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"La Rhétorique de la polémique"

Publié le par Marielle Macé (Source : Loïc NICOLAS)

Communiqué :

Sous l'égide des Universités de Paris IV, de Bruxelles, de Gand ainsi que de l'EHESS, nous organisons un cycle de deux Journées d'étude (en juin et en octobre 2008) sur le thème suivant : "La Rhétorique du combat ou l'exercice de la polémique : Violence et persuasion dans le discours". Dans le cadre de ces rencontres scientifiques, dont le programme est en cours d'élaboration, nous serions tout particulièrement intéressés d'entendre de jeunes chercheurs travaillant d'une part (pour la session de juin) sur la Rhétorique des XVIIIe et XIXe siècles, d'autre part (pour la session d'octobre) sur l'Antiquité et la période médiévale. Luce ALBERT ATER Université Paris II Doctorant Université Paris IV / Université de Gand slalbert@free.fr Loïc NICOLAS  Aspirant au FNRS Doctorant EHESS / ULB Loic.Nicolas@ulb.ac.be --------------------------------------------------------------------------- La Rhétorique du combat ou l'exercice de la polémique Violence et persuasion dans le discours Journée d'étude – I 24 juin 2008 « Maison Suger » (16-18 rue Suger – Paris 6e) Luce Albert & Loïc Nicolas * * *             Cette journée d'étude constitue la première étape d'une série de trois rencontres scientifiques organisées autour de la « fonction critique » de la parole rhétorique. La deuxième journée doctorale qui aura lieu en octobre 2008 s'appliquera à poursuivre le travail débuté ici. Aussi, malgré la littérature existant sur le sujet, souvent d'un intérêt remarquable pour l'objet qui nous occupe, il nous a semblé profitable de reconsidérer le champ discursif de la polémique, afin d'en actualiser la définition par une investigation diachronique – de l'Antiquité à l'époque moderne – capable de révéler les contours et les régularités de cette production langagière d'apparence marginale. Toute l'ambition historique autant que théorique de la présente enquête est de parvenir à dresser l'état des lieux d'une question à la fois centrale et problématique dans le cadre d'une réflexion sur les conditions de la persuasion. Partant, le projet consiste d'une part à interroger les modalités pratiques d'une prise de parole primordialement caractérisée par l'attaque et l'opposition, voire la disqualification systématique de la parole d'un autre (adversaire réel ou imaginé) – ce que nous pourrions appeler l'usage vectorisé de la violence verbale –, d'autre part à analyser le dispositif rhétorique propre à légitimer le procès oratoire et favoriser la transaction du sens. Or, pour que le polémiste puisse prétendre, par son statut et sa posture éthiques, gagner l'auditoire, le rallier à ses vues, il ne peut renoncer à insérer son discours dans l'univers doxal des choses acceptables, ni à le soumettre aux attendus contractuels d'une rencontre sociale définie dans ses rites, comme dans ses codes. De fait, un tel dispositif semble exercer une contrainte générique et conventionnelle sur l'orateur, en instituant un sens de la mesure et de l'à-propos. La polémique prescrit ses règles et ses armes, impose ses conditions, son terrain d'action ou de réaction : un mot de trop, un tour mal pesé, et tout le projet rhétorique se trouve mis en échec faute d'une entente pérenne sur les enjeux et les fins du combat. Mais qu'en est-il des excès possibles, des dérives, des limites (sociales, morales, éthiques, techniques) de ces discours disposés en ordre de bataille et néanmoins en quête de reconnaissance et d'approbation ?  