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Les positionnements énonciatifs (Anglophonia n°32)

Les positionnements énonciatifs (Anglophonia n°32)

Publié le par Marc Escola (Source : Nathalie Vincent-Arnaud)

Les positionnements énonciatifs (Anglophonia n°32)

resp. Laure Gardelle, Sophie Herment et Henri Le Prieult

Tout énoncé implique une position énonciative, définie par Rabatel (2012 : 23) comme le « fait que l’énonciateur premier réfère aux objets de discours tout en se positionnant par rapport à eux, en indiquant de quel point de vue, dans quel cadre il les envisage ». Le présent numéro propose de se concentrer plus spécifiquement sur les positionnements, c’est-à-dire sur les prises de position par rapport au contenu discursif. Il peut s’agir d’une stratégie délibérée, d’une posture (Rabatel 2012), notamment lorsqu’un discours présente des ajustements énonciatifs à des fins d’argumentation, ou encore lorsqu’un locuteur choisit un positionnement en vue d’une construction identitaire. Il peut s’agir également d’une catégorisation opérée par un tiers : par exemple, un énonciateur employant des formes non standard de discours n’en aura pas nécessairement conscience, mais pourra être classé comme « peu cultivé » (ou autre forme de qualité différentielle) par un observateur extérieur, qui le positionne ainsi par rapport à une norme (prescriptive, sociale, géographique, communautaire) qu’il a prise comme point de référence.

Dans ce numéro d’Anglophonia, on cherchera notamment à examiner les questions suivantes (liste non exhaustive) relatives aux cas de posture énonciative (c’est-à-dire de stratégie délibérée de positionnement).

  • Quels types d’identité personnelle ou socioculturelle ces marques construisent-elles : se construit-on uniquement en dissidence par rapport à une norme vécue comme dominante (se revendiquant éventuellement membre d’une micro-communauté de pratiques, voir Eckert 2000), ou peut-on aussi se construire comme étant pleinement dans la norme dominante ? Ce positionnement étant généralement assorti d’une évaluation de cette norme dominante, on pourra identifier les indices linguistiques de cette évaluation.

  • Pour le récepteur ou l’observateur, peut-on identifier des marques de posture énonciative, qui permettraient de conclure avec certitude que le positionnement est délibéré ?

  • Comment le récepteur, le co-énonciateur, se retrouve-t-il lui aussi positionné par rapport à ces choix énonciatifs ? Comment peut-il répondre à ce positionnement imposé – trouve-t-on des formes de rejet, de correction, de réorientation, ou bien au contraire d’accommodation (Giles et al. 1991, Albrespit et al. 2017, 2018) ? De là, en interaction, comment les positionnements se co-construisent-ils, évoluent-ils au fil de l’échange ? Note-t-on des formes linguistiques privilégiées de la part des énonciateurs en autorité, ou des inattendus en réception, par exemple ?

  • Un même marqueur linguistique produit-il toujours les mêmes effets, ou peut-on identifier des effets complémentaires du contexte d’emploi ? Leblanc & Martinez (2005 : §1) soulignent par exemple l’influence des co-occurrents, ainsi que celle de la fréquence en contexte, dans des discours de vœux des Présidents de la Ve République.

  • Dans quels domaines du discours la posture énonciative se rencontre-t-elle de manière privilégiée ? On pense bien sûr aux marqueurs discursifs, à la prosodie, à la modalité, au discours rapporté, aux choix de structure informationnelle, éléments pertinents pour le volume. Mais que faire également des exploitations ad hoc, créatives, de constructions grammaticales par exemple (ex. coffeed out pour la construction (all) X-ed out, Hugou 2013). De plus, que révèle leur propagation éventuelle, et quelle gestion est faite de la concurrence linguistique (ex. entre coffeed out et overcoffeed) ? Existe-t-il d’autres formes moins étudiées de positionnement énonciatif ?

  • À quoi sert de poser explicitement un discours premier – qui, dans certains cas, n’a pas vraiment existé, comme l’ont montré certains travaux sur la reformulation (cas d’évolution du contenu référentiel entre ce qui est présenté comme une reformulation et le contexte en amont, ex. Pennec 2017) ou sur le discours rapporté (ex. effets de discours rapporté, comme dans ‘Safe, safe, safe’, the pulse of the house beats softly, De Mattia-Viviès 2006) ?

