’ignore ou qui veut s’ignorer, comme si cette dramatisation d’un néant imminent pouvait définir une personnalité singulière. » (1998, p. 269) La petite ville québécoise, à cet égard, paraît difficilement représentable, ajoute Nepveu,

 


tant la double polarité Montréal-Québec y est contraignante aussi bien sur le plan institutionnel que sur le plan symbolique. En dehors de ces deux pôles, la mémoire des villages y occupe plus de place que le présent des petites villes : Batiscan existe davantage que Trois-Rivières, Kamouraska ou Saint-Jean-de-Dieu plus que Trois-Pistoles, Rivière-du-Loup ou Rimouski (p. 270).

De même, comme l’écrivait Daniel Laforest, c’est souvent à l’état de reste que se pensent les espaces extra-urbains : « Dans la mesure où la floraison hyperbolique des études ayant pour objet l’urbanité occupe aujourd’hui le haut du pavé, il s’avère donc tout aussi passionnant que problématique d’interroger ce qu’elles laissent de côté. » (2007, p. 338) Cette problématique des limites de l’espace habitable et représentable acquiert en études littéraires une importance relative, un peu opportuniste, un peu nécessaire face à des productions de plus en plus « dé-montréalisées » : on parle de néo-terroir (Liberté, no 295), de banlieue (Laforest, 2010 et 2013 ; Parent, 2012) ou de régionalité (Langevin, 2013).

     Or, c’est sans doute dans les longs métrages de fiction québécois que le phénomène de dé-montréalisation se fait le plus insistant depuis le milieu des années 2000. Toutes proportions gardées, il est vrai que la production cinématographique, après une intense période d’urbanité, redécouvre les différentes régions du lointain, de l’ailleurs et du non-familier. Ainsi les fictions cinématographiques et romanesques contemporaines ne cessent de se rencontrer au seuil de l’espace, là où se reflètent nos pulsions, nos craintes et la mise à l’épreuve de nos valeurs. Pour le roman et pour le cinéma, arpenter les limites de la représentation de l’espace pour mieux les dépasser, c’est également l’occasion d’expérimenter leurs propres seuils.


                                                                *


C’est à ce double investissement de la problématique de l’espace que s’intéresse le présent dossier. Comment la littérature aussi bien que le cinéma parlent-ils de la non-urbanité, comment se détourne-t-elle du lieu commun, au sens littéral, pour explorer les rues de Grand-Mère ou de Péribonka, les campagnes dures et désertes et les bars de village ? Est-ce dans un rapport constant de distinction, un pas de côté culturel, une résistance à une hégémonie représentationnelle ? Est-ce plutôt une esthétique, une recherche de nouvelles formes de vie, de nouvelles fictions ?

     En privilégiant les démarches sachant rapprocher ou distinguer les pratiques de ces deux arts, ce dossier ouvre volontiers la porte aux réflexions et aux questions de différentes natures. Certes, en première instance, on se demandera comment représente-t-on ces espaces étrangers : est-ce comme un ailleurs, un ici véritable ? Est-ce un lieu hors de la culture ou visité par une culture propre, délivrée des enjeux de la mondialisation ? Et comment se raconte-t-il, ce lointain ? Quelles marges — sociales, affectives, esthétiques — les fictions contemporaines semblent-elles s’être donné pour but de découvrir ? Après, il est possible de penser l’émergence, dans une démarche transhistorique, de ce phénomène représentationnel, aussi bien que de penser les conditions de son émergence. À cet égard, les approches géocritiques, sociocritiques, poétiques ou philosophiques sont bienvenues. Enfin, il est possible de penser le rapport de ces régions dans leurs enjeux propres : à l’histoire, aux intertextes et aux anciennes représentations du régional, au réalisme, aux représentations urbaines.

     Les propositions, d’un maximum de 500 mots, devront circonscrire un corpus contemporain et savoir mettre de l’avant une hypothèse de travail suivant l’un des angles mentionnés. Elles devront parvenir à l’adresse suivante : jean-pierre.sirois-trahan@lit.ulaval.ca au plus tard le 15 août 2015. Les articles retenus devront être rédigés en français ou en anglais, comporter entre 25 000 et 45 000 caractères, espaces comprises, et être livrés au plus tard le 1er décembre 2015. Les articles seront ensuite évalués et commentés anonymement par deux membres compétents d’un comité de lecture ad hoc. Veuillez inclure une brève notice biographique de 150 mots avec votre proposition d’article.

     Pour une bibliographie et une filmographie sur le sujet, voir ici.