Questions de société

"Mouvement universitaire : Le Figaro, quotidien contestataire de la contestation", par O. Poche (Acrimed 01/06/09).

Publié le par Bérenger Boulay

Mouvement universitaire : Le Figaro, quotidien contestataire de la contestation, par Olivier Poche

Acrimed 01 juin 2009.

http://www.acrimed.org/article3150.html

La trajectoire de la couverture du mouvement universitaire par Le Figaropeut se résumer ainsi : après avoir tenté d'informer, malgré tout, surla mobilisation pendant la phase ascendante du conflit, le quotidien,qui considère depuis le début que cela commence à bien faire, décideque le moment est venu de le dire. Suivant une feuille de route quiressemble étrangement à celle du ministère – dont les déclarations sonttoujours scrupuleusement relayées –, il traque les dernières poches derésistances, dénonce les contestataires à la vindicte publique, ets'efforce de délégitimer le mouvement par sa caricature. Une presseengagée, certes, mais qui ne s'embarrasse guère, si nécessaire, desrègles élémentaires de l'information.

Un quotidien gouvernemental

Depuis le début du mouvement, amorcé dans les premiers jours de janvier2009, Le Figaro a interviewé Valérie Pécresse, ministre del'Enseignement Supérieur et de la Recherche, à cinq reprises, soit enmoyenne plus d'une fois par mois : le 31 janvier et le 19 mai dans desinterviews « ordinaires » ; le 22 janvier (le jour où se réunit lapremière Coordination Nationale des Universités) et le 21 avril dans lecadre du « Talk Orange-Le Figaro » ; et le 27 avril dans « Le GrandJury-RTL-LCI-Le Figaro ». Certes, ce n'est pas la seule personnalitéqui ait répondu à une interview du Figaro sur ce dossier, puisque LucFerry, ancien ministre UMP, est l'invité du « Talk » le 13 mars… etDaniel Fasquelle, député UMP, répond aux questions du Figaro sur saproposition de loi le 8 février. C'est tout pour les « politiques »…

Maisles « universitaires » ne sont pas oubliés, puisque le 6 février, LeFigaro interroge Jean-Charles Pomerol, le président de l'université deParis-VI (Jussieu), qui « analyse la crise actuelle dans l'université». Le diagnostic figure en titre : il s'agit d'un mouvement « sansperspective rationnelle ». [1]

Tous les points de vuegouvernementaux, et eux presqu'exclusivement, peuvent ainsi s'exprimerdans les pages d'information. Quant aux « tribunes », elles sont loind'être aussi nombreuses que dans Le Monde, et plus rarement favorablesau mouvement. Mais Le Monde plaçait la barre assez haut.

Si l'onajoute que près d'un article consacré au mouvement sur six (sur unesoixantaine) est, d'après son titre, « anglé » sur une annonce, unedéclaration ou un « geste » de Valérie Pécresse, le constat s'imposesans surprise : Le Figaro assure la communication ministérielle sansétats d'âme. Quotidien de parti-pris, Le Figaro prend parti : on nesaurait lui en contester le droit.

En revanche, l'informationsur la mobilisation, ses motifs et sa dynamique est taillée sur mesureau bénéfice de la défense de ce parti-pris. D'abord plus ou moinsdiscrètement, puis, au fil des semaines, de plus en plus ouvertement.Au point que les « informations » se transforment peu à peu en uneinstruction à charge, partiale et virulente, qui démarque de façoncaricaturale, et parfois presque indécente, la stratégiegouvernementale. Mais pas immédiatement…

Lire la suite: