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Les figures de l'à-peu-près

Les figures de l'à-peu-près

Publié le par Bérenger Boulay (Source : Alain Rabatel)

Journée d'étude

Les figures de l'à-peu-près

Samedi 20 mars 2010, Paris 4-Sorbonne,

Salle des ACTES de 9h30 à 17h45

Listedes intervenants :

  • 9h30 – 10h : Eric Bordas, ENS-LSH, Lyon : « L'à-peu-prèset l'à-peu-prèisme. Lexicalisation d'un lieu commun »
  • 10h – 10h30 : Anna Jaubert, Université de Nice-SophiaAntipolis : « Le calembour ou lapragmatique du trait /facile/ »
  • 10h30 –11h00 : Alain Rabatel, Université de Lyon1-Iufm : « L'à-peu-près et le nom propre »
  • 11h00 – 11h30 :Marc Bonhomme, Université de Berne : « A-peu-prèsstructural, énonciatif et pragmatique dans le mot valise »
  • 11h30 – 12h15 : Discussion des interventions de la matinée

Pause

  • 14h00 – 14h30 : L. Gaudin et G. Salvan, Université deNice-Sophia Antipolis : « Au plus près du discours : l'anacoluthe »
  • 14h30 – 15h : Michele Prandi : « Métaphore,à-peu-près, conflit »
  • 15h – 15h30 : Claire Stolz, Université de Paris 4 :« L'à-peu-prèsdans la langue romanesque : de la faute de français à la figuredialogique »
  • 15h30 – 16h00 : Michael Rinn, Universitéde Bretagne occidentale : « La véhémence :une rhétorique de l'à-peu-près »
  • 16h00 – 16h30 : Claire Badiou-Monferran, Université de Paris4 : «Le paralogisme en régime littéraire : enthymème raté ou figure de l'à-peu-près? (Un cas d'école : La Fontaine) »
  • 16h30 – 17h : Marc Angenot, Université Mac Gill (sousréserve) : « Lesrhétoriciens actuels face aux monstruosités logiques : raisonnements paranalogie, variété de contrefactuels et autres raisonnements hors norme »
  • 17h –17h45 :Discussion des interventions de l'après-midi

Tentative de définition et dedélimitation du champ de l'à-peu-près

Nous neréduisons pas l'à-peu-près à la figure de l'à-peu-près, même si une telle figure appartient à notre corpus. Nousemployons ici la formule en un sens générique, comme « emploi légèrementimpropre », « tournure un peu gauche », « langage approximatif »(Dupriez 1980 : 60). Toutefois, pour éviter les inconvénients d'unecatégorisation trop lâche, nous nous intéressons aux figures qui nonseulement relèvent du langage approximatif et de l'équivoque mais surtout qui,dans la plupart des cas, l'exhibent, le revendiquent, ou, à tout le moins, lecommentent. Bref, nous nous intéresseronsaux figures d'approximation (au sens large du terme) qui font voir les chosesautrement en faisant violence au langage ordinaire, tout en jouant, plus oumoins, sur une équivoque du sens.

Caractéristiques socio-culturelles desfigures de l'à-peu-près

La problématique des figures del'à-peu-près interroge la norme langagière, la norme sociale du bien dire, etaussi une norme éthique du bien penser. Elle pointe d'emblée sur la dimensionnégative qui est souvent accolée à cette problématique.

Bien sûr, il ne s'agira pas dans ce dossier de substituerune approche systématique qualifiante en réaction à une représentationsystématiquement disqualifiante, mais de restituer les calculs du vouloir direet le poids des doxas, le jeu avec elles, avec le public. Enparticulier, ces figures sont fréquemment considérées comme non ou peu esthétiques(sauf dans la littérature transgressive). D'un autre côté, ils visent à mettre les rieurs de son côté, fût-ce à petitprix. Parfois, elles reposent sur des mécanismes de connivence et dedistinction, de compréhension entre pairs, par-dessus le vulgaire. Cettecompréhension à demi-mot renvoie au fait que nombre de ces figures reposent surun décodage complexe, et construisent un ethos de distinction paradoxal, duretrait et l'entre soi (comme dans le cas du verlan ou d'autres pratiques de cetype). Bref, il y a là une sorte de communication codée, parallèle, en tension avecla nécessité d'être malgré tout compris, tension qui se gère différemment selonles figures ou les genres.

L'hypothèsedes points de vue en confrontation

L'hypothèsedes points de vue (PDV) en confrontation, développée dans le n° 160 deLangue française, paraît une piste intéressanteà poursuivre à propos de l'analyse des figures de l'à-peu-près.

Qu'entend-on par PDV en confrontation ? Le processusfigural repose sur l'actualisation inattendue d'un PDV au regard desmanières habituelles de penser et de dire, en appui sur la singularité d'uneexpérience sensible et de son vouloir dire. Les PDV en confrontation sont entension entre une dimension interactionnelle (confrontation agonique de PDV) etune dimension cognitive : la prédication n'est pas obligatoirementconflictuelle, elle peut projeter deux domaines notionnels ou deux espacesmentaux (Fauconnier 1984) l'un sur l'autre, à l'instar des travaux de Black1962 et 1978, Cadiot 2001 sur la métaphore ou de ceux de Forget 2000 sur lesfigures de pensée. Autrement dit, confronter des PDV, ce n'est pas seulementles opposer violemment pour n'en retenir qu'un, c'est éventuellement lescumuler, voire les mettre en perspective, sur un mode explicite ou allusif,etc. Ces PDV sont des lieux privilégiés d'une énonciation problématisante,opacifiant le dit/dire, volontairement ou non, dans la mesure où les mises enrapport soulèvent de nouvelles questions. Ils se manifestent de diverses manières :en s'opposant au contexte, en opposant dans le cotexte des PDV différentsco-présents ; dans d'autres cas, l'opposition de PDV opère in absentia par rapport à une manière conventionnelle de dire.

La production des figures de l'à-peu-près joue sur uneconnivence présupposée, avec des points de vue doxiques, des contrepoints devue non doxiques, ce qui est intéressant aux plans sociolinguistique etéthique, mais aussi ce qui renvoie aux mécanismes de leur structure… Dans lalignée des travaux de Bonhomme (2000, 2005), on s'efforcera de rendrecompte de l'à-peu-près à trois niveaux, au moins, structural, énonciatif etpragmatique.

NB : Le projet initial a étéapprouvé par le comité de direction du Français moderne. Les travaux de la journée, après expertises, serontpubliés en 2011 dans le Français moderne (coordination Alain Rabatel, Université de Lyon 1-Iufm).

L'à-peu-près est défini par un double sens obtenu par undéplacement, sans contrepartie, de un ou deux phonèmes dans une phrase (Dupriez1980 : 59). Ainsi défini, l'à-peu-près correspond au paragramme ; ilse distingue de la contrepèterie qui repose sur un double déplacement.