Questions de société
Les ravages de la LRU: un poste de Maitre de conférence en cdd (blog de B. Gensane - 10/09/10)

Les ravages de la LRU: un poste de Maitre de conférence en cdd (blog de B. Gensane - 10/09/10)

Publié le par Bérenger Boulay

Blog de Bernard Gensane culture, politique, littérature, tranches de vie

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vendredi, 10 septembre 2010 - Les ravages de la LRU (177)

Une nouvelle date historique dans l'histoire de la Fonction publique française.

Pour la première fois, un poste de maître de conférences vient d'être proposé en CDD à l'Université de La Rochelle, en sciences politiques.

Il s'agit d'un poste d'un an qui pourrait être renouvelé une deuxième année. Le salaire est légèrement inférieur à celui d'un MCF débutant. L'heureux élu enseignera en licence et en master. La présidence n'indique pas, pour le moment, si le recrutement sera effectué par un comité de sélection ou de manière plus souple.

Pour rappel, les comités de sélection, qui ont remplacé les commissions de spécialistes, sont des comités ad hoc, constitués de manière parfaitement opaque et sont sollicités pour un seul poste. La "manière souple", c'est tout simplement la magouille.

Il ne faut pas hésiter à répéter que TOUS les recrutements dans l'Université pourront désormais se faire sur ces bases.

À lire également sur ce blog:

Les ravages de la LRU (176)

Toujours de mon ami Xavier Lambert, qui travaille beaucoup pour moi en ce moment (on frôle l'exploitation), une analyse du rapport Aghion consacré à "l'excellence universitaire". On ne répètera jamais assez que sous Sarko 1er (y aura-t-il un Sarko 2 ?) le discours dominant est typiquement orwellien : on parle de réforme pour qualifier des mesures réactionnaires, on parle d'une meilleure fonction publique pour une fonction publique sabrée et fliquée, et l'on parle d'excellence universitaire pour parler d'une université soumise aux grandes entreprises, selon le modèle anglo-saxon.

Chez Philippe Aghion, professeur à Harvard, aussi à l'aise avec Ségolène Royal qu'avec Valérie Pécresse, la fascination vis-à-vis du modèle anglo-saxon est jouissive, mais toujours cachée par un discours qui se veut technique, pas du tout politique ou idéologique :

"Il n'existe pas de modèle unique d'organisation des grandes universités internationales. Les établissements nord-américains sont davantage centralisés dans leur fonctionnement (services centraux développés et puissants) ; les universités britanniques fonctionnent avec des services centraux très légers et des Collegesrelativement autonomes. Mais l'on retrouve des constantes dans les principes d'organisation, en particulier la place qui est faite aux deux légitimités qui forment la gouvernance d'un établissement d'enseignement supérieur :

–la légitimitéexécutive et administrative : un conseil d'administration (Board of Trustees, Conseil de surveillance, Board of Governors...) composéde personnalités souvent externes àl'université, qui désigne un président dotéde pouvoirs étendus, lequel est responsable devant lui ;

–la légitimitéacadémique, qui s'incarne (i) dans une instance représentant la collégialitéde la communauté académique (Sénat académique, Academic Board, Assemblée de l'Université...), véritable force de proposition en matière scientifique et pédagogique et (ii) dans un véritable exécutif académique de l'université(Provost, Chancelier, Recteur...) s'appuyant sur des doyens (Deans) exécutifs par grand domaine  ou composante scientifique."

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Les ravages de la LRU (175)

Mon camarade et ami Xavier Lambert vient de me faire passer cette très bonne analyse sur la "gouvernance" des universités, suite à l'application de la LRU. Le terme de "gouvernance", qui s'est introduit subrepticement dans le langage politique, n'est pas neutre. Ainsi, le Conseil d'analyse économique créé par Lionel Jospin a-t-il, en son temps, publié en anglais (la langue de Wall Street, ne l'oublions jamais) un ouvrage dont la traduction littérale du titre était Gouvernance, équité et marchés globaux. Dans l'ancien français, ce terme était un équivalent de gouvernement. Le mot passa dans l'anglais, avec le même sens, au XVIè siècle, puis disparut. Il renaquit vers 1980, dans les textes de la Banque mondiale et du FMI, toujours associé à l'adjectif "bonne". Une bonne gouvernance implique un recul de l'État qui n'est plus censé être au service du bien public mais fournir des services à des intérêts sectoriels et à des citoyens-consommateurs. Lambert explique dans ce qui suit que, si rien ne change, les universités finiront par être gouvernées par des chefs d'entreprise. Ce qui est parfaitement logique dans l'optique de la gouvernance, puisque la "société civile" (autre expression dangereuse, prisée par de nombreux socialistes) doit se substituer à la puissance publique. Il s'agira toujours de privilégier les intérêts particuliers aux dépens de ceux de la collectivité, des citoyens.

