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La vie d'après (Mémorial de la Shoah, Paris)

La vie d'après (Mémorial de la Shoah, Paris)

Publié le par Alexandre Gefen (Source : Vanessa Nurock)

COLLOQUE « LA VIE D’APRES »
23 Juin 2019
Mémorial de la Shoah, 17 rue Geoffroy L’Asnier, 75004 Paris, Auditorium Edmond J. Safra

PROGRAMME

MATIN (10H-12H) En anglais avec traduction simultanée anglais/français et français/anglais
Présidence : Estelle Ferrarese

10h-10h15 : Introduction

10h15-10h45 : Homogénéité, génocide et Etat, Martin Shuster, Goucher College, Maryland, USA

10h45-11h30 : (Re)Made in America: Survie après l'holocauste, Alyson Cole, Queens College & the Graduate Center, City University of New York, USA

11h30-12h00: discussion

APRES-MIDI (14 H-17 H 30) En français avec traduction simultanée français/anglais et anglais/français

Présidence : Vanessa Nurock

14h-14h30 : Avoir survécu à la place d’un autre ? Le problème moral du survivant et le jugement de l’après. Frédérique Leichter-Flack, Université Paris Ouest, France.

14h30-15h00 : Ecrire après : les attentats de 2015 en France, Alexandre Gefen, CNRS laboratoire THALIM, France

15h-15h30: discussion

15h30-15h45: pause

15h45-16h15 : La vie d'après Fukushima : perte du sol, perte de soi -penser le pays natal Furusato, Anne Gonon, Université Doshisha, Kyoto, Japon

16h15-16h45 : Repenser la vulnérabilité Estelle Ferrarese, Université de Picardie Jules Verne, CURAPP-ESS

16h45-17h15 : discussion

17h15-17h30 : conclusions

Organisation : Vanessa Nurock (Université Paris 8, LEGS) et Estelle Ferrarese (Université de Picardie Jules Verne, CURAPP-ESS) dans le cadre du GDRI « Formes de vie » en collaboration avec le Mémorial de la Shoah

Colloque gratuit, pré-réservation conseillée sur le site du Mémorial de la Shoah
https://billetterie.memorialdelashoah.org/…/e…/la-vie-dapres

RESUMES DES INTERVENTIONS/ABSTRACTS

Homogénéité, génocide et état, Martin Shuster, Goucher College, Maryland, USA
Cette conférence suggère que toute discussion sur la « vie d’après » un génocide devrait s’appuyer sur la distinction entre « génocide » et « le génocidaire ». Afin de montrer la force de cette distinction, cette conférence analyse la relation entre génocide et Etat, en suggérant que le génocide doit être compris comme un processus d’homogénéisation pathologique que les Etats empruntent dans le cours de projets plus ordinaires d’homogénéisation. Cette conférence discute certaines des raisons pour lesquelles cette homogénéisation peut devenir pathologique ou génocidaire. Elle conclut en suggérant ce qu’une telle priorité de la catégorie de « génocidaire » signifie pour toute discussion sur « la vie d’après ».
This talk suggests that any discussion of “life after” genocide ought to be framed by a distinction between “genocide” and “the genocidal.” In order to draw out the force of that distinction, the talk presents one way of understanding the relationship between genocide and the state, suggesting that genocide ought to be understood as a process of pathological homogenization that states undertake in the course of their more ordinary projects of homogenization. The talk discusses some reasons for why states pursue homogenization and for why such homogenization may turn pathological or genocidal. It concludes by suggesting what such a prioritization of the category of “the genocidal” means for any discussion of “life after.”
(Re)Made in America: Survie après l'holocauste Alyson Cole, Queens College & the Graduate Center, City University of New York, USA
Jusqu'à la seconde moitié du 20e siècle, le terme «survivant» faisait simplement référence à ceux qui survivaient à d'autres après le désastre et / ou aux individus qui allaient hériter d'une succession. Ce terme n'était empreint d'aucune signification évaluative. Aux États-Unis, cependant, aujourd'hui, la survivance est universellement célébrée (et fait même, aux Etats- Unis, l’objet d’une émission télévisée de «téléréalité» de grande qualité célébrant la survie du plus apte). Dans cette conférence, la professeure Alyson Cole (Queens College et le Graduate Center de la City University de New York) examine l’influence de la Shoah sur la transformation des conceptions américaines de la souffrance et de l’injustice, ainsi que de la vie après la victimisation.
Until the second half of the 20th century, the term “survivor” simply referred to those who outlived others in the aftermath of disaster, and/or individuals who stood to inherit the remains of an estate. It was not imbued with any evaluative meaning. In the United States today, however, survivorship is universally extolled and even the subject of a top-rated “reality television” show celebrating the survival of the fittest. In this lecture, Professor Alyson Cole (Queens College & the Graduate Center, City University of New York) examines the influences of the Shoah in transforming Americans’ conceptions of suffering and injustice, and life after victimization.

