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Colloque : "Le discours colonial francophone au Maghreb : entre exotisme et universalisme" (El Jadida)

Publié le par Université de Lausanne (Source : El Mahi Abdelaziz)

Colloque : "Le discours colonial francophone au Maghreb : entre exotisme et universalisme" (El Jadida)

 

Organisé par le Laboratoire de Traductologie, Communication et Littérature (TCL)

Mardi et mercredi 23 et 24 avril 2019

 

PRÉSENTATION

En 1909, en réponse à une enquête du journal Le Temps sur la Littérature coloniale, Pierre Mille, en la comparant à celle des anglophones, déclare qu'en France, «  la littérature coloniale n'existe pas  »[1], étant rédigée par des voyageurs pressés (comme Paul Morand), des amateurs d'exotisme, des littérateurs de voyages touristiques ou cosmopolites, très rarement par des écrivains habitant, de longue date, le pays colonisé qu'ils évoquent. Il souhaite la définir comme «  celle qui eût été produite dans un pays où les Européens sont transplantés depuis un certain temps, par un de ces Européens qui serait né, ou tout au moins y aurait vécu les seules années où l'on possède une sensibilité  »[2]. Depuis 1902, les deux cousins et théoriciens, Marius-Ary Leblond, dans leur article sur Kipling (qu'ils citent en contre-exemple phare), confessent que «  nous n'avons point de grand romancier colonial français  »[3]. Dès 1906, ils entretiennent sur ce point, dans leur Anthologie coloniale, le "flou artistique", faisant du discours colonial, un véritable non-dit ou un concept vide de contenu, indistinguable de l'exotisme. Chez eux, au-delà même de 1920, ce dernier terme n'est doté d'aucune valeur péjorative, et c'est seulement en 1926, dans Après l'exotisme (de Loti), le roman colonial, que pour suivre Mille, ils tentent un "démarquage" et une redéfinition, pour tenter de se délivrer "de ce boulet", en désignant l’œuvre de Loti, comme antithèse à éviter absolument.

En 1911, Louis Cario et Régismanset sont déjà sur la brèche pour trancher ce nœud gordien, en nommant leur ouvrage L'Exotisme  : la littérature coloniale, dans lequel ils ne prônent rien de mieux qu'un exotisme  nouveau, comme l'attelage de l'exotique au colonial, dont l'exemple type serait Victor Segalen. En 1921, Le Grand Prix de littérature coloniale qu'animent, entre autres, Mille et les Leblond, essaye également de résoudre le dilemme par la création d'un corpus exemplaire, pouvant faire office de démonstration, mais avec un succès très limité, tant les ambiguïtés sont inextricables. Un paradoxe, en effet, est que face à un exotisme qui, selon la définition de Segalen dans son Essai sur l'exotisme, se veut «  perception aiguë et immédiate d'une incompréhensibilité éternelle  »[4], expression de l'éloignement, de l'étrangeté, se constituant donc en différentialisme radical, le discours colonial se fait fort, par réalisme politique et esthétique, de replier le différent sur le même, Autrement même (selon Roger Little), et se proclame, dans sa logique "gauloise", un universalisme  ! L'écrivain et théoricien, Eugène Pujarniscle, donne ainsi une autre définition selon laquelle, «  l'écrivain colonial peut se définir  : un homme pour qui l'indigène (sic) existe  »[5]. Le résultat est que les nœuds, difficiles à démêler, demeurent fortement serrés, entre exotisme, orientalisme, littérature de voyage touristique, cosmopolitisme, francophonie même, et littérature coloniale proprement dite (d'autant que de nombreux auteurs francophones maghrébins y ont aussi leurs racines).

Pour des raisons historiques bien compréhensibles, cette dernière a eu si mauvaise presse qu'elle a failli être complètement oubliée. Pourtant les passions encore vives s'apaisent peu à peu. A notre époque de mondialisation, le moment n'est-il donc pas venu, pour des raisons historiques ou esthétiques, d'étudier, objectivement et sans anachronismes, ce Discours colonial (pour reprendre le regretté Norbert Dodille) qui peut s'avérer très riche  ? C'est pourquoi dans ce cadre, nous vous proposons, à El Jadida, cette journée francophone (en arts et littérature) portant exclusivement sur le petit Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie), afin d'approfondir et illustrer cette riche problématique.

 

Pistes de réflexion

A titres seulement indicatifs, les documents analysés, exclusivement sur le petit Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie), peuvent être les œuvres d'écrivains dits  :

       -    coloniaux comme Mille, Bertrand, les Tharaud, Brosset, Montagne, Nolly, Euloge, le Glay, Bonjean, Odinot. Eberhardt.

         Algérianistes, de l'école d'Alger (voire indépendantistes) comme Randeau, Truphémus, Audisio, Camus, Sénac. 

  • Exotiques (ou classés comme tels par des théoriciens), de période coloniale ou pré-coloniale, comme Fromentin, Loti, Farrère, voire Maupassant.
  • Voyageurs comme Chevrillon, Morand, Dorgelés.
  • officiellement "canonisés" comme Montherlant, Mauriac, Gide, Saint-Exupéry.
  • Francophones mais dont certaines sources proviennent visiblement de l'ère coloniale comme Mahmeri, Feraoun, Dibb, Sefrioui, Chraïbi.  
  • Une (ou plusieurs) communication sur l'orientalisme pictural (ou autre) serait la bienvenue, concernant par exemple Fromentin, Delacroix, Dinet, la carte postale.

