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Le Miroir des limbes d'André Malraux et la modernité littéraire

Le Miroir des limbes d'André Malraux et la modernité littéraire

Publié le par Jean-Louis Jeannelle

Le Miroir des limbes d'André Malraux et la modernité littéraire

sous la direction d'Henri Godard et de Jean-Louis Jeannelle (équipe "Littérature françaises du XXe siècle")

Université Paris IV-Sorbonne, 25 et 26 juin 2008 : Maison de la rechercher, 28 rue Serpente, 75005

Mercredi 25 juin, Modernité du Miroir des limbes

9h30 – 12h30 : Malraux et les écritures de soi

Présidence : Marius-François Guyard

Jacques Lecarme, « Antimémoires ou autofiction ? »

Jean-Claude Larrat, « Pour une muséologie du Miroir des limbes »

Joël Loehr, « Mai 68 : la pharmacie de Malraux »

Jean-Louis Jeannelle, « Lazare : une étude génétique »

Moncef Khemiri, « Écriture de soi et enquête ethnographique : Le Miroir et les cultures du monde »

14h30 – 17h30 : Le Miroir des limbes au carrefour des genres

Présidence : Didier Alexandre

Claude Pillet, « Le Miroir des limbes au risque de la fiction littéraire »

Michel Briand, « Polyphonies rhétoriques et culturelles, entre éloge et histoire : Malraux, Nehru et Mao dans les Antimémoires »

Catherine Coquio, « L'écriture du témoignage »

Henri Godard, « La réflexion sur l'art dans Le Miroir des limbes »

Michaël de Saint-Chéron, « L'intégration des oraisons funèbres dans Le Miroir des limbes »


Jeudi 26 juin, L'antimémorialiste dans l'histoire du second demi-siècle

9h30 – 12h : Les raisons historiques d'un blocage

Présidence : Jean-Yves Tadié

Janine Mossuz-Lavau, « Le contexte idéologique des années 1940 à 1960 : les sources d'un décentrement »

Jeanyves Guérin, « Un gaulliste dans les années Sartre »

Marielle Macé, « Sartre et Malraux : “Tout cela aurait pu s'accrocher” »

Robert Harvey, « Des Limbes au Purgatoire (la réception du Miroir aux États-Unis) »

14h30 – 17h30 : Le Miroir des limbes aujourd'hui

Présidence : Antoine Compagnon

Michel Murat, « Malraux et Le Miroir des limbes dans l'histoire littéraire »

Relectures d'écrivains :

Jorge Semprun

Régis Debray

Hédi Kaddour

Alix de Saint-André

On a longtemps divisÉ la carriÈre d'AndrÉ Malraux en deux périodes séparées par la guerre, conformément à ses affiliations politiques et idéologiques. La vraie rupture n'est peut-être pas tant le passage du compagnonnage communiste à la loyauté gaulliste que le soudain et violent décentrement de l'écrivain : alors que l'auteur de La Condition humaine et de L'Espoir jouissait jusqu'en 1945 d'une représentativité unique dans le champ intellectuel et artistique, celui des essais sur l'art, du Miroir des limbes et de L'Homme précaire et la littérature s'en voit rejeter à la périphérie, désormais coupé de liens très étroits qui l'unissaient à l'ensemble du milieu littéraire. Cette rupture dans son parcours d'écrivain et d'intellectuel résulte plus largement de l'évolution que connaît alors son oeuvre – en premier lieu l'abandon du genre romanesque, que Malraux partage avec d'autres écrivains, mais qu'il vit de manière plus radicale que Sartre ou qu'Aragon. Les oeuvres les plus représentatives du ministre des Affaires culturelles semblent désormais flotter dans une sorte de hors-temps, celui des écrits sur l'art, éclairants mais difficiles, ou des Mémoires qui empruntent à une tradition générique multiséculaire, située à contre-courant du goût contemporain pour les « misérables petits tas de secrets ».

Le but de ce colloque est de réinscrire Le Miroir des limbes dans la mémoire des Lettres après 1945, puisque les différents volumes qui composent ces Mémoires sont, de toutes les oeuvres de l'écrivain après 1945, celles qui ont suscité la plus grande curiosité au moment de leur publication puis, après la mort de l'écrivain, la plus grande indifférence critique, voire même une certaine hostilité, due à ce que l'on a trop souvent identifié comme une forme d'arrogante mythomanie. Le Miroir des limbes est en quelque sorte le symbole du relatif isolement à la fois esthétique et politique de Malraux – isolement qui se manifeste encore de nos jours par le peu de succès public de cette oeuvre mémoriale (moins connue sous le titre général voulu par l'écrivain que sous le titre de ce qui en est devenu la première partie : Antimémoires) et par l'absence, il y a peu encore, de travaux critiques offrant une vue d'ensemble.

Après Les Noyers de l'Altenburg et certainement même à partir de ce dernier roman, publié en 1943 aux Éditions du Haut-Pays à Lausanne, Malraux est entré dans une sorte de « temps des limbes ». C'est à comprendre cette mutation dans son statut d'écrivain et plus précisément de mémorialiste, mais aussi à en corriger les effets les plus négatifs que nous nous emploierons ici. Car l'histoire littéraire est aussi faite d'oublis, d'absences, de recouvrements ou d'invisibilités partielles. Ce sont ces effets de brouillage qu'il s'agira de corriger partiellement, en tenant pour hypothèse que briser l'isolement d'un auteur autrefois aussi central que Malraux peut contribuer à lever certaines des difficultés que nous rencontrons dans nos tentatives pour configurer la vie des lettres françaises après 1945. La relecture de son oeuvre par quelques écrivains montrera notamment qu'il est temps de rouvrir les volumes du Miroir des limbes et de redonner à cette oeuvre la place qui est la sienne dans l'histoire littéraire du second demi-siècle.