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Michel Houellebecq, athéisme et foi

Michel Houellebecq, athéisme et foi

Publié le par Marc Escola (Source : Caroline Julliot)

« Michel Houellebecq, athéisme et foi »

 

Première Journée d’études interdisciplinaire du cycle « Michel Houellebecq ou misère de l’homme sans Dieu ? », organisé par l’IPRA (Institut du Pluralisme religieux et de l’athéisme), avec le soutien du laboratoire  3LAM (Université du Maine-Le Mans), le 14 Octobre 2015.

 

L’œuvre de Michel Houellebecq est surtout connue pour décrire avec une déprimante acuité les rapports économiques et sociaux, et, plus généralement, le quotidien du mâle moderne ; on a moins souvent souligné son rapport au religieux, dont le polémique Soumission (2015) démontre avec éclat la place centrale, mais jusqu’ici en grande partie souterraine. C’est ce rapport au religieux, en particulier dans ses implications politiques que nous souhaitons interroger ici.

 Il est vrai que l’auteur des Particules élémentaires a multiplié les déclarations de mépris vis-à-vis des monothéismes, et affirmé l’inexistence de Dieu comme « l’une des seules certitudes qui ne [l’ait] jamais quitté » (Ennemis publics, p. 47) ; mais il est tout aussi vrai que son intérêt pour les religions, qu’il reconnaît facilement par ailleurs, est patent, et ne peut se limiter à un simple attrait ethnologique ou culturel. L’évidence de l’athéisme semble en effet coïncider chez lui avec le constat d’un désarroi de l’individu moderne face à une totale perte de repères aussi bien sociaux que moraux. Dieu n’existe pas, certes ; tout est permis, d’accord ; mais que faire de cette liberté si l’on est incapable de se créer soi-même de nouvelles valeurs positives, un nouveau sens à la vie ?  « Il n’y a pas de solution dans mes romans », déclare Houellebecq dans une interview à la sortie de La Possibilité d’une île.  C’est un véritable épuisement métaphysique qui ne dit pas son nom que recouvre le cynisme de ses personnages ; mais sans pour autant qu’on puisse véritablement espérer que la foi religieuse nous en sauve, comme elle pouvait le faire dans les siècles qui nous ont précédés.

Les romans d’un Michel Houellebecq à la fois « cynique et mystique » comme le propose Bruno Viard dans l’un des articles fondateurs sur la question (Unité de Michel Houellebecq, 2014) nous semblent explorer une voie inédite, qui ne peut se réduire ni à l’athéisme triomphant d’un Nietzsche, ni à l’indifférence, ni à une nostalgie de l’ère religieuse. Le monde décrit par Houellebecq prend acte de la mort de Dieu (ou de son inexistence), et décline par le menu toutes les conséquences de la perte de la foi : disparition de sens dans les relations humaines, et en particulier, incapacité à aimer, disparition de sens dans la sphère politique, hantise de la mort que toute l’énergie vitale concentrée dans les relations sexuelles ne fait que raviver, etc.  Mais la question qui se pose est alors celle d’un salut possible – hors du religieux, ou dans une nouvelle forme de spiritualité ?

L’objectif de la journée d’études « Michel Houellebecq, athéisme et foi » (Octobre 2015), serait ainsi de réévaluer l’ensemble de l’œuvre de Michel Houellebecq, jusque dans ses aspects les plus cyniques et provocateurs (rapport à la sexualité, désinvestissement du politique, darwinisme social), sous l’angle de l’inquiétude métaphysique. Elle permettrait en particulier de se pencher sur les rapports au matérialisme, au scientisme de Comte, et au Nietzschéisme. Elle pose également la question, devenue centrale dans ses deux derniers romans, de la conversion : si, comme l’auteur l’a déclaré à l’occasion de la parution de Soumission, « l’athéisme est mort »,  (L’obs, 8 Janvier 2015), comment interpréter le retour au religieux dont il rend compte à sa manière dans ses derniers romans, et dans lequel il s’inclut également fictivement, puisque La Carte et le Territoire faisait état de sa conversion secrète au christianisme ? « changement de paradigme », comme il le prétend dans son dernier roman, ou repli pur et simple dans un cadre rassurant mais illusoire ? Peut-il véritablement être question de foi dans le confort retrouvé au sein d’un cadre métaphysiquement, socialement et politiquement rassurant – ou bien la conversion n’est-elle que l’ultime constat d’échec, la suprême soumission de l’individu post-soixante-huitard à un ordre passé dont il saisit parfaitement les limites et l’aliénation, mais qu’il est incapable de dépasser ? 

Plus largement, cette journée vise à interroger les enjeux et les modalités d’une tendance prégnante de nos sociétés actuelles : le retour, réel ou fantasmé, de la foi en général, et du théologico-politique en particulier. Questionnement que pourraient éclairer aussi bien des spécialistes de littérature que de philosophie, de sociologie ou d’histoire des religions.

 

Les propositions, d’une longueur de 1500 signes environ, sont à envoyer accompagnées d’un court CV de l’auteur, au plus tard le 30 Juillet 2015, aux adresses suivantes :

 caroline.julliot@univ-lemans.fr ou sylvie.servoise@univ-lemans.fr

 

Cette première JE sera suivie en Juin 2016 d’un second volet, intitulé « Houellebecq, christianisme, Islam, et cetera », et centré sur les rapports particuliers de l’auteur à chaque religion ou croyance (appel à communication à venir sur Fabula).