Axes d'étude indicatifs non exhaustifs  :

      -     comparaison entre les genres  : colonial, exotisme, voyage.

  • discours politiques ou sociologiques, rapports de force, conceptions impériales.
  • rapports à l'autre, aux cultures et civilisations, inculturations.
  • visions du Maghreb et de ses différents pays, passages.
  • valeurs  : particularismes et universalismes.
  • Contenus esthétiques  ou idéologiques  : une littérature d'idées  ?
  • Anthropologie et sociologie  : des témoignages historiques  ? 

 

Bibliographie de base (simplement indicative)

Cahiers de la Sielec 11 numéros, Kailash, Pondichéry-Paris, 2016   

Norbert Dodille, Introduction aux discours coloniaux, CRM, PUPS, Paris, 2011

Victor Segalen, Essai sur l'exotisme, Œuvres complètes, éd. Henry Bouillier, Paris, Laffont, 1995

Martine Astier-Loufti, Littérature et colonialisme, Paris-La Haye, Mouton, 1971

Roland Lebel, Histoire de la littérature coloniale en France, Paris, Librairie Larose, 1931 

Eugène Pujarniscle, Philoxène ou De la littérature coloniale, Paris, Firmin-Didot, 1931, rééd. Paris, Autrement mêmes, L'Harmattan, 2010

Marius-Ary Leblond, Après l'exotisme (de Loti), le roman colonial, 1926, rééd. in Écrits sur la littérature coloniale, rééd. Autrement mêmes, L'Harmattan, Paris, 2012

Raphaël Barquissau, Le Roman colonial français, Hanoï, G. taupin, 1926

Le Grand Prix de littérature coloniale 1921-1938, textes choisis et présentés par Vladimir Kapor, Autrement mêmes, L'Harmattan, Paris, 2018

Louis Cario et Charles Régismanset, L'Exotisme  : la littérature coloniale, Mercure de France, Paris, 1911, rééd. Autrement mêmes, L'Harmattan, Paris, 2016

Pierre Mille, En passant  : la littérature coloniale, Le Temps, Paris, 19 août 1909, rééd. in Barnavaux aux colonies, Écrits sur la littérature coloniale, rééd. Autrement mêmes, L'Harmattan, Paris, 2002

 

 

 

 

Comité scientifique du colloque d’El Jadida :

Abdelhak Jaber, Université d’El jadida.

Abdelaziz El Mahi, Université d’El Jadida

Jean François Durand, Université de Montpellier 3.

Soumaya Maatouk Université d’El Jadida.

Jamila Ayou Université d’El Jadida

Abdelhadi Filali Université d’El Jadida

Réda Bejtit Université d’El Jadida

Gérard Chalaye Sielec.

Abdellah Jarhnine. Université d’Oujda.

Mohammed Ezzouine. Université d’El Jadida.

 

Comité d’organisation :              

Abdelhak Jaber (TCL) Université d’El Jadida.

Abdelaziz El Mahi Université d’El Jadida.

Soumaya Maatouk. Université d’El Jadida.

Gérard Chalaye (Sielec)

Ezzouine Mohamed. Université d’El Jadida.

Jamila Ayou. Université d’El Jadida.

Abdelhadi Filali. Université d’El Jadida.

Réda Bejtit. Université d’El Jadida

Youssef Faghloumi. Université d’El Jadida. 

 

Lieu de la rencontre :

Faculté des Lettres et des sciences humaines El Jadida / Maroc.

 

Modalités de soumission :

Les titres et résumés des communications, d’environ une demi-page, accompagnés d’une notice biographique sont à envoyer uniquement par voie électronique avant le  30 mars 2019 à :

 

Coordination du Colloque ;

Abdelhak JABER (Université d’El Jadida)

Adresse électronique :   abdelhakjaber@gmail.com

Gérard Chalaye (Siélec)

Adresse électronique : gerard.chalaye22@gmail.com

Abdelaziz  El Mahi (Université d’El Jadida)

Adresse électronique : elmahiaziz@gmail.com  

 

Frais de participation : 100 Euros.

                                   70 pour les doctorants.

(Les membres de la Sielec sont exonérés) 

Calendrier : 

5 avril 2019 : Notification aux auteurs

 Juin 2019 : Publication

 

[1]     Pierre Mille, En passant  : la littérature coloniale, Le Temps, Paris, 19 août 1909, rééd. in Barnavaux aux colonies, Écrits sur la littérature coloniale, Autrement mêmes, L'Harmattan, Paris, 2002, p. 171

[2]    Ibid.

[3]    Marius-Ary Leblond, Écrits sur la littérature coloniale, Autrement mêmes, L'Harmattan, Paris, 2012, p. 143

[4]    Victor Segalen, Essai sur l'exotisme, Œuvres complètes 1, éd. Henry Bouillier, Paris, Laffont, 1995, p. 751

[5]    Eugène Pujarniscle, Philoxène ou De la littérature coloniale, Paris, Firmin-Didot, 1931, rééd. Paris, L'Harmattan, 2010, p. 81