Agenda
Événements & colloques
Le concept de fiction, une rupture épistémologique ?

Le concept de fiction, une rupture épistémologique ?

Publié le par Marielle Macé

Centre de Recherches sur les Arts et le Langage

Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales 
 

Le concept de fiction, une rupture épistémologique ? 
 

Journée d’études organisée par

Annick Louis, Jean-Marie Schaeffer, Sebastian Veg 

Vendredi 15 juin 2007 – Maison Suger

16-18 rue Suger - 75006 
 

La journée sera dédiée à une réflexion sur les conséquences de l’apparition et du succès croissant du concept de fiction dans la discipline littéraire et au-delà de ses frontières. L’objectif est d’abord de repenser les catégories et les concepts qui orientent la réflexion dans la discipline littéraire : de ce point de vue, la notion de fiction se substitue-t-elle à d’autres notions potentiellement unificatrices du champ, comme celui de mimésis ? Permet-elle de dissiper certains malentendus théoriques en faisant émerger un consensus sur un socle de présupposés théoriques dans le domaine de l’esthétique plus généralement ? Le débat s’organisera autour de quatre questions principales : 

1. Le critère de fictionnalité.

La force des nouvelles théories a été de montrer qu’on ne peut définir la fiction de manière purement intrinsèque : caractéristiques spécifiques et fonctionnement sont impossibles à dissocier. La réflexion portera donc sur les éléments de mise en place de la fiction, l’immersion et les leurres préattentionnels, qui amènent à distinguer fiction et croyance, ainsi que sur d’autres critères déterminant le partage traditionnel entre diction et fiction, comme la position du narrateur et sa fiabilité. Le débat autour du critère intrinsèque ou extrinsèque de fictionnalité devrait amener à s’interroger sur la définition proposée par Jean-Marie Schaeffer dans Pourquoi la fiction ? de la fiction comme « feintise ludique partagée ». Comment en effet peut-on concilier l’idée d’un cadre « ludique » et celui d’une modélisation, fût-elle seulement de type analogique ? Ainsi se repose la question de la dimension cognitive de la fiction, de son rapport au monde. 

2. La fiction à l’intérieur du champ de l’art

Au-delà de points communs aux genres narratifs (notamment le cinéma), il convient de s’interroger sur un rapprochement possible entre fictions littéraires, photographiques et picturales, ainsi que de revenir sur la question de l’opposition de la littérature de fiction à la poésie, et plus largement aux genres qui relèvent de la « diction ». On sera ainsi amené à redéfinir les frontières des genres, en opposant par exemple la peinture et la photographie fictionnelle au documentaire, tout en neutralisant comme secondaires les distinctions génériques traditionnelles et constitutives des études littéraires (théâtre, roman, nouvelle), renvoyées du côté de l’histoire institutionnelle de la littérature. 

3. Les rapports des fictions artistiques et non-artistiques

Resituer l’art par rapport à l’extérieur du champ esthétique permet d’ouvrir les études littéraires, et plus largement esthétiques, sur l’anthropologie : la transplantation et l’appropriation de pratiques et de textes de croyance (religieuses, quotidiennes) provenant d’autres cultures par la culture occidentale pose de façon particulièrement aiguë le problème de la réception artistique de ce que la culture ou le contexte social d’origine ne considère pas forcément comme artistique. Dans quelle mesure la fiction comme « feintise ludique partagée » est-elle « le propre de l’art », au sens où elle suppose une forme de croyance sui generis qui n’est pas de type religieux, spirituel ou politique et idéologique ? Cette question soulève à son tour celle de l’étendue historique et géographique de la fiction. Posée comme potentialité de l’action humaine, la fiction apparaît comme une catégorie universelle enjambant les cultures : il faut donc se demander si elle constitue une notion opérante pour aborder la production littéraire et artistique d’aires culturelles éloignées. Cependant, la fiction existe-t-elle vraiment en tant que « feintise ludique partagée » au sens plein en dehors de l’époque moderne et démocratique ? Par exemple, les pratiques que Clifford Geertz définit comme des « fictions maîtresses » supportent-elles une analyse en termes de feintise ludique partagée ? Ces questions renvoient toutes aux frontières de la notion de fiction, à sa superposition possible à celle de la relation esthétique, et à ses bornes historiques et culturelles. 

4. Le progrès en sciences humaines

Enfin, les problématiques posées aboutissent à un questionnement des avancées épistémologiques dans les sciences humaines : existe-t-il des ruptures, des sauts (qualitatifs) en sciences humaines ? Quel rôle doivent jouer les catégories, la description, la taxonomie dans nos disciplines ? Peut-on envisager ces « ruptures » ou « sauts » comme des progrès ? On se demandera ainsi, au-delà de la fiction, quel paradigme scientifique envisager dans le champ de l’esthétique.  
 
 

Matin - 9:30 - 12:30 

Ouverture

Présidente de séance : Annick Louis (CRAL-Reims) 

  • Philippe Roussin (CNRS) : « Récit, roman, fiction et document »
  • Brian Hill (GREGHEC / IHPST): « Fiction et jeu : ensemble contre (ou avec ?) la réalité »
  • Laurence Giavarini (Université de Bourgogne) : Quelle définition de la fiction pour quel libertinage ?
  • Sebastian Veg (Centre d’étude français sur la Chine contemporaine, Hong Kong) : « La fiction, fer de lance de la démocratie dans la Chine du 4 mai ? »

 
 

Après-midi - 14:30- 17: 30 hs

Président de séance : Jacques Aumont (EHESS)  

  • Marika Moisseeff (CNRS-LAS) : « Qu’en est-il du lien entre mythe et fiction ? Réflexions à partir de l’ethnographie des Aranda (Aborigènes australiens) »
  • Jean-Marie Schaeffer (CNRS-EHESS) : Titre à confirmer
  • Annick Louis (CRAL-Université de Reims) : « En quoi faut-il des frontières ? Réseaux, degrés, superpositions dans la réflexion en sciences humaines »

 

Clôture Sebastian Veg