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La vocation interactive des jeux de mots, entre sentiment linguistique et analyse du discours : approche diachronique (Paris Sorbonne)

La vocation interactive des jeux de mots, entre sentiment linguistique et analyse du discours : approche diachronique (Paris Sorbonne)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Joséphine Gardon)

La vocation interactive des jeux de mots, entre sentiment linguistique et analyse du discours :

approche diachronique

Maison de la Recherche de Sorbonne Université, 28 rue Serpente (6ᵉ arrondissement),

le 26 juin 2020. 

 

Si étymologiquement l’interaction se place du côté de l’agir, le latin actio désignant notamment « l’action du corps, l’activité physique », force est de constater un lien indéniable entre ce sens et les sphères de la communication. En effet, l’actio désigne également l’une des cinq parties de la rhétorique et plus particulièrement celle consacrée à la réalisation, à la mise en œuvre du discours. Qui dit discours en rhétorique dit public à persuader. Le substantif conserve donc de son étymologie l’idée implicite de modification des situations, modification qui opère par le langage. Inter-agir, ce serait donc à la fois dire, faire penser et faire agir. Or, c’est bien ainsi que se conçoivent les jeux de mots, type d’interaction particulier qui se propose également de faire rire. Parce qu’il se construit sur la connivence linguistique, si l’on en croit la construction du terme lui-même, le jeu de mots est une catégorie du discours où l’interaction est nécessaire ; le jeu de mots n’a d’effectivité que s’il est lu ou entendu et compris, il court toujours le risque de rester « lettre morte ». 

Cette connivence est déjà une prise à partie des interlocuteurs, puisqu’il s’agit de mobiliser l’assentiment des deux instances de l’interlocution autour d’un délocuté. On peut dès lors se demander si locuteur et destinataires sont sur le même plan, s’il existe deux joueurs riant au détriment d’un tiers ou bien, de manière plus subtile, un joueur et un joué. Des hiérarchies, des rapports de force s’élaborent-ils, suivant une étiquette et un code de préséance qui dépassent la sphère discursive ?   Peut-on, à partir de là, établir une typologie en diachronie ? 

De fait, on ne retrouve pas la même phénoménologie suivant les époques, la pratique des jeux de mots étant toujours à étudier en contexte, cadre et condition de son efficacité. L’humour évoluant, on peut se demander s’il existe une codification diachronique des jeux de mots et s’ils sont rattachés à certains schémas de pensée : existe-t-il un code universel du jeu de mots, ou, au contraire, est-il lié à une langue spécifique, ce qui le place du côté des intraduisibles ? La journée d’étude que nous organisons s’ouvre ainsi aux différentes manifestations de la langue française, de la langue médiévale à la langue contemporaine.

La question de la codification appelle celle du but qu’elle recouvre. Tous les types de jeux de mots partagent-ils la même vocation ? Une hiérarchisation a-t-elle pu se mettre en place au cours des siècles, et si c’est bien le cas, selon quels critères ? Cette interrogation implique d’étudier la part de subjectivité dans les critères d’appréciation du jeu avec et sur la langue. Certains jeux de mots ont-ils connu une spécialisation d’emploi et, partant, une exclusion d’autres emplois ? Ces spécialisations fluctuent-elles en fonction des évolutions des codes et moyens de l’interaction ? Permettent-elles une valorisation ou au contraire une dépréciation de la fonction ludique du langage ? Dans ce cas, c’est moins la nature du jeu de mots que son emploi même qui devient polémique. Il s’agit de comprendre quelle est la part du jugement de valeur morale dans ce qui, initialement, se voudrait une évaluation discursive, dans la mesure où les jeux de mots correspondent à un usage transgressif et ludique de la langue.

Le jeu du langage s’oppose dans son principe même aux délimitations admises de la sémantique. Son mouvement, pas supplémentaire vers la polysémie interprétative, est l’inverse de celui de la doctrine ou de la doxa. Sous des dehors légers se cache peut-être, dans ces conditions, un outil épistémologique et idéologique puissant, créateur de nuances et d’associations, de nouvelles catégories du réel : associer par le nom permettrait de différencier l’idée.

L’étude des jeux de mots opère sur un champ transdisciplinaire, qui unit linguistique, stylistique, littérature et histoire des idées. Ces réflexions, sans visée normative, ouvrent le champ de l’analyse : toute proposition de communication qui en réexaminerait les présupposés ou qui choisirait de se positionner à leurs marges est la bienvenue. Nous accueillerons avec le plus grand intérêt toute étude transversale ou interdisciplinaire.

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La journée d’étude se déroulera à la Maison de la Recherche de Sorbonne Université, 28 rue Serpente (6ᵉ arrondissement), le 26 juin 2020.

Le format des communications ne doit pas excéder 20 minutes, et celui des propositions 500 mots.

Ces dernières peuvent être envoyées jusqu’au 15 avril 2020 à l’adresse suivante : je.jeux.de.mots@gmail.com