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Les conférences d’artistes : entre fiction théorique et geste artistique

Les conférences d’artistes : entre fiction théorique et geste artistique

Publié le par Laure Depretto (Source : Université Rennes 2)

Si la conférence sur l’art dispose d’une longue histoire depuis les fameuses conférences de l’Académie royale de peinture et de sculpture au XVIIe siècle, son actualité dans le champ élargi de l’art contemporain n’a pourtant été jusqu’ici l’objet d’aucune recherche spécifique. Dresser un état des lieux de cette pratique, tenter d’en comprendre les enjeux soulève toutefois des difficultés. Forme aux contours incertains, elle pose d'abord la question du statut du déplacement d’une pratique d’un champ (scientifique, politique etc.) à un autre (artistique) et des effets que ce déplacement suscite : à la croisée entre art et savoir, la conférence d’artiste participe à la transmission, à la recherche en matière de création mais elle renouvelle aussi les formes de l’art et de sa réception. Constitue-t-elle un modèle pour l’enseignement et pour la recherche artistique ? Ce modèle conserve-t-il la dimension didactique qu’il a dans l’institution académique lorsqu’il est mis en oeuvre dans le champ de l’art ? Autant de questions qui renvoient à un second enjeu, celui du statut de l’artiste dès lors qu’il se trouve au contact d’un auditoire, qu’il soit celui d’étudiants en art, celui d’un auditoire de spécialistes ou celui plus large d’un public d’amateurs : quand il est en situation de transmettre son expérience artistique, d’exposer son point de vue sur l’art, l’artiste endosse-t-il un autre rôle ou fait-il encore oeuvre de création ? Symétriquement, c’est le statut de la conférence qui est questionné dès lors qu’elle se constitue comme une pratique artistique : lorsque la conférence devient une forme d’art, un moyen d’exposer c’est-à-dire de mettre en vue un discours, son sens et son statut s’en trouvent-ils transformés ? L’Université Rennes 2 et le Musée de la danse, en partenariat avec le Fonds régional d’art contemporain de Bretagne et l’EESAB-site de Rennes s’unissent pour proposer un temps de réflexion et de représentation, autour de cette forme artistique à la croisée de la théorie et de la pratique.

JEUDI 14 février 2013 FRAC Bretagne, Auditorium

10h30 L’épreuve de l’autre. Sir Joshua Reynolds face à son auditoire
Jan Blanc, Université de Genève
Tenus devant les membres et les élèves de la Royal Academy de 1769 à 1790, les discours de sir Joshua Reynolds n’ont pas été, comme on l’a dit trop souvent, l’occasion de déployer, sur près de vingt ans, une théorie homogène et unifiée des arts, sous la forme de quinze conférences. Face à un auditoire qui a souvent réagi aux propos du président de la Royal Academy, de façon parfois virulente, le peintre anglais n’a jamais cessé de reformuler mais aussi de faire évoluer, parfois de façon très radicale, ses idées et ses avis. Profondément souples, et même contradictoires, en raison même de leur réactivité, les discours de Reynolds s’inscrivent dans une histoire de l’art où la confrontation à la pensée de l’auteur constitue la chance et la condition d’une évolution artistique personnelle.

11h00  Speakers' Corner
Paul Bernard, Haute école d’art et de design, Genève
Le Speakers’ Corner désigne cette parcelle de Hyde Park à Londres où chacun est autorisé à tenir une tribune, permettant aux opinons les plus excentriques, radicales et provocantes d’avoir droit de cité. Speakers Corner, c’est aussi le titre d’un film de Marcel Broodthaers, réalisé en 1972 dans lequel on entrevoit l’artiste à Hyde Park, silencieux, brandissant des pancartes qui enjoignent les passants à se rendre au musée. Comment interpréter ce geste muet et autoritaire sur ce site dévolu au débat public ?

11h45  Catalogues en revue
Yann Sérandour et Jérôme Saint-Loubert-Bié
À partir d’une sélection provenant de leurs bibliothèques respectives, Jérôme Saint-Loubert Bié et Yann Sérandour passent en revue une série de livres d’art qu’ils feuillètent et commentent librement

École européenne supérieure d’art de Bretagne Rennes, Auditorium
sur réservation : erba@ville-rennes.fr15h00 Quodlibet
Éric Duyckaerts
Éric Duyckaerts propose une nouvelle aventure dans le langage et les savoirs. Cette fois, la forme annoncée est un Quodlibet.


