Essai
Nouvelle parution
M. Hénaff, Le Prix de la vérité.

M. Hénaff, Le Prix de la vérité.

Publié le par Marc Escola (Source : Livre reçu)

Vient de paraître:

Marcel Hénaff, Le Prix de la vérité. Le don, l'argent, la philosophie, Le Seuil, coll. "La Couleur des idées", 2002. 560 p. 26 Euros.

Existe-t-il des biens matériels ou immatériels qui échappent à toute évaluation marchande ? Y a-t-il un rapport entre la vérité ou plutôt entre la philosophie, cette discipline qui en fait sa question propre et l'argent ? Peut-on parler d'un prix de la vérité ? Contrairement aux Sophistes qui exigent d'être payés, Socrate parle gratuitement. Il peut cependant accepter des présents qui répondent au don quil transmet. Il le faut même, assure Aristote, car le savoir n'est pas mesurable.

Mais qu'est-ce donc que donner ? Est-ce offrir quelque chose ?

Lenquête anthropologique montre que le problème est ailleurs : donner, c'est reconnaître pour être reconnu. Donner, c'est se donner dans ce que l'on donne. C'est défier pour lier. Mais comment cela s'articule-t-il avec le don fait aux divinités ? Quest-ce qui appelle le sacrifice, l'immolation de l'offrande ? S'agit-il d'éteindre une dette ? Pour cela, faut-il un don unilatéral, une grâce ? Qui peut unir souverainement une communauté par une faveur offerte à tous ? On pressent que la relation de don est au cur du lien social. Le mouvement du don diffère de l'échange marchand. Celui-ci, lié à l'outil monétaire et au modèle du contrat, possède sa nécessité économique, politique et éthique propre dans la cité de la différenciation des tâches. Le don relève d'un autre ordre et affronte cette question : qui est autrui et pourquoi autrui m'oblige-t-il inconditionnellement ? Donner indique que l'exigence ultime est toujours celle-ci : reconnaître et être reconnu selon un impératif de respect. L'argent a le pouvoir de menacer cette exigence et de détruire le lien qui unit les hommes. Il peut corrompre infiniment. Pourquoi ? Répondre à cela, c'est comprendre en quoi le prix sans prix de la vérité n'est pas séparable de celui de la dignité.

Agrégé et docteur en philosophie, Marcel Hénaff a enseigné à l'université de Copenhague et au Collège international de philosophie à Paris. Il a étudié l'ethnologie à l'université d'Abidjan. Depuis 1988, il est professeur à l'université de Californie à San Diego.