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Littérature et médecine à l'âge classique

Littérature et médecine à l'âge classique

Publié le par Matthieu Vernet (Source : Frédéric Charbonneau, Université McGill)

Atelier Littérature et médecine à l'âge classique

Les spécialistes de la première modernité (XVIe-XVIIIe siècle) savent l'influence réciproque qu'ont eue alors la médecine et les belles-lettres. Formés par l'étude des traités d'Hippocrate, de Galien et de Celse, les médecins de la Renaissance et de l'Âge classique sont avant tout des humanistes, des philologues, des spécialistes de l'héritage grec et latin ; ils puisent dans les oeuvres anciennes non seulement leur savoir, mais leurs modèles d'observation, d'expérience et de débat ; et ils écrivent à leur tour en citant les auteurs de l'Antiquité, naturalistes, poètes, historiens et philosophes. Inversement, les gens de lettres — dont quelques-uns, tels en France Rabelais ou La Mettrie, étaient aussi médecins — prennent fréquemment pour objet la Faculté et ses pratiques, quitte à s'en moquer, comme Molière. Les raisons de cette accointance sont multiples : elles vont des enjeux de vie et de mort auxquels les écrivains ne pouvaient qu'être sensibles, surtout en des temps où la létalité des maladies était grande, à ceux, plus abstraits, de la représentation du corps et de l'homme, elle-même profondément marquée par les changements de paradigmes médicaux. La vogue des leçons d'anatomie et leur incidence sur la littérature morale ; la fascination pour l'humeur mélancolique dont témoigne, en Angleterre, l'oeuvre d'un Robert Burton ; les résonances métaphysiques de la circulation du sang, décrite en 1628 par William Harvey, et des premières expériences de transfusion ; les déterminations physiologiques et organiques des phénomènes spirituels auxquels souscrivent les matérialistes du siècle des Lumières : tous ces exemples illustrent les rapports étroits de la médecine, de la philosophie et de la littérature, à une époque où " les "choses" et les "mots" ne sont pas encore séparés ". Or l'histoire de la médecine a généralement été écrite sur la base d'un credo moderne et sur le mode linéaire du progrès, qui va du mythe à la positivité et de l'ignorance à la connaissance. Cette façon d'écrire l'histoire a l'inconvénient d'occulter les dimensions imaginaire et idéologique des représentations à l'oeuvre dans le discours savant, de faire l'impasse en somme sur leur caractère proprement discursif. Nous souhaitons à l'occasion de ce séminaire-atelier, tenu dans le cadre de la Chaire de recherche William Dawson en littérature du XVIIIe siècle, promouvoir une histoire alternative des idées médicales qui, au lieu de se présenter comme une série de triomphes objectifs, essaierait de saisir la manière dont le savoir s'énonce textuellement à une époque donnée ; qui au lieu de relater l'histoire de ses progrès ferait celle des transformations de son discours.

CONFÉRENCES

D'une durée approximative d'une heure, chaque conférence sera suivie par une période de discussion ouverte au public.

Jeudi, 29 janvier, Pavillon Leacock, salle 738

13h30 : Don Beecher (Carleton) : " La sorcellerie et les malades imaginaires à l'âge de l'Inquisition "

15h30 : Lucie Desjardins (UQAM) : " Entre médecine et portrait. Lectures, usages et représentations du corps expressif au XVIIe siècle "


Vendredi, 30 janvier, Pavillon des Arts, salle 160

10h00 : Claire Crignon (Dijon) : " Fontenelle lecteur de Harvey : la découverte de la circulation sanguine où la "refonte de l'homme" "

13h30 : Roberto Lo Presti (Palerme) : " La machine plus que machine, ou l'automate transfiguré. L'anthropologie de Julien Offray de La Mettrie, ses enjeux philosophiques et littéraires et la réinvention du mécanisme médical "

15h30 : Hélène Cazes (Victoria) : " Herman Boerhaave préfacier d'Andreas Vésalius, 1725 : un modèle ancien pour écrire la médecine moderne ? "