Musée de la danse / Centre chorégraphique national de Rennes et de Bretagne, site St Melaine

Esther Ferrer
Elle parle/elle fait/elle fait/elle parle/elle théorise/elle pratique/elle pratique/elle théorise et elle commence à nouveau, mais elle ne se répète jamais.

Dance for nothing
Eszter Salamon
Lecture on nothing de John Cage devient la source d’une chorégraphie de mouvements et de sons juxtaposés.
 

 

Vendredi 15 février 2013
FRAC Bretagne, Auditorium

9h30  Hôtel Palenque de Robert Smithson: conférence illustrée ou projection commentée ? Nathalie Boulouch-Laurence Corbel, Université Rennes 2
En 1972, invité à participer à un séminaire à l’Université d’Utah, Robert Smithson consacre son intervention à un hôtel décrépi de Palenque (Yucatán, Mexique). De cette conférence défiant les codes traditionnels du genre tout en parodiant ceux du travelogue illustré, on a conservé les diapositives prises par Smithson ainsi que l’enregistrement des commentaires qui les accompagnent: entre sérieux et ironie, les observations de l’artiste accentuent « l’iconographie proche de la désolation » qui caractérise son œuvre photographique tout en dévoilant, par delà l’apparence insignifiante du lieu, une autre réalité qui fait du chaos sa matière et son ordre.

10h00 21.3 de Robert Morris: la forme au travail
Anaël Lejeune, Université de Louvain-la-Neuve
La performance 21.3 fut créée par l’artiste américain Robert Morris en février 1964 au Surplus Dance Theater de New York. Il y récita les premières pages du célèbre essai de l’historien de l’art Erwin Panofsky, Iconography and Iconology (1939). Cependant, grâce à un subtil stratagème, fut progressivement introduit un décalage entre les mots proférés et les articulations de la bouche de l’artiste. Prenant acte de la dimension critique que ce processus de désynchronisation revêt vis-à-vis du texte de Panofsky, il s’agira ici de cerner un peu plus précisément la nature des objections que Morris adresse à l’endroit de la discipline iconologique.

10h30 Yves Klein: «[...] et aussi plein d’humour»
Denys Riout
Yves Klein s’est adressé à plusieurs reprises aux « lecteurs » de ses tableaux, mais il a organisé avec un soin particulier la conférence qu’il donna en Sorbonne le 3 juin 1959. Il en reste des photographies et, surtout, un enregistrement aujourd’hui disponible en CD. Outre son incontestable intérêt théorique, cette conférence actualise un souhait formulé par l’artiste deux ans plus tôt: «Je suis peintre, eh bien, je ferai quelque chose qui doit être de la peinture aux yeux de tous et aussi plein d’humour, pourquoi pas ? S’il n’y a pas d’humour, tant pis pour ceux qui ne le voient pas.»
 

Université Rennes 2

14h30 Joseph Beuys: art, mémoire, expérience - Amphithéâtre O1
Jean-Philippe Antoine
Reprise, sous une forme musicale et chorale inédite, d’une conférence autrefois donnée en décembre 1997 au musée Picasso à Antibes, puis en octobre 1999 au MAMCO à Genève.

16h00  La conférence des échelles. Retour à Rennes - Amphithéâtre E2
Hubert Renard
Hubert Renard retrace son parcours artistique à travers la notion particulièrement révélatrice d’échelle. Le discours sur le travail peut éventuellement être le travail.

19h00  Faire le Gilles - Amphithéâtre B8
Robert Cantarella
Depuis plusieurs années, Robert Cantarella fait le Gilles, c’est-à-dire qu’il refait les cours de Deleuze avec un système d’oreillettes. Il répète mot pour mot les cours que le philosophe a donnés pendant plusieurs années à Vincennes et à Paris 8. Les intonations, les hésitations, les toux et la pensée qui avance sont redites à l’identique.