Avoir survécu à la place d’un autre ? Le problème moral du survivant et le jugement de l’après. Frédérique Leichter-Flack, Université Paris Ouest, France.
Survivre quand tous les autres sont morts, revenir vivant de conditions extrêmes où les normes morales ordinaires n’avaient plus cours... l’interprétation de cette « chance » a pu exposer les rescapés à la nécessité de se justifier, comme si leur survie devait se mériter, ou se défendre contre les soupçons. Même les questions bien intentionnées sur le supposé sentiment de culpabilité (vulgarisation du « complexe du survivant » oblige...) peuvent paraître cruelles dans l’après. La littérature de témoignage sur les camps porte la trace de ce désarroi. Comment la survie s’elle constituée en problème moral ? De la « honte », notion proposée par Primo Levi pour prendre en charge ce malaise de l’après-survie et du retour à la vie morale ordinaire, à l’exploitation sensationnaliste du post-trauma moral dans les romans grand public, dans le sillage du Choix de Sophie, cette communication s’interrogera sur la dimension trouble de notre rapport moral aux survivants.
Surviving when all others are dead, coming back alive from dire places where ordinary moral norms no longer applied... Finding answers to that «luck» has, in some instances, led survivors to have to justify themselves, as if they should have earned their own survival, or to face suspicion and defiance. Even well intented questions on their own guilt feeling can feel cruel in the aftermath. Testimonial literature bears the inescapable signs of intimate turmoil and disarray. How did mere survival transformed itself into a moral problem ? From the concept of « shame » proposed by Primo Levi to express the utter discomfort when returning to a life of ordinary moral norms, to the sensationalist exploitation of moral post-trauma in best selling novels building on Sophie’s Choice editorial success, this talk aims to question the moral ambiguities of our relationship to death camp survivors.
Ecrire après : les attentats de 2015 en France, Alexandre Gefen, au CNRS laboratoire THALIM, France
Passant par des formes personnelles autobiographiques ou de témoignage collectif, avec comme thématique originale la résilience personnelle et sociale, les écritures des attentats de 2015 en France, d’Adrien Genoudet à Philippe Lançon, déploient des formes littéraires originales, centrées sur la reconstruction du rapport à soi et de la communauté par l’écriture. C’est dire qu’elles manifestent, en réponse à l’individualisation contemporaine de l’ordre social, et contre l’aporie de l’indicible et les dangers du storytelling, l’aspiration relationnelle de la littérature française contemporaine.
Through autobiographical personal forms or collective testimonies, centered on the theme of personal and social resilience, the writings of the 2015 attacks in France, from Adrien Genoudet to Philippe Lançon, deploy original literary forms, focused on the reconstruction of the relationship to oneself and of the community through writing. In other words, in response to the contemporary individualisation of the social order, and against the aporia of the unspeakable and the dangers of storytelling, they demonstrate the relational aspiration of contemporary French literature.

La vie d'après Fukushima : perte du sol, perte de soi -penser le pays natal Furusato, Anne Gonon, Université Doshisha, Kyoto, Japon
Après des premiers temps de stupeur et d’impossibilité de parler, il a beaucoup été écrit sur la triple catastrophe de Fukushima : des romans, des poèmes, des essais où il est question de victimes. Mais les victimes elles-mêmes ont-elles pu parler ?
Cette communication veut explorer les voix des personnes touchées par la catastrophe et leurs silences qui s’élèvent dans les tensions entre le souvenir et l’oubli. Ces tensions dessinent un lieu le furusato ou pays natal (Heimat en allemand) où les morts parlent et les (sur)vivants trouvent l’apaisement, en reconstruisant le lien avec le sol commun.
After the first moments of stupor and inability to speak, much has been written about the Fukushima triple disaster: fiction novels, poems, essays about victims. But could the victims themselves speak?
This communication aims to explore the voices of those affected by the disaster and their silences, voices that rise in the tensions between memory and oblivion. These tensions construct a place called furusato or native country (Heimat in German) where the dead speak and the (on) alive find the appeasement, reconstructing the link to the common land.
Repenser la vulnérabilité, Estelle Ferrarese, Université de Picardie Jules Verne, CURAPP-ESS
Dans cette présentation je m’efforcerai de réfléchir à ce qu’est la vulnérabilité, en partant ce de qui doit être réparé après l’expérience d’une grande violence.
En mobilisant les travaux de Theodor W. Adorno, de Giorgio Agamben, et des éthiques du care, je définirai la vulnérabilité comme un « vivre à la merci ». La vulnérabilité caractérise des vies dépendant dans leur maintien de formes de protection capricieuses ou branlantes, des vies rivées à un très petit nombre de possibles.
In this presentation I will try to reflect on what vulnerability is, starting from what needs to be repaired after the experience of great violence.
By mobilizing the work of Theodor W. Adorno, Giorgio Agamben, and the ethics of care, I will define vulnerability as a "living at the mercy". Vulnerability characterizes lives that are dependent on maintaining capricious or shaky forms of protection, lives that are stuck to a very small number of possibilities.