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La rhétorique et les formes de la culture européenne. De la tradition aux défis contemporains

La rhétorique et les formes de la culture européenne. De la tradition aux défis contemporains

Publié le par Sabrina Roh (Source : Loïc NICOLAS)

Appel à contributions

(english version below)

 

Colloque international: La rhétorique et les formes de la cultures européenne. De la tradition aux défis contemporains.

Kaunas, 6 et 7 mai 2016

 

Département de littérature lituanienne, Faculté des Humanités – VDU

Faculté de Lettres, Traduction et Communication, LaDisco – ULB

 

Les études culturelles constituent aujourd’hui l’un des domaines privilégiés d’étude et d’actualisation de la rhétorique – pris comme phénomène social et langagier, mais aussi comme outil culturel destiné à l’exercice de la liberté en démocratie. Au seuil des XVIIIe et XIXe siècles, une rupture épistémique s’est produite en Europe entraînant le progressif abandon de l’arrière-plan rhétorique qui avait prévalu jusqu’alors. L’analyse de l’actualité récente témoigne, à bien des égards, d’une tendance constante à minimiser ou à occulter les conséquences d’un tel abandon. Ces conséquences ont trait aux moyens – discursifs notamment – dont nous disposons pour s’orienter et pour décider dans un monde flou, incertain, précaire, en mobilisant les ressources de la raison pratique. En effet, comme l’avance le philosophe Chaïm Perelman, c’est avant tout le « mépris de la rhétorique » et « l’oubli de la théorie de l’argumentation, [qui] ont mené à la négation de la raison pratique » ; mené, d’une manière ou d’une autre, à la guerre et au mépris des hommes. Reconnaissons-le, la rhétorique ne saurait être la prérogative des « experts » auto-proclamés, ni le pré carré des spécialistes de la langue. Elle relève, Aristote l’assurait déjà, d’une compétence commune à tous les hommes ; tous les citoyens. Une compétence qu’il importe, justement, d’apprendre à fréquenter pour s’en rendre maître. Chacun doit pouvoir, en conscience, faire fond sur l’antique technè du discours pour se défendre et accuser ; pour s’engager ou pour refuser l’engagement ; pour ne pas rester sans autre voix que celle de la violence. Faute d’une maîtrise concrète des outils culturels de la rhétorique, la parole est vouée à n’être pratiquée qu’au petit bonheur la chance, sans nulle méthode et, surtout, sans conscience. C’est ce qu’il nous appartient d’investiguer dans le cadre de ce colloque.

 

Une attention particulière sera portée aux questions suivantes :

- Le destin de la rhétorique n’a-t-il pas contribué à rendre plus difficile encore la reprise des formes universelles de la culture européenne ?

- La pratique de la rhétorique est-elle un moyen pour se prémunir des dérives funestes du consensus de façade et du verbe creux ?

- En quel sens la rhétorique peut-elle donner accès aux sources culturelles européennes susceptibles d’apporter au discours public contemporain un intertexte culturellement plus riche ?

- Le concept de sublime formulé dès l’Antiquité peut-il aider à dépasser la dimension pathétique et la grandiloquence déclarative des discours publics contemporains ?

- La rhétorique, telle qu’on l’enseigne dans les universités, est-elle en prise avec la tradition culturelle dont elle est issue ? La façon dont nous la concevons répond-elle aux besoins d’une formation citoyenne proprement humaniste ?

- Comment et pourquoi transmettre les outils de la rhétorique aujourd’hui ? Dans quelle mesure l’apprentissage de l’incertitude et de la vulnérabilité constitue-t-il un enjeu rhétorique, mais aussi démocratique de premier ordre ?

Nous invitons les chercheurs en rhétorique, études culturelles, philosophie, littérature, linguistique, science politique, à nous faire parvenir d’ici le 26 février 2016 leurs propositions de communication (200-300 mots environ), à l’adresse suivante : j.petrulionyte@hmf.vdu.lt.

 

Langues du colloque : lituanien, anglais, français

 

Bibliographie indicative

 

- Amossy Ruth, Apologie de la polémique, Paris, PUF, coll. « L’interrogation philosophique », 2014.

- Angenot Marc, Dialogues de sourds. Traité de rhétorique antilogique, Paris, Éd. des Mille et Une nuits, coll. « Essais », 2008.

- Aubenque Pierre, La prudence chez Aristote, Paris, PUF, 1993 [1963].

- Buckley Irena, « La règle équivoque du jeu linguistique chez des élus : parler sert-il à exprimer ou bien à cacher sa pensée ? », dans J.-P. Dupouy, G. Lozachmeur, et al. (éd.), Le jeu de mots. De la cons-truction esthétique à la déconstruction transgressive, Univ. de Bretagne Occidentale, HCTI – Héritages et constructions dans le texte et l’image, 2012, p. 109-116.