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Les ravages de la LRU (174)

Jean Kempf, un ancien collègue, me fait passer les remarques suivantes sur l'entrée dans la vie active des nouveaux professeurs de l'enseignement secondaire :
Comme prévu, les néo-certifiés (concours de juillet 2010, ou les réintégrés) effectueront un plein service de 18h essentiellement en collège, 
parfois en lycée. La plupart (voire l'immense majorité) n'a jamais vu un élève de sa vie, sauf peut-être en assistanat. Ils s'interrompront au 
second trimestre pour 6 à 8 semaines de formation. Ils ont déjà reçu leur affectation académique, mais ne connaîtront leur poste que le 27 ou 28 août pour une rentrée le 2 septembre...
On voit tout de suite les effets sur la qualité de l'enseignement pour les enfants qui auront la chance d'avoir un, ou deux, trois . . . "nouveaux 
maîtres". Mais je pense ici à ceux qui étaient encore nos étudiants il y a deux mois. La charge de travail qui va leur tomber dessus en quelques heures (sans même avoir pu "profiter" du mois d'août pour se familiariser avec les manuels utilisés 
dans leur futur établissement) va être immense et beaucoup n'y résisteront pas, même si je pense que localement l'aide des collègues se mobilisera. Il y a fort à parier que beaucoup se mettront en congé maladie vers la Toussaint, et certains vont très vite démissionner. Les IPR le savent et s'y préparent.
En dehors de la lutte pour changer ce système, et le recrutement des enseignants en général, qu'il faut mener avec nos syndicats, je crois qu'il va falloir aider cette "génération sacrifiée" au plus près du terrain. Nous ne pouvons pas leur apporter grand chose sur le plan didactique et ou 
pédagogique (encore que...), mais je pense qu'il faut garder avec eux, dès maintenant, un contact mail pour les soutenir et les aider à passer le cap du pire sans trop de casse. Les réseaux sociaux et l'internet en général vont les aider à s'entraider et à se mobiliser (j'espère), mais il me semble que c'est notre devoir d'être là pour eux dans ces quelques mois/semaines qui vont être terribles pour eux.

Les ravages de la LRU (173)

Un de mes amis universitaires a terminé son année le 10 juillet, par une participation à un colloque scientifique à l'autre bout de la France. Il entamera l'année qui vient le 24 août, par une autre communication dans un autre colloque. Il a passé une grande partie de ses vacances à préparer sa conférence, ne s'octroyant que 5 ou 6 jours de liberté.

Dès le 4 ou 5 septembre, il devra surveiller des examens, puis corriger des copies. Les cours pour l'année 2010-2011 reprendront le 20 septembre. C'est ce que l'on appelle les trois mois de vacances des profs de fac.

Lorsque j'étais étudiant, dans la seconde moitié des années soixante, la session de rattrapage des examens avait lieu début octobre. Fin octobre, les enseignants et les étudiants étaient requis par diverses réunions de rentrée. Les cours commençaient effectivement après la Toussaint. L'année universitaire s'achevait vers le 25 juin. Il ne serait venu à l'idée de personne d'organiser des rencontres scientifiques fin août. Les universitaires disposaient de vraies vacances, durant lesquelles ils pouvaient – et devaient – rédiger thèses, articles, livres etc. Les anglicistes avaient le loisir de séjourner un mois ou plus en Grande-Bretagne pour parfaire leur anglais et leur connaissance du pays, et j'ai connu des hispanistes passant deux mois à la Casa Velasquez en Espagne.

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etc.