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Les hommes et les récits : reconnaître, classer, interpréter

Les hommes et les récits : reconnaître, classer, interpréter

Publié le par Alexandre Gefen (Source : Aboubakr Chraïbi)

Les hommes et les récits : reconnaître, classer, interpréter
Colloque international, Paris, 25-27 mai 2007


Le récit est l'instrument le plus commun et le plus répandu pour décrire le monde et les activités qui y règnent. La littérature offre naturellement des représentations du monde, passé, présent ou à venir, supposé réel ou fictionnel, comme récit orienté, issu d'une vision ordonnée du monde, ou comme une histoire hasardeuse, sans bien ni mal discernables. La richesse et l'intérêt de ces représentations demandent à être classés, dans les deux sens du terme, d'abord pour les préserver et ensuite pour s'en servir avec efficacité. C'est désormais, selon l'Unesco, l'un des patrimoines « immatériels » de l'humanité, fait de mots, et donc fragile ; c'est aussi, selon les critiques, une « matière » d'une haute technicité, faite d'un style, de motifs et de thèmes, d'intrigues, de passions et d'actions, de règles et de « ficelles ».

A une échelle internationale, les premiers textes narratifs à avoir posé des problèmes d'identification et de classification sont sans doute les contes du folklore. Leur prolifération, leur répétition, de manière presque indépendante de la langue ou de la culture concernée, ont conduit à réfléchir à une manière de les rassembler, d'en déterminer l'unité et d'en classer précisément « les motifs et les thèmes », de sorte à ne pas se perdre dans le jeu des variantes d'un corpus important, toujours en cours d'enrichissement.

Dans le domaine arabe, par exemple, divers essais de classement seraient utiles : qu'il s'agisse d'une classification générale par genre ou de répertoires plus particulier, comme pour le khabar, l'anecdote savante que se transmettent les lettrés, avec des usages et des perspectives différents, ou comme pour le mathal, le récit exemplaire, fictionnel ou non, mettant en scène, en fonction des « auteurs », des visions idéologiques contradictoires. Une littérature moyenne, comme les Mille et une nuits, offre aussi des perspectives intéressantes, car elle n'a cessé de s'étendre, s'affranchissant avec aisance des limites quantitatives et qualitatives que l'on assigne d'habitude à un simple recueil de ce genre. Pour garder cet exemple, au moins trois essais de classification ont été réalisés ou sont en cours de réalisation sur les Nuits : le premier, le plus ancien, que l'on doit à Nikita Elisséeff (Beyrouth, 1949), est consacré aux thèmes et aux motifs ; le second, récent, réalisé par Hasan El-Shamy (Bloomington-Indianapolis, sous presse), s'appuie sur les techniques en usage dans le folklore, tout en renouvelant le stock des motifs disponibles ; le troisième, que l'on doit à Claude Bremond (Paris, 2004 et Liège, 2005), pose la problématique d'une toute autre manière, puisqu'il se propose de classer le récit, non pas à partir du lexique du texte, mais à partir des éléments attachés aux aspects proprement narratologiques du récit : les motivations, les passions et les stratégies y jouent un rôle particulièrement important.

La littérature narrative de l'Europe médiévale, tout aussi répétitive, a fait également l'objet d'un nombre important d'essais de classification. Notons, parmi les projets les plus dynamiques, celui du GAHOM (Groupe d'Anthropologie Historique de l'Occident Médiéval), intitulé Thema. Ce projet est centré sur les récits exemplaires des prédicateurs de l'Europe chrétienne du Xe au XIVe siècle, même s'il intègre dans son corpus, entre autres, quelques textes arabes médiévaux comportant des récits similaires. L'ensemble est constitué sous forme d'une base de données consultable sur le site www.gahom.ehess.fr/document.php?id=192>http://gahom.ehess.fr/thema).


Bien entendu, les problèmes de classification se posent de façon identique pour la plupart des corpus. Les difficultés, en substance, peuvent être de deux sortes, celles qui précèdent l'entrée d'un récit dans un groupe donné (quelles sont les caractéristiques qui le qualifient ou disqualifient pour intégrer tel répertoire ou tel genre ? sous quelle forme faut-il le traiter ?) ; puis celles liées à son usage singulier, à la mise en évidence des informations pertinentes qu'il contient, en prenant par exemple en compte la langue même du récit ou bien en créant, de manière systématique, un méta-langage descriptif pour mieux réaliser les réseaux d'associations entre les différents textes. Par la suite, au bout de la chaîne, va se poser le problème de l'interprétation, non pas d'un texte unique, mais d'un ensemble ou d'une classe de textes qui engage une vision plus globale. Reconnaître, classer, interpréter : ce sont là les trois principaux axes de recherche, indépendamment de la langue et de l'origine culturelle du corpus, que l'on voudrait prospecter lors de ce colloque.

Comité scientifique :

  • Claude Bremond (EHESS, Paris)
  • Jacques Berlioz (CNRS, Lyon)
  • Abdallah Cheikh-Moussa (Université Sorbonne-Paris IV)
  • Aboubakr Chraïbi (Inalco, Paris)
  • Ulrich Marzolph (Université de Göttingen)
  • Hasan M. El-Shamy (Université d'Indiana)



Modalités de participation :

Un titre et un résumé (une dizaine de lignes) de votre contribution sont à envoyer avant le 30 avril 2006 à Aboubakr Chraïbi .