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Appels à contributions
La rhétorique de la violence à la Renaissance

La rhétorique de la violence à la Renaissance

Publié le par Marion Moreau (Source : Pascale Drouet)

Appel à contribution pour le N°5 des Cahiers Shakespeare en devenir: La rhétorique de la violence à la Renaissance

Comment la violence s'exprime-t-elle dans la littérature et les arts de la Renaissance, et dans leurs adaptations et réappropriations postérieures ? Comment fait-on de la violence un outil d'intimidation, un instrument de persuasion ? Comment fait-on sentir sa puissance déterritorialisante, voire traumatisante ? Quelle en est la rhétorique littérale et métaphorique ? Ces questions peuvent se poser dans une perspective mono-disciplinaire et interdisciplinaire. Le croisement des genres et des modes d'expressions artistiques est une voie qu'il est nécessaire de confronter au traitement de la violence à l'intérieur d'un seul et même champ historique, philosophique, littéraire ou philologique. L'exploration du cadre théorique et langagier d'une poétique de la violence semble fondamentale pour aborder les questions d'esthétique et d'interprétation de la douleur reçue et infligée.

« I will speak daggers to her, but use none »
Cela pose la question du rapport entre violence et langage : à partir de quel seuil le discours produit-il une violence (et de quel type) sur son interlocuteur ? On pourra penser à l'injure, à la malédiction, à l'abus de la forme performative, mais aussi à la torture (le forcer-à-dire) et à la censure (le forcer-à-taire) qui peuvent déboucher sur des violences physiques. On pourra s'attacher aux manières d'exprimer cette violence et de dire comment elle est ressentie, à ses modes rhétoriques et génériques : à quel type de métaphores recourt-on (cannibalisme, images contre-nature, métaphores martiales, emprunts aux théâtres d'anatomie), quels genres (pamphlet politique, satire, tragédie de vengeance, tragédie domestique, tragédie de casibus) en procurent le cadre?

Cela pose aussi la question de la frontière entre violence physique et violence psychique, et de la représentation de la violence faite à l'intériorité, de la réception de la violence par l'intime. Si on sait représenter le corps souffrant (corps de suppliciés, étude de la torture, anatomie punitive, martyrologie), comment donne-t-on à voir le martyr psychique ? Le traitement des corps des condamnés, la symbolique du corps déformés par la douleur et de l'âme meurtrie par la violence psychique ouvrent la voie de réflexions sur l'impact sociétal, scientifique et philosophie d'un corps et d'une intériorité violentés. Autrement dit, comment et surtout pourquoi représente-t-on la violence ? Quels en sont les enjeux visuels et esthétiques, quels en sont les enjeux politiques ? On connaît, depuis Foucault, la nécessité de rendre le supplice publique, de rendre tout châtiment visible et lisible, de « faire éclater en plein jour le rapport de force qui donne son plein pouvoir à la loi » . La représentation de la violence est-elle indissociable des notions de pouvoir, d'exhibition et de théâtralisation, d'exorcisme et d'instrumentalisation ? Peut-on aussi s'intéresser à la rhétorique de la violence pour témoigner et peut-être dénoncer, aller à son encontre ? Quels sont alors les risques encourus ? Peut-on remettre en cause les pratiques violentes d'une société sans encourir d'effets talion ? Au théâtre, comment met-on en scène les actes de toute cruauté ? On pense d'emblée aux scènes clefs de Titus Andronicus et de King Lear. Comment les metteurs en scène trouvent-ils la juste mesure entre « théâtre de la cruauté » et grand-guignol ? Comment recrée-t-on un spectacle de l'effroi ? Où place-t-on la limite du supportable pour le spectateur ? Comment les rhétoriques dramaturgiques et linguistiques de la violence s'articulent-elles ? Quel impact le visuel ajoute-t-il ? On pourra aussi se demander ce qu'apportent à ce questionnement les adaptations cinématographiques contemporaines des pièces jacobéennes ?

Les abstracts (300-500 mots) sont à envoyer à Pascale Drouet (pascale.drouet@neuf.fr) et Nathalie Rivère de Carles (nrivere@univ-tlse2.fr) avant le 30 November 2010. Les articles (une fois l'abstract accepté) devront être envoyés, accompagnés d'une brève bio-biblio rédigée, d'une bibliographie, et d'un abstract en anglais, pour le 30 April 2011. Merci de suivre les consignes de la feuille de style des Cahiers Shakespeare en devenir (en ligne).