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cet article paru dans vousnousils, l'e-mag de l'éducation, en date du 02.05.2012
Contrôle continu intégral à Strasbourg : "non, la Licence ne sera pas bradée !"
L'université de Strasbourg (UdS) a voté, le 17 avril, le passage au contrôle continu intégral en Licence. Une décision qui signifie la fin des sessions d'examens à partir de la rentrée prochaine pour les composantes volontaires et pour toutes en 2013. Une aubaine pour les étudiants ? Entretien avec Frédérique Granet, vice-présidente en charge de la formation à l'UdS.
Pour quelles raisons l'UdS a-t-elle voté l'instauration du contrôle continu intégral pour les trois années de Licence ?
Les réflexions ont duré deux ans. Dès 2010, nous avons réfléchi aux pistes d'amélioration pour le contrat quinquennal 2013–2017. Lorsqu'on prépare le calendrier universitaire, dans le système actuel nous sommes contraints de réserver les semaines nécessaires à la tenue de deux sessions d'examens par semestre, pour dégager ensuite les semaines consacrées aux enseignements. C'est le monde à l'envers ! Nous constatons aussi trop d'abandons d'étudiants, notamment en première année, au retour des congés de la Toussaint, avant la première session d'examens. En passant au contrôle continu intégral, le rythme de travail est plus équilibré, la formation améliorée, le soutien à la réussite renforcé et la qualité de vie supérieure.
Quelles sont les disciplines concernées ?
A partir de 2013, le contrôle continu intégral sera la règle pour toutes les Licences. Et sur les 38 UFR (Unités de formation et de recherche) que compte l'UdS, une dizaine souhaite expérimenter le système dès septembre prochain. C'est le cas en lettres, philosophie, langues, physique, sciences de la vie, STAPS et de l'Ecole et observatoire des sciences de la Terre (EOST). La faculté de chimie y songe également.
Y a-t-il eu des réticences et si oui lesquelles ?
Certaines composantes ont émis des doutes au départ. Tout changement important inquiète. Mais globalement, une fois que l'on a expliqué le système, c'est assez bien passé. Le conseil d'administration avait voté toutes les maquettes à l'unanimité en juillet 2011. Aujourd'hui, le climat est plutôt apaisé et les étudiants semblent assez satisfaits.
Il s'agit donc de la fin de tous les partiels et, de fait, des rattrapages : comment les étudiants vont-ils être évalués ?
Il y aura des incidences sur la formation et la pédagogie. Le règlement d'examens prévoit au moins 3 notes dans chaque unité d'enseignement (UE), sachant qu'aucune note ne peut compter pour plus de 50% dans la moyenne. Ces évaluations devront répondre à des modalités diversifiées. Il est aussi obligatoire de restituer la première évaluation corrigée avant de donner la suivante. L'université d'Avignon applique déjà ce mode d'examens depuis trois ans et le taux d'abandon des étudiants a fortement diminué (de 35% en 2008–2009 à 24% cette année).
Pourquoi limiter ce mode d'évaluation aux étudiants en Licence ?
A Strasbourg, en Master, on laisse le choix aux UFR, soit d'appliquer le contrôle continu intégral soit de préserver un système « classique » (écrits, mémoire, grand oral...). Depuis le début de la réforme LMD, la réglementation est beaucoup plus souple en Master.
Comment ne pas risquer de créer une licence « bradée » ou, à l'inverse, sélective avec l'apparition de notes éliminatoires ?
Les notes éliminatoires sont prohibées depuis l'arrêté licence de 2011. Avec 3 notes au minimum par UE, nous voulons mettre fin aux notes couperets où tout se joue sur une épreuve. Au fond, si un bon étudiant est dans un mauvais jour lors d'un examen, il peut rater son semestre et le système actuel peut ne pas révéler le niveau réel d'un étudiant. Quant à une Licence « bradée », ce ne sera pas le cas ! Des mécanismes pallient ce risque. Les coefficients des UE viennent garantir des équilibres. L'arrêté licence de 2002 prévoyait une palette de coefficients de 1 à 3, contre 1 à 5 avec le nouvel arrêté qui entrera en vigueur sur ce point en septembre.
Les enseignants-chercheurs auront-ils plus de copies à corriger ?
Les étudiants qui avaient raté la session 1, n'allaient pas forcément en session 2. Nous corrigerons donc plus de copies, mais pas beaucoup plus. Car si l'étudiant est mieux suivi toute l'année, une copie devrait être meilleure et il sera donc plus facile et rapide de la corriger. Et en termes de méthodologie, l'étudiant comprendra plus vite ce qu'on lui demande. Au fil des évaluations répétées, les étudiants vont mieux combler leurs lacunes. Le caractère formatif des évaluations a pour objectif de mieux former les étudiants et de favoriser la réussite.
La durée des semestres sera-t-elle raccourcie du fait de l'absence d'examens finaux ?
Nous veillons à ce que l'année dure 10 mois calendaires, ce qui importe pour les boursiers. Par contre, l'organisation va changer. Actuellement, il y a 12 à 13 semaines de cours selon les UFR et 2 à 3 semaines d'examens par semestre en session 1. Dans le futur, on aura toujours 16 semaines pour planifier enseignements et évaluations. Cela va fluidifier les séquences, sachant qu'il y aura des adaptations pour les étudiants salariés.
Charles Centofanti