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"Misère de l’humanité numérique, La pensée de Jaron Lanier", par Th. Le Texier (laviedesidees)

Publié le par Marc Escola

"Misère de l’humanité numérique, La pensée de Jaron Lanier", par Th. Le Texier (laviedesidees)

La compréhension du monde et sa transformation peuvent-elles se réduire à de simples questions de programmation ? Alors que vient de paraître son deuxième ouvrage, Who Owns the Future ?, il n’est pas inutile de discuter les intuitions du geek humaniste Jaron Lanier qui dénonce la standardisation des consciences et la démonétisation croissante de l’économie.

(sur le site laviedesidees, 29/10/13)

Deux milliards de personnes sont aujourd’hui connectées à internet. D’ici quelques années, la majeure partie de l’humanité vivra enveloppée dans un flux constant d’informations. Les différents éléments de notre quotidien sont en train de devenir smart (les voitures, les frigos, les compteurs électriques, les lunettes, les montres, etc.), et nos organes ne tarderont pas à être eux aussi branchés uns à uns sur le réseau global.

Ce monde numérique, où nous construisons une part croissante de notre existence, est façonné par à peine plus d’un millier de scientifiques et d’ingénieurs en informatique, dont la plupart œuvrent dans la Silicon Valley. Ils sont à l’origine, entre autres, du langage HTML, de l’ordinateur personnel, du iPhone, des principaux logiciels que nous utilisons chaque jour et des sites internet les plus visités au monde.

Depuis trente-cinq ans, Jaron Lanier est l’un d’entre eux, même s’il ne leur ressemble pas. D’un côté, il est le père du concept de « réalité virtuelle », il a été le colocataire du fondateur du mouvement pour le logiciel libre, Richard Stallman, et il est membre du très influent Global Business Network. D’un autre côté, il n’est partisan ni de l’open source, ni de la gratuité de l’information, ni du web 2.0 ; il n’est pas en admiration devant les progrès de l’intelligence artificielle ; il ne lit pas avidement boingboing.net ou le magazine Wired (bien qu’il lui arrive d’écrire dans le second) ; et surtout, il exècre la doxa qui anime cette petite communauté et qui est en train de devenir, à ses yeux, le sens commun des sociétés numériques.

Cette idéologie repose tout entière sur un axiome : la vie est un système d’information. Selon cette perspective, une galaxie, l’océan, un être humain, une pensée ou une émotions sont des assemblages d’informations, des sortes de bases de données qu’un algorithme doit pouvoir rendre intelligibles et manipulables. Par un étrange retournement, en même temps que les ingénieurs qu’égratigne Lanier réduisent les individus à un rôle d’émetteurs d’informations et de calculateurs, ils font des informations de véritables personnes douées de vie et de conscience. La liberté dont ils parlent sans cesse s’applique à ces informations, et non aux individus dont elles maillent les existences. Tel est le cœur de la critique que Lanier adresse à la Silicon Valley.

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