- Danblon Emmanuelle, L’Homme rhétorique: culture, raison, action, Paris, Éd. du Cerf, 2013.

- Danblon Emmanuelle, Rhétorique et rationalité. Essai sur l’émergence de la critique et de la persuasion, Bruxelles, Éd. de l’Université de Bruxelles, 2002.

- Delannoi Gil, Éloge de la prudence. Essai, histoire, théorie, Paris, Berg International, coll. « Pensée Politique et Sciences Sociales », 1993.

- Dupréel Eugène, Les Sophistes. Protagoras, Gorgias, Prodicus, Hippias, Neuchâtel – Paris, Éd. du Griffon – PUF, coll. « Bibliothèque scientifique », 1948.

- Goyet Francis, Le sublime du lieu commun. L’invention de la rhétorique dans l’Antiquité et à la Renaissance, Paris, Honoré Champion, coll. « Bibliothèque littéraire de la Renaissance », 1996.

- Goyet Francis, ­Les Audaces de la prudence. Littérature et politique aux XVIe et XVIIe siècles, Paris, Éd. Classiques Garnier, coll. « Études Montaignistes », 2009.

- Gusdorf Georges, La Vertu de force, Paris, PUF, 1960 [1956].

- Gusdorf Georges, La Parole, Paris, PUF, 1953.

- Nicolas Loïc, « Exercer et pratiquer la rhétorique dans la tradition humaniste de l’École de Bruxelles : Auguste Baron, Eugène Dupréel, Chaïm Perelman », Exercices de rhétorique, n° 5 (dir. Victor Ferry et Benoît Sans), 2015. En ligne : http://rhetorique.revues.org/423.

- Nicolas Loïc, « L’épidictique de Chaïm Perelman : assise et pivot de l’édifice rhétorique », RIFL –Rivista Iitaliana di Filosofia del Linguaggio, numéro spécial « Les rhétoriques de la concorde », 2015, p. 33-47. En ligne : http://www.rifl.unical.it/index.php/rifl/article/view/251/240.

- Nicolas Loïc, « Rhetoric with a Human Face: Practicing and exercise argumentation for emancipation », Jo-Anne D. André (ed.), Borders without Boundaries: Research and Pedagogy in Writing and Discourse, CASDW, 2015, p. 82-95. En ligne : https://casdwacr.files.wordpress.com-/2015/06/casdw-proceedings-2014.pdf.

- Nicolas  Loïc, « L’évidence du complot : un défi à l’argumentation. Douter de tout pour ne plus douter du tout », AAD, n° 12, 2014. En ligne : http://aad.revues.org/1833.

- Nicolas Loïc, « L’exemple ambigu ou la phronèsis du phronimos », DICE, n° 8/2, 2011, p. 27-48. En ligne : http://www.diacronia.ro/ro/in­dexing/details/A4039/pdf.

- Nicolas Loïc et Emmanuel de Jonge, « Limites et ambiguïtés rhétoriques du discours pam­phlétaire : vers l’abandon d’une pratique sociale ? », dans Mots. Les langages du politique, ENS Éditions, n° 91, novembre 2009, p. 51-65. En ligne : http://mots.re­vues.org/19205.

- Nussbaum Martha, Les Émotions démocratiques. Comment former le citoyen du XXIe siècle ?, trad. Solange Chavel, Paris, Climats, 2011 [2010].

- Perelman Chaïm, L’Empire rhétorique. Rhétorique et argumentation, Paris, J. Vrin, 2002 [1977].

- Perelman Chaïm & Olbrechts-Tyteca Lucie, Traité de l’Argumentation. La Nouvelle Rhétorique, 5e éd., Bruxelles, Éd. de l’Université de Bruxelles, 2000 [1958].

- Reggiani Christelle, Éloquence du roman. Rhétorique, littérature et politique aux XIXe et XXe siècles, Genève, Droz, coll. « Histoire des idées et critique littéraire », 2008.

- Salazar Philippe-Joseph, L’hyperpolitique, une passion française, Paris, Klincksieck, coll. « Pouvoirs de persuasion », 2009.

- Sennett Richard, Ce que sait la main. La culture de l’artisanat, trad. Pierre-Emmanuel Dauzat, Paris, Albin Michel, 2010 [2008].

- Taleb Nassim Nicholas, Le Cygne Noir. La puissance de l’imprévisible, trad. Christine Rimoldy, Paris, Les Belles Lettres, 2012 [2007].