Nous faisons à ce propos l'hypothèse que la guerre par les mots, cette « guerre pour de rire », selon l'expression de Catherine Kerbrat-Orecchioni, demeure rhétorique dans son essence même, au sens où celle-là vise d'abord le dépassement de la violence physique, l'absorption du corps à corps dans le mot à mot. Qu'on tente de l'évacuer, de la dissimuler derrière une évidence fictive en faisant « comme si » tout allait de soi, ou, au contraire, qu'on la mette en scène ostensiblement à des fins stratégiques, la polémique demeure au coeur de l'entreprise oratoire. Elle constitue un horizon possible, une éventualité, une ressource circonstancielle disponible à la croisée des genres. C'est pourquoi négliger sa pertinence, son importance topique aurait pour effet de récuser l'idée essentielle suivant laquelle à l'origine et au fondement de tout discours réside une cause à gagner, un contradicteur à évincer, des arguments à contester, et, en fin de compte, un auditeur à persuader de la supériorité d'un dire inscrit dans une hiérarchie (souvent implicite) des valeurs et des préférences. Provocation, incitation à la réponse, une telle parole invite à la surenchère, à la contre-attaque, à la pointe, à la recherche de l'argument imparable – cette munition discursive – qui viendrait enfermer dans ses formes la bataille des mots, et clore le rapport de force entre des protagonistes plus ou moins bien dotés pour mener à son terme la joute verbale et soutenir cette situation instable sans vaciller. Ainsi inviterons-nous nos contributeurs – dont la présentation ne devra pas excéder 30 minutes – à réfléchir autour de problématiques transversales propres à nourrir le débat : Les excès du discours et les limites de la persuasion Processus de contournement et de dissimulation : les usages du « masque » Le topos de la « bouteille à la mer » ou la posture du seul contre tous Penser le(s) destinataire(s) du discours : places et représentations Stratégies de légitimation de la prise de parole en situation de lutte La place de la doxa dans le discours de combat Techniques et figures du dénigrement et de l'agression (l'attaque ad hominem, etc.) Stratégies argumentatives : entre réfutation et proposition Ressources rhétoriques et preuves subjectives : l'ethos et le pathos Bonnes ou mauvaises polémiques ? Cette première journée d'étude aura lieu à la « Maison Suger » qui constitue, au coeur du quartier latin, un espace privilégié pour la tenue d'événements scientifiques internationaux. Les organisateurs souhaitent remercier tout particulièrement l'École des Hautes Études en Sciences Sociales, ainsi que la Fondation Maison des Sciences de l'Homme pour l'aide apportée dans la réalisation de cette première rencontre. Les Actes des deux journées prévues en 2008 seront publiés dans un numéro spécial d'une revue thématique. Bibliographie indicative             a) Sources principales - Aristote, Les réfutations sophistiques, trad. Louis-André Dorion, préf. de Jacques Brunschwig, Paris – Laval, J. Vrin – Presses de  l'Université Laval, coll. « Histoire des doctrines de l'Antiquité classique », 1995 (476 p.). - Aristote, Rhétorique, trad. Médéric Dufour & André Wartelle, Paris, Les Belles Lettres, coll. Des Universités de France, 1967-1991 (3 vol.). - CicÉron, Divisions de l'art oratoire – Topiques, trad. Henri Bornecque, Paris, Les Belles Lettres, coll. des Universités de France, 1990 (117 p.). - Hermogène, L'Art Rhétorique – Exercices préparatoires, États de causes, Invention, Catégories stylistiques, Méthode de  l'habileté, trad. Michel Patillon, Paris, L'Âge d'Homme, coll. « Idea », 1997 (640 p.). - Perelman, Chaïm & Olbrechts-Tyteca, Lucie, Traité de l'argumentation (5e éd.), Bruxelles, Éd. de l'Université de Bruxelles, 1988 (734 p.). - Perelman, Chaïm, L'Empire rhétorique – Rhétorique et argumentation, Paris, J. Vrin, coll. « Bibliothèque d'histoire de la philosophie », 2002 (224 p.). - Quintilien, Institution oratoire, trad. Jean Cousin, Paris, Les Belles Lettres, coll. des Universités de France, 1975-1980 (7 vol.). b) Études théoriques - Angenot, Marc, Dialogues de sourds – Traité de rhétorique antilogique, Paris, Mille et une nuits, coll. « Essais », 2008 (455 p.). - Angenot, Marc, La Parole pamphlétaire – contribution à la typologie des discours modernes, Paris, Payot, 1982 (416 p.). - Boltanski, Luc, Claverie, Élisabeth, Offenstadt, Nicolas & Van Damme, Stéphane (éd.), Affaires, scandales et grandes causes – De Socrate à Pinochet, Paris, Stock, coll. « Les essais », 2007 (462 p.). - Boltanski, Luc, De la justification : les économies de la grandeur, Paris, Gallimard, coll. « Nrf – Essais », 1991 (485 p.). - Bourdieu, Pierre, Ce que parler veut dire – L'économie des échanges