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Événements & colloques
Littératures et médecine

Littératures et médecine

Publié le par Alexandre Gefen

Le Séminaire ARTS LITTERAIRES ARTS CLINIQUES
Europe - Afrique - Amériques

une composante de l'équipe "Littératures, Psychanalyse et Droit "
du
Centre d'études et de Recherche / Fondement du droit public
U.C.P.

présente


Littératures et médecine

PESER LES MOTS

Pré-programme

Argumentaire

un colloque organisé par

Gérard Danou
(g.danou@free.fr)
et Brigitte Galtier

Jeudi 26 et vendredi 27 avril 2007


Bibliothèque Universitaire des Cerclades
Cergy-Pontoise

Voir le plan pour se rendre à Cergy-Pontoise sur la page du séminaire
La Bibliothèque Universitaire des Cerclades est indiquée depuis la sortie du RER

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Pré-programme

Jeudi 26 Avril 2007

13h30 - Ouverture du colloque : Brigitte Galtier et Gérard Danou

Entre discours médical et langue commune
Modérateur : Gérard Danou - Paris VII et CER/FDP (U.C.P.) -

14h Elisa Lievain - philosophe, Paris -
Nietzsche et la " grande santé "

14h45 Betty Bednarski - Halifax -
Lire, écrire, soigner : les médecins fictifs de Jacques Ferron
(fragments d'un discours sur la littérature et la médecine)

Pause

15h45 Sylvie Fainzang - anthropologue, Inserm -
Maux dits et mal-entendus

16h30 Eric de Marez Oyens - Amsterdam -
Maurice Roche : les mots de la maladie

17h15 Corinne François-Denève - Liverpool -
Logomachies : l'œuvre de Irvin D. Yalom

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Vendredi 27 Avril 2007

Écrire contre la pathologisation du monde
Modérateur : Brigitte Galtier - U.C.P. et CER/FDP -

9h 15 Accueil des participants

9h30 Adnen Jdey - philosophe, Tunis -
Hypothèses sur l'esthétique des symptômes
ou de l'écriture comme clinique critique selon Deleuze

10h15 Karin Bernfeld - doctorante, Paris 7 -
Le poids du discours médical dans les journaux intimes d'anorexiques

Pause

11h15 Isabelle Smadja - philosophe, Nancy -
De la folie à la maladie mentale : le théâtre entre deux feux

12h Patrick Pognant - Paris V et CER/FDP (U.C.P.) -
Psychopathia sexualis de von Krafft-Ebing :
un art de la clinique entre médecine, morale, justice et littérature

Pause déjeuner

Les mots-médecins ou la bonne mesure
Modérateur : Gérard Danou - CER/FDP (U.C.P.) et Paris VII -

14h15 Monique Schneider - psychanalyste, philosophe -
Parole médicale et réassurance identitaire

15h Mylène Botbol-Baum - philosophe, Louvain -
Art narratif et argumentation dans la bioéthique des pays du sud

Pause

16h Romuald Fonkoua - comparatiste, Strasbourg II -
Ecrivains post-coloniaux d'Afrique et des Antilles : des médecins malgré eux

16h45 Gérard Danou
Synthèse et conclusion

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On se lit à travers les livres,
soit pour se découvrir, soit pour se contrôler.
Romain Rolland (L'éclair de Spinoza)

Argumentaire


Les littératures et la médecine sont depuis toujours concernées par le langage, l'usage des mots, la langue et la parole. Si la médecine était une science exacte, on pourrait mieux comprendre la relative rupture depuis le moment copernicien entre les deux ordres du discours : le langage scientifique et le langage poétique ; mais il n'en est rien. La médecine, cette somme évolutive de sciences appliquées selon l'expression de Canguilhem, est un art qui demande un certain savoir commun augmenté d'un style propre au médecin qui l'exerce. Certes la médecine est dominée par un savoir agir (alors que la littérature est un savoir dire) mais le médecin ne peut exclure de sa réflexion pratique l'histoire de ses patients, le roman que chacun porte en lui et qui module sa manière d'être, malade ou non. Un savoir d'un autre ordre que celui d'une lecture médicale du corps, mais qui est devenu, surtout depuis le XIXe siècle l'impensé de la médecine. Impensé qui doit cependant être considéré pour sa richesse et sa capacité d'instruire le médecin sur l'autre comme sur lui-même. La médecine, exercée alors sous cet angle plus ouvert peut accueillir la surprise, et participe de la découverte de soi comme l'expérience, l'épreuve de la lecture littéraire dont on sort parfois bouleversé.

Il se trouve que depuis la chronicisation des maladies graves, les usagers de la médecine (surtout depuis 1980 avec le mouvement impulsé par les associations de patients atteints par le VIH) expriment plus librement leur demande de dialogue (au sens de conversation) avec le médecin. On peut alors parler d'un nouveau partage du sensible, selon l'expression de Rancière, ou encore un désir de rééquilibrer les relations de pouvoir. Il ne s'agit pas que d'une vulgarisation des savoirs médicaux, mais bien souvent de partager des récits et donc de les écouter et d'y répondre. Encore faut-il selon les contextes et les horizons d'attente, faire la part entre les récits autobiographiques spontanés et les récits induits ou contraints dits autobiographies d'institution (D. Memmi).

L'écrivain pèse ses mots, il est supposé en connaître le sens, aussi bien le sens commun du dictionnaire, que la multiplicité de sens, la polyphonie et la force désirante que chaque mot lié à d'autres recèle dans l'acte d'énonciation. Il le sait. Des auteurs comme Sartre dans La responsabilité de l'écrivain , ou Bataille avec La littérature et le mal , nous l'ont longuement commenté. Les mots agissent comme des médicaments, ils sont bifrons, ils ont le pouvoir quasi magique de blesser et/ou de guérir. Le médecin, depuis le triomphe d'un certain positivisme scientifique excessif tend à imposer unilatéralement son discours dans la confusion de son pouvoir de commandement et de son pouvoir de compétence. Il a oublié d'apprendre à écouter et à peser ses mots c'est-à-dire les choisir en accord avec ce qu'il veut dire, et anticiper sur leur résonance chez l'autre en situation de conversation inter-individuelle.

Les journées d'études que nous proposons devraient pouvoir montrer en quoi les littératures, ces véritables " sciences du vivre ", résistent d'une part à la pathologisation du monde, et d'autre part atténuent et peuvent en partie remédier à la violence de cette carence langagière qui règne trop souvent dans l'univers médical. Elles devraient alors s'inscrire dans la réflexion éthique de chacun, particulièrement de tout soignant présent et à venir.

G. Danou
Médecin praticien hospitalier,
dr. ès lettres, habilité à diriger des recherches (littérature et médecine).
g.danou@free.fr