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Les représentations sociales des îles dans les discours littéraires francophones : du voyage à l’utopie

Les représentations sociales des îles dans les discours littéraires francophones : du voyage à l’utopie

Publié le par Perrine Coudurier (Source : Buata Malela)

Appel à communication

Colloque international

 

Les représentations sociales des îles dans les discours littéraires francophones : du voyage à l’utopie

 

Le Département Lettres-Sciences Humaines du Centre Universitaire de Mayotte organise un colloque international à Dembéni les 29 et 30 mars 2017

 

Argumentaire

Déjà dans l’Antiquité grecque, la représentation de l’île « réelle » ou « fantasmée » – pour reprendre le titre d’un collectif dirigé en 2012 par Diana Cooper-Richet et Carlota Vincens-Pujol – touche à la question du « voyage », de la « littérature » et de l’« insularité ». On a là trois manières par lesquelles les îles ont été abordées particulièrement dans le discours littéraire occidental comme l’illustre à sa manière le titre du recueil poétique d’Édouard Glissant, Pays rêvé, pays réel (1985). L'Île, c'est le lieu, l'île est irruée toujours selon Glissant à la suite d’Aimé Césaire, Lieu de tous les possibles ; là où le continent aurait une autre configuration spatiale et donc un système de représentation correspondant. Dans les lettres cubaines, l’île présente plusieurs aspects allant du positif au négatif (José Lezama Lima, Dulce María Loynaz…). Mais chez Alejo Carpentier (1930), l’île est lieu d’insolite : c'est le quotidien, celui que nous trouvons à l'état brut latent, omniprésent. Ces deux conceptions complémentaires ne sont pas si éloignées de celles que l’on retrouvait déjà dans l’Odyssée d’Homère (fin du VIIIe siècle ACN) : diverses péripéties d’Ulysse l’amènent à séjourner d’île en île, avant d’atteindre sa demeure à Ithaque. Dans cette œuvre, l’île est associée à un cheminement initiatique pour le héros antique, pris dans un certain quotidien. L’Odyssée d’Homère qui symbolise le voyage notamment se constitue en modèle pour la littérature qui le suivra dans les temps ultérieurs. Dans le Moyen Âge européen, les îles peuvent s’apparenter à un lieu « entre réel et imaginaire, entre terre et mer, image même de l'entre-deux, elles ne laissent place qu'à la fantaisie et au fabuleux [...][1] ». De la Renaissance aux Lumières, l’île peut symboliser une modalité d’accès à la pensée philosophique, à la satire sociale ou bien à une utopie politique. À cet égard l’Utopie (1516) de Thomas More reste une référence encore aujourd’hui. Sa conception sera partagée au XVIIe siècle et au XVIIIe siècle qui voient se multiplier les relations de voyage faisant de l’île un objet de dissertation. On a ainsi des auteurs comme Jonathan Swift et sa satire sociale Les Voyages de Gulliver (1721) mais aussi Robinson Crusoé (1719) de Daniel Defoe, L'Île des esclaves (1725) et La Colonie (1750) de Marivaux, La Découverte australe (1781), roman utopique de Restif de La Bretonne. Sans oublier Paul et Virginie (1789) de Bernardin de Saint-Pierre, L'Isle des philosophes (1790) de l'Abbé Balthazard, l'île de Tamoé dans Aline et Valcour (1795) du Marquis de Sade.

Aux XIXe et XXe siècles, de nombreuses productions romanesques abordent le thème de l’île en fonction des enjeux de leur contemporanéité respective. Des romans comme Voyage en Icarie (1840) d'Étienne Cabet, L'Île mystérieuse (1874) de Jules Verne, L’Île au trésor (1888) de Robert Louis Stevenson font de l’île une matière littéraire en mobilisant toutes les représentations afférentes. Plus proches de nous : Île (1962) d'Aldous Huxley, Vendredi ou les limbes du Pacifique (1967) de Michel Tournier, L'Île des gauchers (1995) d'Alexandre Jardin, La Possibilité d'une île de Michel Houellebecq (2005). L’ensemble de ces exemples illustrent l’importance de l’île dans le discours littéraire principalement, même si les arts (plastiques, musicaux, cinématographiques, picturaux, etc.) ne sont pas en reste et auraient pu faire l’objet de nombreux exemples. C’est aussi dans ce contexte global que l’on peut resituer le discours littéraire des auteurs notamment des Antilles francophones (comme Aimé Césaire, Édouard Glissant, Patrick Chamoiseau etc.) et des îles de l’océan Indien (Nassur Attoumani, Mohamed Toihiri, Soeuf Elbadawi, David Jaomanoro, Michèle Rakotoson, Jean‑Luc Raharimanana, Ananda Devi, Axel Gauvin etc.) qui font de l’île un horizon de référence dans leurs productions respectives. Cette littérature montre aussi que l'île est surtout source d’imaginaires multiples et reste liée aux représentations sociales, à l’insularité comme concept anthropologique que l’on peut comprendre aussi grâce aux travaux de Jean-Michel Racault et Jean-Claude Marimoutou, L'Insularité, thématique et représentation (Paris, L'Harmattan, 1995) ou du collectif L’Insularité (2005) dirigé par Mustapha Trabelsi et plus récemment le numéro 10 de Romanica Silesiana (2015) se proposaient d’aborder.

