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Mettre un cap vers un lecteur : l'utopie d'une

Mettre un cap vers un lecteur : l'utopie d'une "Terre-Coeur" en littérature

Publié le par Alexandre Gefen (Source : Frédérik Detue)

Appel à contribution
Date limite : 31 janvier 2007

Mettre le cap vers un lecteur :
l'utopie d'une « Terre-Coeur » en littérature

Colloque en Littératures française et comparée

Organisé par le Laboratoire « Textes, langages, imaginaires » de l'université de Nantes

Université de Nantes, 26-27 avril 2007

Présentation du projet

Il s'agira, au cours de ces journées, de revisiter collectivement des histoires littéraires aussi diverses que possible, de l'Antiquité à nos jours, sous l'angle des relations que visent à entretenir, au sein des oeuvres mêmes, les écrivains, poètes oraux et dramaturges avec les lecteurs, auditeurs et spectateurs : d'évaluer, suivant les époques, les cultures, les formes (les genres), les auteurs, dans quelle mesure la référence au récepteur peut se révéler fructueuse pour la connaissance d'oeuvres d'art.
Sans doute peut-on reconnaître, avec Walter Benjamin, que l'essentiel d'une oeuvre de littérature « n'est pas communication, n'est pas message », mais il reste, comme l'affirme Paul Celan, que « [le texte littéraire] peut, puisqu'il est un mode d'apparition du langage et, comme tel, dialogique par essence, être une bouteille à la mer, mise à l'eau dans la croyance – pas toujours forte d'espérances, certes – qu'elle pourrait être en quelque lieu et quelque temps entraînée vers une terre, Terre-Coeur peut-être ».
C'est ainsi la façon dont des oeuvres (essais, romans, poèmes, autobiographies, pièces de théâtre…) mettent un cap vers un possible destinataire qui retiendra notre attention dans ce colloque. Sociologie et esthétique de la réception pourront être convoquées, mais de façon à analyser l'interaction entre auteur et récepteur telle qu'elle s'élabore dans une oeuvre. L'enjeu principal sera en effet de considérer comment des oeuvres peuvent se construire et se configurer en fonction de stratégies conçues par leurs auteurs pour s'adresser à des récepteurs ; et une question centrale consistera alors à se demander en quoi les inventions techniques dans ce but procèdent d'une utopie sociale, en quoi l'invention d'une relation entre auteur et lecteur dans une oeuvre peut constituer un modèle d'être-ensemble.

On sait qu'il existe trois chaînons dans toute situation de communication. Cependant, il s'agira d'hiérarchiser le questionnement en fonction de la focalisation que nous proposons sur le récepteur : c'est la question de savoir quelle est la Terre-Coeur qu'un auteur fantasme qui est première, et qui conditionne les autres questions (sur l'auteur, sur la bouteille à la mer). Voici alors des pistes d'approche possibles :

1) Qui est le lecteur ami (la Terre-Coeur) ?
- Quel portrait l'oeuvre construit-elle de ce lecteur ami ? (Est-il singulier, pluriel, individuel, collectif, divers ? Est-il un homme, une femme, un animal, un extraterrestre ? Est-il un même, un autre, un double ? Est-il un vivant, un mort, un absent ?...)
- Comment ce lecteur ami est-il présent dans l'oeuvre ? (Est-il un personnage, un masque, une ombre, une voix, une oreille ? Est-il diffracté ? Est-il interpellé, appelé à s'identifier, à se recomposer ? Est-il reconnaissable ? A-t-il un rôle à jouer en compagnie – voire à la place – de l'auteur ?...)
- Comment l'oeuvre le sélectionne-t-elle ? (L'oeuvre construit-elle, par opposition, le portrait d'un lecteur ennemi, et contraint-elle le lecteur à prendre un parti amical ou inamical ? Opère-t-elle un partage moins manichéen ?...)
- Comment l'oeuvre cherche-t-elle à le toucher ? (Vise-t-elle ses sens, son désir, ses passions, sa conscience, son intelligence, son inconscient ?...)

2) En quoi l'identité du lecteur ami détermine-t-elle la construction de l'oeuvre ?
- de son identité (générique, par exemple) ?
- d'un sens ? (Y a-t-il un jeu sur l'accessibilité du sens ? Est-il ambigu, hermétique, crypté, limpide, disséminé, différé ?...)
- d'un style ?
- d'images, de figures, de tropes, de discours ?
- d'une langue commune ?

3) En quoi l'identité du lecteur ami détermine-t-elle la construction de l'auteur ?
L'écrivain « n'a pas d'identité, il est constamment à la place d'un autre corps et en train de le remplir » (John Keats) ; la question, dès lors, est de savoir dans quelle mesure l'auteur remplit ce corps de papier en fonction du lecteur qu'il vise, dans quelle mesure l'identité du lecteur ami détermine la construction d'une identité de l'auteur.
- Quel autoportrait de l'auteur l'oeuvre construit-elle ? (On envisagera toutes les postures et impostures des auteurs, en prêtant attention spécialement à celles qui concernent leur relation aux autres.)
- Comment l'auteur est-il présent dans l'oeuvre ? (L'auteur se dévoile-t-il ou se dérobe-t-il ? Multiplie-t-il les masques ou les postulations de lui-même ? Donne-t-il à lire sa pratique littéraire par un métalangage ?...)


Les propositions de communication porteront sur des oeuvres littéraires précises ; tout en dégageant leur spécificité, on pourra les situer dans une actualité (historique, épistémique, culturelle), dont on évaluera alors la pertinence pour traiter de la problématique choisie, ou, au contraire, les inscrire dans un paradigme inactuel (transhistorique, cosmopolite).

Frédérik Detue (université de Paris 8), Maëlle Levacher (université de Nantes)



Les propositions de communication (350 mots au maximum) seront examinées par un comité scientifique présidé par Pierre Masson, professeur à l'Université de Nantes, et doivent être envoyées avant le 31 janvier 2007 à :
Frédérik Detue (frederikdetue@yahoo.fr) et Maëlle Levacher (maellelevacher@aol.com)