linguistiques, Paris, Fayard, 1982 (243 p.). - Cornilliat, François & Lockwood, Richard (éds.), Èthos et pathos – Le statut du sujet rhétorique, Actes du Colloque international de Saint-Denis (19-21 juin 1997), Paris, Honoré Champion, 2000 (413 p.). - Danblon, Emmanuelle, La fonction persuasive : anthropologie du discours rhétorique, origines et actualité, Paris, Armand Colin, coll. « U – Philosophie », 2005 (217 p.). - Danblon, Emmanuelle, Rhétorique et rationalité – Essai sur l'émergence de la critique et de la persuasion, Bruxelles, Éd. de l'Université de Bruxelles, coll. « Philosophie et Société », 2002 (264 p.). - Denis, Delphine (dir.), L'Obscurité : langage et herméneutique sous l'Ancien Régime, Louvain-la-Neuve, Bruyant-Academia, coll. « Au coeur des textes », 2007 (250 p.). - Denis, Delphine & Marcoin, Francis (éd.), L'admiration, Arras, Artois Presses Université, coll. « Manières de critiquer », 2004 (213 p.). - Declercq, Gilles, Murat, Michel & Dangel, Jacqueline (éd.), La parole polémique, Paris, Honoré Champion, coll. « Colloque, congrès et conférences – Époque moderne et contemporaine » (n°11), 2003 (549 p.). - Eemeren, Franz van & Grootendorst, Rob, La nouvelle dialectique, trad. S. Bruxelles, M. Doury et V. Traverso, coordonnée par Ch. Plantin, Paris, Éd. Kimé, coll. « Argumentation, sciences du langage », 1996 (251 p.). - Fumaroli, Marc (dir.), Histoire de la Rhétorique dans l'Europe moderne : 1450-1950, Paris, P.U.F., 1999 (1359 p.). - Galand-Hallyn, Perrine, Les yeux de l'éloquence : poétiques humanistes de l'évidence, Préface d'Alain Michel, Orléans, Paradigme, coll. « L'atelier de la Renaissance », 1995 (334 p.). - Galand-Hallyn, Perrine, Le reflet des fleurs : description et métalangage poétique d'Homère à la Renaissance, Genève, Droz, 1994 (662 p.). - Garand, Dominique, Portrait de l'agoniste : Gombrowicz, Montréal, Liber, 2003 (224 p.). - Garand, Dominique, « Propositions méthodologiques pour l'étude du polémique », dans États du polémique, Dominique Garand & Annette Hayward (éd.), Les cahiers du centre de recherche en littérature québécoise, n°22, Montréal, Nota Bene, 1998, p. 211-268. - Garand, Dominique, La griffe du polémique – Le conflit entre régionalistes et exotiques au Québec, Montréal, L'Hexagone, coll. « Essais littéraires », 1989 (244 p.).  - Hallyn, Fernand, Descartes – Dissimulation et ironie, Genève, Droz, 2006 (216 p.). - Hallyn, Fernand, Les structures rhétoriques de la science : de Kepler à Maxwell, Paris, Éd. du Seuil, coll. « Des travaux », 2004 (321 p.). - Koselleck, Reinhart, Le Règne de la Critique, Paris, éd. de Minuit, 1979 (192 p.). - Le Discours polémique, Centre de Recherches Linguistiques et Sémiologiques de Lyon, Presses Universitaires de Lyon, 1980 (153 pages). - Larochelle, Marie-Hélène (dir.), Invectives et violences verbales dans le discours littéraire, Sainte-Foy, Presses de      l'Université Laval, 2007 (234 p.). - Lévy, Carlos & Pernot, Laurent, Dire l'évidence : philosophie et rhétorique antiques, Paris – Montréal, L'Harmattan, coll. « Cahiers de Philosophie de l'Université Paris XII », 1997 (447 p.). - Lévy, Carlos, Cicero academicus : Recherches sur les « Académiques » et sur la philosophie cicéronienne, Paris – Rome, École Française de Rome – De Boccard, 1992 (697 p.). - Roellenbleck, Georg (éd.), Le Discours polémique – Aspects théoriques et interprétations, Tübingen – Paris, Gunter Narr – Jean-Michel Place, coll. « études littéraires françaises », 1985 (99 p.). - Roussin, Philippe (dir.), Critique et affaires de blasphème à l'époque des Lumières, Paris, Honoré Champion, 1998 (270 p.). Comité scientifique - Luc Boltanski (Directeur d'études à l'EHESS) - Emmanuelle Danblon (Chercheur qualifié au FNRS / Université Libre de Bruxelles) - Delphine Denis (Professeur à l'Université Paris IV) - Perrine Galand-Hallyn (Directeur d'études à l'EPHE) - Fernand Hallyn (Professeur à l'Université de Gand) - Carlos Lévy (Professeur à l'Université Paris IV) - Luce Albert (Université de Gand / Université Paris IV) - Loïc Nicolas (FNRS – Université Libre de Bruxelles / EHESS) Contacts Luce Albert : slalbert@free.fr Loïc Nicolas : loic.nicolas@ulb.ac.be