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Les narrations fantastiques et le monde naturel

Les narrations fantastiques et le monde naturel

Publié le par Marion Moreau (Source : Vittorio Frigerio)

Les narrations fantastiques et le monde naturel

La littérature fantastique a toujours entretenu une étroite relation avec le monde naturel. Pour que s'affichent leur spécificité, les événements contre nature ou surnaturels nécessitent un arrière-plan contre lequel se dessiner. Dans son étude consacrée à l'inquiétante étrangeté, Freud remarquait que le mot allemand unheimlich est à la fois un antonyme et un synonyme de heimlich, un terme évoquant le bien-être et la familiarité, mais également le secret et la dissimulation. Le surnaturel ne peut émerger que du naturel, et c'est ce qui est beau, attrayant et sublime, qui se transforme le mieux d'inquiétantes forces, créant ainsi le lieu de l'incertitude que Todorov identifie comme étant la caractéristique déterminante du fantastique.

L'Histoire naturelle de Pline illustrait déjà les particularités du monde animal et végétal à l'aide de légendes et d'histoires où se mêlent savoir et mystères, où s'allient l'étude scientifique et la recherche de l'inexplicable. Alors que le recours au surnaturel est une stratégie courante pour expliquer le naturel, ce dernier sous-tend notre compréhension et notre représentation de ce qui se trouve au-delà de ses limites. Lors de sa descente aux enfers, Dante parcoure différents paysages peuplés d'être hybrides, et caractérisés par leurs infractions aux lois naturelles; néanmoins, le Paradis terrestre y est simplement comparé à la forêt de pins aux abords de Ravenne. Dans Macbeth, quand Birnam Wood parvient à Dunsinane, le fantastique n'y est qu'un bref éclair, car aussitôt la réalité est rétablie par l'explication rationnelle. Quand, dans Le Seigneur des Anneaux, les Ents de Fangorn attaquent Isengard, la signification même de la réalité est mise en doute.

Tout comme la flore, la faune est loisible de dépasser sa représentation traditionnelle en force étrangère à maîtriser, de se métamorphoser et d'inspirer quelques déconcertantes identifications. La pseudo-science de la physiognomonie (littéralement: « connaissance de la nature ») et ses adeptes proposaient une concordance entre les traits humains et les espèces animales; dans la littérature fantastique, ces affinités s'expriment parfois littéralement, alors que l'humain et l'animal se métamorphosent l'un en l'autre. Pareillement, les théories darwiniennes ont inspiré certaines narrations fantastiques qui, en poussant la notion de sélection naturelle jusqu'à d'extrêmes conséquences, ont illustré la correspondance de l'ontogenèse et de la phylogenèse, les origines des organismes individuels et le développement des espèces.

Nous invitons donc les propositions de communication abordant les problèmes d'intersection entre le monde naturel et le fantastique, et tout particulièrement d'approches pan-culturelles ou pluridisciplinaires. Prière d'envoyer un résumé de 300 mots et un CV d'une seule page à l'adresse fantasticnarratives@gmail.com avant le 30 septembre 2011. Le colloque aura lieu à l'Université Dalhousie, les 27 et 28 avril 2012. Une sélection des contributions à la conférence servira de base à un numéro thématique de la revue arbitrée Belphégor – Littérature populaire et culture médiatique (http://etc.dal.ca/belphegor/)(http://etc.dal.ca/belphegor/)

Voici, à titre indicatif, quelques pistes de réflexion :

– La nature comme arrière-plan ou comme personnage du fantastique

– La nature fantastique, merveilleuse, étrange

– Les lectures allégoriques et poétiques de paysages imaginaires

– Les forêts enchantées

– Les végétations imaginaires et les écosystèmes impossibles

– Les métamorphoses et les créatures hybrides

– L'intrusion du fantastique dans les sciences de la nature