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Appels à contributions
Le théâtre arabe au miroir de lui-même

Le théâtre arabe au miroir de lui-même

APPEL À CONTRIBUTION

Le théâtre arabe au miroir de lui-même

Contacts et influences avec les expériences des deux rives de la Méditerranée


Introduction :


Le monde arabe, s'il a connu le théâtre d'ombres, n'a pas connu ce qu'on appelle en Occident ou en Asie le théâtre. Ce genre comporte des acteurs différenciés jouant un répertoire dans un lieu construit et dédié à ce type de spectacle. Il y eut, toutefois, des formes multiples de théâtralisation, à la fois sans illusion de la réalité et sans véritable distanciation, comme par exemple dans la halqa (le «cercle ») où s'instaure entre le conteur, al-maddâh, et son public un rapport regardé/regardeur qui n'est toutefois pas suffisant pour définir le théâtre. Les spectateurs sont présents à même le sol pour entendre un récit sans décor ni costumes diversifiés, sans texte écrit, sans didascalies, sans éclairage, sans plateau, sans coulisses, sans techniciens également. Y a-t-il encore théâtre lorsque aucun des éléments qui le constituent n'est présent ? Où alors, tout serait théâtre, y compris le fait de se regarder dans un miroir. Le théâtre, disait Artaud, n'est pas la théâtralité. Il n'est même pas dans les textes de théâtre, mais dans ce qu'en font les metteurs en scène. On parle, pour évoquer ces théâtralisations qui ne sont pas du théâtre, de « parathéâtre », parfois de « préthéâtre ». Il y eut toutefois, avant les conquêtes coloniales, mais uniquement chez les chi'ites, donc en dehors du monde arabe, des expressions dramatiques publiques et efficaces avec la ta'ziyya .

C'est ainsi qu'une première question se pose. Comment définir ce qui est théâtre et, s'il y eut absence d'un des genres de la représentation, comment expliquer ce manque ? Il n'y a donc aucune histoire possible de l'art de l'acteur, de l'écriture théâtrale ou de la technique de la scène dans le monde arabe d'avant le XIXe siècle. Or tous les pays arabes ont connu le développement de formes théâtrales de plus en plus diverses depuis deux siècles. Et cela malgré la censure sous toutes ses formes, l'absence de moyens et de liberté d'expression, malgré aussi la présence de formes concurrentes de représentation comme le cinéma ou la télévision, etc. Le théâtre s'est développé, soit par emprunt, par traductions ou adaptations, soit par la création d'un répertoire propre puisant ou non dans le patrimoine culturel tel que, par exemple, les maqâmât (les séances).

Tous les courants esthétiques ont été expérimentés de la comédie de Molière chez les Arabes francophones ou des pièces de Shakespeare chez les anglophones au happening en passant par la commedia dell'arte, le vaudeville ou l'opérette, sans oser l'opéra, privilège d'Ahmed Essyad. On a même imaginé des créations vidéo sans acteurs, les hommes étant remplacés par des voix off ou par des mannequins. D'autres pièces furent créées avec ou sans texte, accompagnées ou non de chant et de danse, avec ou sans décor, avec ou sans usage de technologie. On a donc expérimenté toutes les fonctions du théâtre, du simple divertissement à la dénonciation conçue comme un instrument de lutte politique contre les pouvoirs en place à commencer par les profiteurs de l'exploitation coloniale. Ce théâtre a été écrit en langues étrangères ou en arabe classique ou en dialectal, voire en berbère. Il a utilisé des formes populaires (al-hakawâtî, la fête du sultan des tolbas, al-bsât' …) ou au contraire élitistes. Or cette période d'effervescence semble aujourd'hui retombée. Casablanca, depuis 20 ans, n'a plus de théâtre municipal. Les grands festivals du monde arabe ne sont que l'ombre d'eux-mêmes. Que devient actuellement le théâtre maghrébin ? De quoi est-il véritablement fait ? Que lui reste-il à dire qui ne soit pas déjà pris en charge par la télévision et les autres médias?

Horizons Maghrébins souhaite consacrer un numéro spécial à ce théâtre arabe, à son passé, son présent et surtout aux voies d'avenir qui feront que ses auteurs, metteurs en scène ou acteurs pourraient être à nouveau internationalement connus et reconnus, apportant des idées nouvelles, éventuellement un genre original, aux pratiques théâtrales.


