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Le Roman de la Rose et la philosophie parisienne au XIIIe siècle

Le Roman de la Rose et la philosophie parisienne au XIIIe siècle

Publié le par Charlotte Dufour (Source : Marco Nievergelt)

Appel à contributions

Le Roman de la Rose et la philosophie parisienne au XIIIe siècle

Institut d'Etudes Avancées de Paris, 20-21 Juin 2016

 

Avec la Divine Comédie de Dante, Le Roman de la Rose est le poème médiéval en langue vernaculaire le plus répandu et le plus important en termes d’influence (plus de 300 manuscrits). Il s’agit également d’une œuvre d’une complexité intellectuelle formidable: la continuation de Jean de Meun en particulier, tout en faisant converger les traditions de la poésie courtoise et amoureuse avec la tradition de la satire médiévale, manifeste également un intérêt soutenu pour des questions philosophiques. Les discours des personnages du Roman—particulièrement Raison, Nature et Génius—regorgent non seulement de citations d’auteurs anciens, mais résonnent également avec de nombreux débats philosophiques contemporains, et les nombreuses controverses qui secouent l’Université de Paris. Les critiques soulignent volontiers la dimension encyclopédique du Roman, et insistent sur la culture scientifique et universitaire de son auteur/continuateur, mais peu de chercheurs se sont intéressés de près aux implications philosophiques et intellectuelles plus profondes du dialogue de Jean de Meun avec la scolastique. Dans les années 1940 Gérard Paré pouvait encore maintenir que Jean de Meun était simplement "un vulgarisateur et un traducteur" "qui continue de mettre à la portée des laïcs les rudiments de sa science universitaire", mais à la lumière de travaux plus récents il est évident que cette appréciation est insuffisante et réductrice. Premièrement, Jean manifeste une compréhension bien plus précise et nuancée des problématiques philosophiques débattues à l’Université de Paris pendant les années 1260 et 1270 de ce que pouvaient suggérer les travaux de Paré, doublée d’une sensibilité particulière à l’égard des controverses institutionnelles à l’intérieur de l’Université elle-même. Deuxièmement, l’évocation de ces questions de la part de Jean de Meun ne peut être réduite à une série de simples ‘allusions’ à des termes, méthodes et débats scholastiques, mais suggère une visée philosophique plus large, bien plus profonde et plus complexe, dont le mécanisme et la signification reste à explorer. Il n’est donc plus possible de voir le Roman de la Rose comme un simple tissu de citations et d’allusions plus ou moins confuses et aléatoires à la culture scholastique, ni comme un texte qui ‘adopte’ des solutions philosophiques préexistantes de façon passive et dérivative. Bien plutôt, le Roman de la Rose apparaît comme un poème qui intervient activement, de façon précise, souvent provocatrice et irrévérente, dans les débats philosophiques et théologiques de l’époque.

Grâce à son influence profonde et durable sur le développement de la littérature et la culture vernaculaire de la fin du Moyen Âge, le Roman occupe une position privilégié dans la longue et complexe historie des relations entre scholastique et poésie, philosophie et littérature. Le cas du Roman de la Rose soulève donc une série d’importantes questions annexes, surtout d’ordre méthodologique, concernant l’interface entre discours philosophique et forme littéraire que nous nous proposons d’aborder également dans le cadre de ce colloque. La rencontre vise donc à enrichir notre compréhension du Roman de la Rose lui-même, en tant que poème et en tant qu’expression d’une réflexion philosophique, en encourageant le dialogue entre spécialistes de différentes disciplines—philosophie, histoire intellectuelle, et littérature. Cette démarche vise donc également à mettre à jour des dynamiques intellectuelles, culturelles et institutionnelles plus larges dans lesquelles le Roman est impliqué, tout en prêtant une attention particulière à la méthode poético-philosophique hautement personnelle développée par Jean de Meun, qui nous oblige à remettre en question toute sorte de barrière disciplinaire, autant moderne que médiévale. Nous invitons donc les participants à explorer un ou plusieurs aspects de l’engagement du Roman avec les débats philosophiques et théologiques de l’époque, ou ses relations avec la culture universitaire ou scientifique au sens plus large. Parmi les nombreuses questions abordées pourraient se trouver, par exemple, les suivantes :

·       Controverses autour de l’Averroisme au Aristotélisme radical autour de 1270

·       Science naturelle Aristotélicienne

·       Grammaire, Sprachlogik, Sémantique, Philosophie du Langage et de la Signification

·       Logique (Théories de la Référence ; Théories des Relations ; etc.)

·       Syllogistique

·       L’utilisation du Néoplatonisme du xii siècle par Jean

·       Fallaciae et Théories de l’Equivocation

·       Rhétorique et Poétique

·       Théologie, spécifiquement Théologie Trinitaire

·       Questions Ontologiques (individuation; le débat sur les universaux)

·       psychologie / philosophie de la connaissance/ émotion

·       Cognition et épistémologie (e.g. théorie de la species et de la perception, etc.)

·       Phénomènes Optiques (Miroirs, réfraction, etc.)

·       Théorie du rêve, de l’imagination et de la prophétie

·       philosophie politique

·       Dynamiques intellectuelles et tensions disciplinaires à l’intérieur de l’Université

·       Le rôle des ordres mendiants dans la culture universitaire

·       "Artistes vs. Théologiens", philosophi theologizantes

·       Astrologie, déterminisme astral, et divination

·       Éthique

·       Théories Économiques

·       L’intérêt de Jean pour des philosophes/poètes/penseurs antérieurs (Boethius; Alan of Lille; Bernardus Silvestris, etc.)

·       L’importance d’autres intellectuelles nommés dans le Roman (e.g. Abelard; Origen; Alhacen, etc.)

 

SVP contactez marco.nievergelt[at]unil.ch avant de soumettre une proposition de communication. Propositions à soumettre avant le 1er février 2016.

 

John Marenbon (Trinity College, Cambridge)

Jonathan Morton (New College, Oxford/King’s College, London)

Marco Nievergelt (Institut des Etudes avancées, Paris)