Essai
Nouvelle parution
M. Deguy, Écologiques

M. Deguy, Écologiques

Publié le par Marc Escola

Ecologiques
Michel Deguy

HERMANN

EAN : 9782705683306

NB. DE PAGES : 220 pages

PARU LE : 25/04/2012


" Tout exposé en " moi-je " a quelque chose d'indécent " écrit Michel Deguy. Et il ajoute un peu plus loin : " Quand il n'y a plus de choses, il n'y a plus de monde ". Par Ecologiques, il faut donc entendre ce que Michel Deguy nomme une vision, la vision elle-même ne pouvant être qu'écologique, car entièrement vouée à transporter le phénomène par l'imagination. De transport en transport, la fable se constitue.

Elle se fait tour à tour poème, fragment, discours, philosophème et biographème. Il y va à chaque fois du monde, habitable et habité, de l'humanité, d'une mutation anthropologique qui interroge le penseur, le poète et la politique. Retour à l'existence humaine, à notre triple finitude : subsolaire, mortelle et langagière. L'écologie n'est pas un humanisme. Il ne s'agit plus aujourd'hui principalement de l'homme défini comme centre de l'univers, ou valeur absolue, ou vie-nue à préserver à n'importe quel prix, ou propriétaire, ou méritant la richesse, ou but ultime de la science, télos récurrent à chaque étape de progrès scientifico-technique.

La politique ne suffit pas, ne se fonde pas sur elle-même, n'est pas autonome. Peut-être ne pouvons-nous plus parler de ce qui nous sépare dans le leurre du dialogue. Beaucoup plus de même ET beaucoup plus d'altérité ! " Tolérance " !

 

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On peut écouter sur le site remue.net un entretien avec l'auteur.

Le géocide est en cours ; non pas « un », mais « le » : par hypothèse il n’y en aura pas deux. L’écologie, une « logie » (pensée, parole, dires) de l’« oïkos » (maison, demeure, habitation des hommes, terre des hommes), n’est pas facultative. C’est une économie générale, donc, historique. Si elle n’est radicale, elle n’est rien. L’affaire n’est pas de l’environnement (l’« Unwelt » des éthologues) mais du monde ( le « Welt » des penseurs). La différence des deux est à repenser de fond en comble, à cause de l’oubli où sont tombés le monde avec ses choses, « l’écoumène ». La mondialisation est tout simplement une fin de monde, une perte du monde. Car le monde mondoie en choses et, si on m’accorde ce néologisme, son mondoiement est confié non à la technoscience, mais aux philosophes, aux cinéastes, aux intellectuels, aux musiciens « du nouveau monde » - à tous les hommes de l’art, et singulièrement aux poétiques des oeuvres. Aux lumières (« feux pâles ») plutôt qu’aux obscurantismes.
L’affaire est même trop sérieuse pour être confiée à la plupart des écolos, vert clair ou vert sombre ; sans parler des autres partis qui n’ont tout simplement pas encore compris l’à-venir. Le clown que raconte Kierkegaard vient avertir le public ce soir-là que le théâtre brûle. Tous éclatent de rire devant ce « bon numéro » : l’incendie emporte tout.
Ces Ecologiques, dont le titre dit tendrement adieu à Virgile, est un ouvrage composite, c’est-à-dire composé en mosaïque, ou stromates, ou comme une partition pour plusieurs formations (de chambre, de rue, de rap, de concert) qui répéteraient simultanément et sériellement dix pièces musicales ; elles s’ouvrent par un poème à Fukushima, Magnitude ; interrogent en proses poétiques, ou en argumentation, ou en altercations politiques, les grands mots et les grands maux : terre, monde, planète, choses, monde etc.
Quelle fin du monde est en cours ; quels sont les préparatifs de la déterrestration ; comment poursuivre l’histoire du sens en langages de langues… vous le saurez en lisant « Ecologiques ».
  - Michel Deguy

 

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Compte rendu par Marielle Macé à paraître dans la revue Critique.