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Thèmes


Voici, à titre indicatif, les thèmes qui peuvent susciter l'intérêt des réflexions :

Thème I — Quelle est l'essence, dans des sociétés qui ne sont pas démocratiques, de la théâtralité arabe ? En quoi le théâtre n'est ni le conte, ni la danse ni le mime ? Pourquoi la quête d'Averroès, du plus grand des philosophes arabes médiévaux, incapable de traduire les concepts fondamentaux du théâtre, ceux de tragédie et de comédie ? Pourquoi l'arrivée massive de ce genre nouveau de représentation au XIXe siècle ? Comment comprendre cette mutation culturelle ?

Thème II — Le théâtre maghrébin, postérieur historiquement aux théâtres égyptiens ou libanais, s'inscrit-il dans la continuité ou dans la rupture par rapport aux théâtres des autres pays arabes ou d'Europe et sur quels points ?

Thème III – Y a-il vraiment au Maghreb un public de théâtre et comment évolue-t-il ? L'étude quantitative et qualitative de la fréquentation des théâtres peut-elle donner un éclairage particulier sur l'évolution du goût et des intérêts des publics ?

Thème IV— Du côté de l'offre, quelles sont les obsessions, l'éthique et les esthétiques des gens de théâtre, au-delà des théâtres pauvre, cérémoniel ou diffus proposés par divers critiques maghrébins ? Quelle est l'histoire des institutions théâtrales, des salles, des troupes, des metteurs en scène, des auteurs ou des acteurs dans l'espace maghrébin ? Quid des actrices? Quels usages font-ils du patrimoine culturel arabe ainsi que des patrimoines étrangers ? Quel est leur rapport à l'histoire, la grande histoire (Saladin par exemple si
utilisé dans les années trente) ou celle du théâtre ? Pourquoi ne joue-t-on plus aujourd'hui les pièces qui furent les outils de la contestation politique des mouvements nationalistes ? Qui conserve le patrimoine théâtral maghrébin (les quelques milliers de pièces du patrimoine mondial traduites en arabe, mais aussi les créations locales) ?

Thème V – Quelles sont les fonctions des théâtres maghrébins ? Éprouve-t-on le besoin d'écrire des pièces et de les jouer pour divertir, obtenir une catharsis ou agir sur l'identité, la sienne et celle des autres. Ou désire-t-on simplement faire de la politique avec d'autres moyens ? S'agit-il vraiment d'engagement militant ?

Thème VI – Les « théâtres de l'immigration » ont-ils une quelconque influence sur la vie théâtrale au Maghreb ? Où sont jouées ces créations, en dehors des centres culturels européens, et avec quel impact ?

Thème VII — Quelles sont les politiques culturelles de chacun des pays du Monde Arabe en matière de théâtre ? Comment fonctionnent réellement les censures ? Pourquoi les ministères subventionnent-ils des festivals ? Comment se répartissent les aides entre théâtre professionnel et théâtre amateur ? Quelle est l'efficacité réelle de l'enseignement du théâtre en milieu universitaire ? Quelle place réserve-t-on au théâtre dans les médias, les écoles ou les universités ? Cela est-il véritablement utile ?

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Informations pratiques


Sont sollicités, pour mener à bien ce projet, tous les hommes de théâtre, architectes, auteurs dramatiques, metteurs en scène, techniciens du plateau, acteurs, critiques, universitaires des deux rives de la Méditerranée intéressés par le théâtre. Il s'agit de créer un débat fructueux et de trouver d'éventuelles voies nouvelles pour l'écriture dramatique, pour améliorer
la réception esthétique de ce type de représentation et, de manière plus générale, la réflexion sur le théâtre.

Appel aux photographes : Une rubrique consacrée aux photos de spectacle
(en noir et blanc) est prévue et figurera dans un cahier de 8 pages.

Anissa Derrazi, universitaire marocaine, co-responsable scientifique de ce numéro de la revue Horizons Maghrébins, à paraître septembre 2008.

Consignes et contact avec la rédaction :
Responsable du suivi de ce dossier : Mohammed Habib Samrakandi, Directeur de publication, rédacteur en chef de la revue Horizons Maghrébins-le droit à la mémoire-

L'acte de participation à cette publication doit contenir : titre (même provisoire) ; résumé de votre article en dix lignes maxi. ; Mots clés et présentation de l'auteur, en signalant principalement vos publications les plus récentes liées au thème.
Un article ne doit pas dépasser 8 pages. Il y a 3 849 caractères par page.

Date butoir de réception des textes : 15 février 2008.


Suivi du dossier : Mohammed Habib SAMRAKANDI
Directeur de la revue Horizons Maghrébins-le droit à la mémoire-
CIAM- Université Toulouse II - Le Mirail
5, Allée Antonio Machado- 31058 Toulouse-Cedex-09
Tél. : 05 61 50 47 95 -
Courriel : habib.samrakandi@univ-tlse2.fr et habib.samrakandi@free.fr