Partant, il s’avère nécessaire de réétudier la représentation de l’île dans les discours littéraires de langue française (aussi bien la littérature « française » que « francophone ») que l’on peut associer aussi au monde artistique plus large. Alors quelle orientation à envisager pour réaliser cet objectif de recherche ? Quelle approche adopter pour aller au-delà du descriptif afin de cheminer vers un questionnement différent des imaginaires que suscite l’île ou l’insularité dans les représentations sociales ? Comment l'île est‑elle traitée dans l'esthétique littéraire en général ? L'écriture n'est‑elle pas conditionnée par le prisme des attentes diverses ? Quelles stratégies de « fond » et de « forme » se dégagent alors ? Les regards et les imaginaires sont‑ils partagés ? Pour répondre à ces questions générales, on peut privilégier une approche théorique, une analyse littéraire singulière ou collective, comparatiste, diachronique ou synchronique, dans un esprit pluridisciplinaire ou non. Plus concrètement, on pourra explorer ces quelques axes de recherches (non exhaustifs) :

  • Actualité de la recherche sur les imaginaires des îles en littérature de langue française
  • Géocritique des îles : approche spatiale (paysage, urbanisme etc.) des îles dans la littérature…
  • Écopoétique des textes : rapports entre texte littéraire, île et environnement
  • Analyse linguistique des textes sur la thématique des îles : quelles spécificités discursives (grammaire des textes, analyse du discours, etc.) ?
  • Thématique des îles dans la littérature de langue française sur le plan diachronique et/ou synchronique
  • Géopolitique des îles dans le discours littéraire
  • Île et représentations sociales : espaces mythiques, mythe des origines, Paradis/Eden, terre d’asile/d’exil, microcosme/macrocosme…
  • Syncrétisme, exotisme, Insolite, étrange, démesure, lieu de l’Altérité...

Modalités :

Envoi des propositions d’intervention (avant le 30 septembre 2016) :

Les propositions (titre et résumé : 300 mots maximum) et une brève notice biobibliographique de l’auteur (statut, rattachement scientifique, champ de recherche : 70 mots maximum) sont à envoyer aux adresses suivantes :

buata.malela@univ-mayotte.fr,  linda.rasoamanana@univ-mayotte.fr, gedes.972@gmail.com

Réponse du comité scientifique : 30 novembre 2016 au plus tard.

Une sélection des contributions au colloque fera l’objet d’une publication collective.

 

Comité scientifique :

  • Andrzej RABSZTYN (Université de Silésie – Pologne) – président du comité scientifique
  • Simona JISA (Université Babeș-Bolyai – Roumanie)
  • Mohamed AÏT-AARAB (Université de La Réunion – France)
  • Jean BESSIÈRE (Université Paris III Sorbonne Nouvelle – France)
  • Sabrina PARENT (Université Libre de Bruxelles – Belgique)
  • Romuald FONKOUA (Université de Paris IV Sorbonne – France)
  • Cynthia PARFAIT (Université d’Antsiranana – Madagascar)
  • Laurence ROSIER (Université Libre de Bruxelles – Belgique)
  • Lanto RASOANILANA (Université d’Antananarivo – Madagascar)
  • François PROVENZANO (Université de Liège – Belgique)

Comité d’organisation :

  • Buata MALELA (Université de Mayotte)
  • Linda RASOAMANANA (Université de Mayotte)
  • Christophe COSKER (Université de Mayotte)
  • Gérald DÉSERT (Université des Antilles)

 

Le colloque aura lieu au Centre Universitaire de Mayotte à Dembéni les 29 et 30 mars 2017.

www.facebook.com/Departement-Lettres-et-Sciences-Humaines-CUFR-Mayotte

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[1] Nathalie Bouloux, « Les îles dans les descriptions géographiques et les cartes du Moyen Âge », Médiévales

[En ligne], 47 | automne 2004, mis en ligne le 02 septembre 2006, consulté le 14 janvier 2016. URL : http://

medievales.revues.org/502