- Taleb Nassim Nicholas, Antifragile. Les bienfaits du désordre, trad. Lucien d’Azay et Christine Rimoldy avec la collaboration de l’auteur, Paris, Les Belles Lettres, 2013 [2012].

- Trédé Monique, Kairos : l’à-propos et l’occasion. Le mot et la notion, d’Homère à la fin du IVe siècle avant J.-C., Paris, Klincksieck, coll. « Études et commentaires », 1992.

- Vernant Jean-Pierre, Mythe et pensée chez les Grecs. Étude de psychologie historique, tome 2, Paris, François Maspero, 1978 [1965].

 

Au nom du comité d’organisation :

 

Prof. Irena Buckley

Vytauto Didžiojo universitetas (VDU)

Faculté des Humanités

Département de littérature lituanienne

i.buckley@hmf.vdu.lt

 

Dr. Loïc Nicolas

Université libre de Bruxelles (ULB)

Faculté de Lettres, Traduction et Communication

LaDisco, GRAL

loic.nicolas@ulb.ac.be

 

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International Conference: Rhetoric and the forms of european culture. From tradition to contemporary challenges.

Kaunas, 6-7 May 2016

 

Faculty of Humanities, Translation and Communication, LaDisco – The Université libre de Bruxelles

Department of Lithuanian Literature, Faculty of Humanities and the Department of Public Communication, Faculty of Political Science and Diplomacy – Vytautas Magnus University

 

Conference abstract

Today one of the privileged domains for research and bringing up-to-date rhetoric is cultural studies, which consider it not only as a social and linguistic phenomenon, but also as a cultural tool for the exercise of freedom in democracy. An epistemic rupture, which occurred in Europe on the threshold of the 18th and 19th centuries, resulted in the gradual abandonment of the rhetoric background that had prevailed until then. The analysis of recent developments shows, in many ways, a continuous tendency to minimize or obscure the consequences of such an abandonment. These consequences are related to the means at our disposal – especially the discursive ones – to orient ourselves and to make decisions in a hazy, uncertain, precarious world, while mobilizing resources of practical reason. Indeed, as the philosopher Chaïm Perelman said, it is above all the "contempt for rhetoric" and "forgetting the theory of argumentation, [which] led to the negation of practical reason"; led, in one way or another, to the war and contempt for people. Let’s admit, rhetoric can not be the prerogative of self-proclaimed ‘experts’ or the preserve of language specialists. Rhetoric, as Aristotle already assured, is a skill shared by all people; common to all citizens. A skill that is important precisely to learn to attend to in order to master it. Everyone should be able to build in conscience on the ancient technè of discourse in order to defend oneself and to accuse; to engage in or refuse the engagement; and not to remain without a voice other than that of violence. Without a concrete mastery of cultural tools of rhetoric, speech is doomed to being practiced haphazardly, without any method and, above all, without conscience. This is what we need to investigate as part of this conference.

Particular attention will be paid to the following issues:

- Hasn’t the doom of rhetoric contributed to making it even more difficult the resumption of universal forms of European culture?

- Is the practice of rhetoric a way to guard against fatal diversions of the facade consensus and the hollow verb?

- In what sense can rhetoric give access to European cultural sources capable to provide the contemporary public discourse with culturally richer intertexts?

- Can the concept of the sublime, formulated in antiquity, help us to overcome the pathetic dimension and declarative grandiloquence of contemporary public discourse?

- Is rhetoric, as taught at universities, engaged in the cultural tradition from which it sprang? Does the way we understand it meet the needs of a truly humanist citizen education?

- How to transmit the tools of rhetoric today? And why? To what extent does the apprenticeship of uncertainty and vulnerability constitute an issue of rhetoric and also a prime challenge for democracy?

 

We invite researchers in the areas of rhetoric, cultural studies, philosophy, literature, linguistics, political science to send their proposals (approx. 200-300 words) by February 26, 2016 to the following address: j.petrulionyte@hmf.vdu.lt.

Participants will be given 20 minutes for their presentations. Conference languages: English, French, Lithuanian.

The conference will take place on May 6 and 7 (Friday and Saturday), 2016 at Vytautas Magnus University (Small Hall) in Kaunas.

 

On behalf of the organizing committee:

 

Prof. Irena Buckley

Vytautas Magnus University (VMU)

Faculty of Humanities

Department of Lithuanian Literature

i.buckley@hmf.vdu.lt

 

Dr. Loïc Nicolas

Université libre de Bruxelles (ULB)

Faculté de Lettres, Traduction et Communication

LaDisco, GRAL

loic.nicolas@ulb.ac.be