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Nouvelle parution
M. Tinayre, Notes d'une voyageuse en Turquie

M. Tinayre, Notes d'une voyageuse en Turquie

Publié le par Marc Escola

Notes d'une voyageuse en Turquie
Marcelle Tinayre

Alain Quella-Villéger (Préfacier)

DATE DE PARUTION : 16/04/14 EDITEUR : Turquoise (Editions) COLLECTION : Altérités ISBN : 978-2-918823-04-9 EAN : 9782918823049 PRÉSENTATION : Broché NB. DE PAGES : 256 p.

1909, Constantinople. L'Empire ottoman est en crise, deux camps s'opposent : les révolutionnaires jeunes-turcs progressistes ; les islamistes contre-révolutionnaires. Marcelle Tinayre devient alors le témoin privilégié de ces affrontements. Ces violents bouleversements, au terme desquels le sultan Abdülhamit II sera déposé, permettent également à l'auteure de tracer le portrait d'une société en mutation.

La romancière entre dans les harems, assiste à des mariages, visite des hôpitaux, des écoles. Ce qu'elle découvre devient la matière sensible de ses écrits. Marcelle Tinayre excelle dans la représentation imagée, où tous ses sens sont en éveil, avec une simplicité et un naturel qui lui sont propres. Grâce à cette proximité et à cette empathie offerte, confiantes, les femmes turques lèvent le voile sur leur quotidien d'épouse, de mère ou de fille.

Certaines lui confient même leurs espérances, comme si la révolution n'était pas qu'une chimère, que la chute du sultan ouvrait une nouvelle ère d'émancipation.

 

Marcelle Tinayre naît à Tulle le 8 octobre 1870. Elle connaît son heure de gloire à la Belle Epoque avec des romans féministes, se mêle alors aux milieux littéraires, artistiques et scientifiques en vue, où elle rencontre nombre de personnalités de l'époque. Marcelle Tinayre, cofondatrice du prix Fémina, devient célèbre. En 1908, elle refuse la Légion d'honneur prétextant qu'une féministe comme elle ne porterait pas une décoration aussi militaire, décoration qui la ferait passer pour une cantinière de la guerre de 1870.
Ce refus entraîne une cabale à son encontre et une campagne de dénigrement misogyne. Marcelle Tinayre préfère s'éloigner, et décide de partir pour la Turquie alors en pleine révolution jeune-turque. Elle en revient avec ces Notes d'une voyageuse en Turquie où elle décrit la situation des femmes turques. Elle meurt le 23 août 1948 à Grosrouvre (Yvelines).

 

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Dans Libération du 27 juillet 2104, on pouvait lire cet entretien du préfacier avec M. Semo:

Alain Quella-Villéger: «Deux féministes avant l’heure»


Agrégé d’histoire et spécialiste de Pierre Loti, Alain Quella-Villéger a publié les Evadées du harem (André Versaille éditeur) et préfacé Notes d’une voyageuse en Turquie de Marcelle Tinayre (éditions Turquoise) sur les femmes turques en 1909.

Pourquoi vous êtes-vous intéressé à l’histoire racontée par Pierre Loti ?

Perçu comme un roman orientalisant, les Désenchantées de Loti est un livre politique, celui de la transition entre l’empire et la révolution «jeune turque» de 1908. Elle n’a pas encore commencé lorsqu’il écrit son roman, mais ses idées sont déjà là et les femmes y voient un grand espoir de changement de leur condition. Le travail sur la gestation de l’œuvre m’a amené à me plonger dans la société ottomane de l’époque et sur ce fait divers révélateur qui a nourri le roman. La fuite des deux filles de Nouri Bey, ami du sultan, est devenue une affaire d’Etat que le régime a essayé, sans succès, d’étouffer par la censure.

L’enfermement dans le harem était-il encore une réalité ?

Oui, mais sauf pour le sultan, le harem - pour la minorité de la population qui en avait les moyens - se limitait en général à une ou deux femmes avec des codes et des modes de vie très bourgeois, comme le raconte la romancière Marcelle Tinayre dans ses Notes. Le fantasme n’en continuait pas moins à perdurer en Occident, ce qui explique aussi l’immense écho de cette affaire.

Les filles de Nouri Bey étaient-elles des exceptions ?

En partie, mais ces deux jeunes aristocrates nourries de culture française étaient des pionnières révélatrices d’un sentiment montant parmi les femmes de leur génération dans l’élite ottomane. Même si de telles fuites ont été très rares. Ces deux rebelles et féministes avant la lettre annoncent ce que sera la révolution menée par Mustapha Kemal, qui supprimera le voile, imposera l’égalité hommes-femmes par le code civil et leur accordera le droit de vote.

Recueilli par M.S.