Lorsqu’il n’y a pas spécifiquement posture, que le positionnement est plutôt effectué par un tiers, on pourra se demander notamment comment se positionne ce tiers, qu’il soit contemporain de l’énonciateur premier ou qu’il vive à une époque ultérieure (études diachroniques) : est-il garant de la bonne norme, supérieur, observateur, ou autre ; à quoi lui sert l’étude des variations par rapport à une norme supposée, comment l’aborde-t-il et qu’en fait-il ? Par ailleurs, le positionnement du chercheur constitue-t-il une forme particulière de positionnement ? On pourra inclure à cette réflexion des études autour de l’interlangue en L2.

D’un point de vue plus théorique, l’étude des positionnements permettra enfin de préciser le rapport entre énonciateur (« source des points de vue », Rabatel 2012 : 24) et locuteur (« l’instance première qui produit matériellement les énoncés », ibid.). Les études de sociolinguistique (ex. Jaffe 2009) évoquent plutôt les identités des « locuteurs » dans une communauté de pratiques ; en contexte anglophone, le concept de « utterer » est très peu utilisé au regard de « speaker ». Est-il pertinent de distinguer énonciateur et locuteur, en particulier hors du champ du discours rapporté ou autres formes de dédoublement énonciatif ? Qu’apporte le concept de « positionnements énonciatifs » au regard de celui de « positionnements locutifs », voire « interlocutifs » ?

Le volume accueillera des propositions d’analyses de cas ou d’études plus quantitatives, sur tout type de genre discursif, toute époque, toute variété d’anglais ; les dimensions langagières, phonétiques, prosodiques, non verbales (gestes notamment) seront également bienvenues, de même qu’une perspective multimodale. Dans tous les cas, c’est une réflexion d’ordre linguistique, au-delà des spécificités stylistiques de tel ou tel énonciateur, qui est encouragée.

Co-éditrices : Laure Gardelle et Sophie Herment

Propositions à envoyer à :

Laure.Gardelle [a] univ-grenoble-alpes.fr, sophie.herment [a] univ-amu.fr, henri.le-prieult [a] univ-tlse2.fr

Merci de suivre les consignes de soumission disponibles ici :

https://journals.openedition.org/anglophonia/344

Calendrier

Publication de l’appel : janvier 2020

Soumission des propositions d’articles : 15 décembre 2020

Examen par le comité de lecture : janvier-mars 2021

Retour des articles finalisés : septembre 2021

Publication du numéro : automne 2021

 

Bibliography

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Albrespit, Jean, Lacassain-Lagoin, Christelle, & Henri Le Prieult (dir.). 2017. Modes et stratégies d’accommodation. Anglophonia 24. < https://journals.openedition.org/anglophonia/1092>

Albrespit, Jean, Lacassain-Lagoin, Christelle, & Henri Le Prieult (dir.). 2018. De l’accommodation à la non-accommodation : procédés et stratégies. Anglophonia 25.

< https://journals.openedition.org/anglophonia/1299>

Charaudeau, Patrick. 2006. Discours journalistique et positionnements énonciatifs. Frontières et dérives. Semen 22.

De Mattia-Viviès, Monique. 2006. De la porosité des formes du discours rapporté aux cas de déconnexion forme / sens dans l’univers du récit. In C. Delesse (dir.), Approche(s) linguistique(s) et/ou traductologique(s). Arras : Artois Presses Université, pp. 29-52.

Eckert, Penelope. 2000. Linguistic Variation as Social Practice. Oxford : Blackwell.

Giles, Howard, Coupland, Nikolas, & Justine Coupland. 1991. Accommodation theory: Communication, context, and consequence. In H. Giles, J. Coupland, & N. Coupland (eds.), Studies in Emotion and Social Interaction. Contexts of Accommodation: Developments in Applied Sociolinguistics. Cambridge : CUP, pp. 1-68.

Hugou, Vincent. 2013. Productivité et émergence du sens. L’exemple de la construction (all) X-ed out dans un corpus de blogs et de forums de discussion. Thèse de doctorat, non publiée, Université Paris 3-Sorbonne Nouvelle.

Jaffe, Alexandra (ed.). 2009. Stance: Sociolinguistic Perspectives. Oxford : Oxford UP.

Leblanc, Jean-Marc & William Martinez. 2005. Positionnements énonciatifs dans les vœux présidentiels sous la cinquième République : analyse des marques personnelles par les méthodes de cooccurrence. Corpus 4.

Pennec, Blandine. 2017. Réajustement(s) du discours en anglais contemporain. Londres : ISTE.

Rabatel, Alain. 2012. Positions, positionnements et postures de l’énonciateur. Travaux neuchâtelois de linguistique 56, pp. 23-42.
DOI : 10.11606/issn.2236-4242.v26i2p159-183