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La Référence

La Référence

Publié le par Emilien Sermier (Source : Emilie Lucas-Leclin)

 

Appel à communication du N°18 de la Revue TRANS-

La référence

 

Mise à l’index par les tenants de l’autoréférence, à l’instar de Ricardou qui va jusqu’à la qualifier de « part obscurantiste de la représentation », la référence a longtemps été utilisée comme contre-modèle et associée à l’illusion stérile d’une lecture bovaryste. Bien que souvent pensée comme simple support de la relation mimétique, notamment par l’entremise de la « fonction référentielle » de Jakobson, la référence ne peut cependant pas négliger le fonds d’emprunts sur lequel elle repose. Qu’elles prennent la forme de citations ou d’allusions, qu’elles fassent figure d’autorité ou qu’elles permettent de dénoter un monde, ces références nécessitent le rapport à un objet extérieur, la construction d’une relation de connivence mais aussi le partage d’un contexte commun. Ce sont ces relations multiples entre le lecteur, le monde et le livre que nous souhaitons explorer dans ce numéro.

Penser l’érudition littéraire mène par exemple à relativiser l’idée de la nécessaire réalité du substrat référentiel. Depuis la Satire Ménippée, nombre de fictions manipulent le renversement du rapport au réel entraîné par les recherches érudites (Flaubert), les citations (Mark Z. Danielewski, Pierre Senges), les digressions (Sterne, Diderot), les réécritures (Joyce), ou les parodies (Scarron) : là où le monde est d’abord un livre, la référence interroge le caractère de fictionnalité de ces textes construits au second degré. Pensée selon un mode légèrement différent, la théorie des mondes possibles (T. Pavel, V. Dolezel) repose quant à elle sur une conception de la fiction comme monde stipulé à partir de références à la fois actuelles, fictionnelles et empruntées à d’autres univers (F. Lavocat). Ces possibles référentiels de la fiction (Jorge Luis Borges, Philip K. Dick, Haruki Murakami) vont jusqu’à être essentialisés par Nelson Goodman pour penser le réel. En évoquant la référence actuelle comme version parmi d’autres, il s’agirait alors de nier toute essence du monde hors d’une construction ou d’un accès. Cette position est cependant vivement mise en question par des penseurs contemporains qui, à travers un « matérialisme spéculatif » (Quentin Meillassoux) ou une ontologie « plate » (Graham Harman, Tristan Garcia), souhaitent sortir de la dépendance absolue entre le monde et sa représentation, entre la chose et le sujet. Comment envisager l’œuvre littéraire et artistique dans ce champ de tensions critiques ?

La notion de référence est au cœur de ces enjeux. Entre construction ou préexistence du monde, il s’agit moins d’envisager la représentation mimétique que les conditions d’existence et/ou d’accès à un espace référentiel. Ne pourrait-t-on pas en définitive considérer le rapport de la fiction au monde et à ses objets à la fois au-delà de la simple représentation d’un réel empirique et en-deçà du relativisme absolu de la pensée postmoderne ?

 

Ce sujet n’est exclusif d’aucun genre littéraire ni d’aucune période, et peut ouvrir à des comparaisons avec les autres arts : seule la perspective comparatiste est requise. Les propositions de communication (3000 signes), accompagnées d’une brève bibliographie et d’une courte présentation du rédacteur, doivent être envoyées avant le 19 mai 2014 en fichier word à l’adresse : lgcrevue@gmail.com. Les articles retenus seront à envoyer pour le 8 septembre 2014. Nous rappelons que la Revue de littérature générale et comparée TRANS- accepte les articles rédigés en français, anglais et espagnol.

 

 

The reference

 

The reference, repudiated by proponents of the self-reference, such as JeanRicardou, who goes as far as qualifying it as the “obscurantist part of representation,”has long been utilized as a counter-example and associated with the sterile illusion of a bovarist reading.Although it has often been regarded as a reinforcement of the mimetic relation, notably by way of Roman Jakobson’s “referential function,” the reference cannot neglect the foundation of borrowings on which it rests. Whether they take the form of quotations or allusions, with authoritative value or the capacity to denote a world, these references need the relation with an external object, the construction of aconniving relationship and also a sharing of a common context. These multiple relationships between the reader, the world and the book are what we wish to explore in this issue.

            A consideration of literary erudition leads, for example, to relativizing the idea of the necessary reality of a referential substratum. Beginning with Menippean satire, numerous fictions manipulate the inversion of the relation with the real provoked by erudite research (Flaubert), quotations (Mark Z. Danielewski, Pierre Senges), digressions (Sterne, Diderot), rewritings (Joyce) or parodies (Scarron):where the world is first and foremost a book, the reference questions the fictional character of these figuratively constructed texts. Considered according to a slightly different mode, the theory of possible worlds (ThomasPavel, LubomírDoležel) rests on a concept of fiction as world based on references that are current, fictional, and borrowed from other universes (FrançoiseLavocat). These referential possibilities of fiction (Jorge Luis Borges, Philip K. Dick, Haruki Murakami) are taken to the point of being essentialized by Nelson Goodman in order to think the real.  By evoking the present reference as one version among others, it negates any essence of the world beyond that of a construction or an access. This position is sharply criticized by contemporary thinkers who, by means of a “speculative materialism” (Quentin Meillassoux) or a “flat” ontology (Graham Harman, Tristan Garcia), wish to break from the absolute dependence between the world and its representation, between the thing and the subject. How are literary and artistic works envisaged in this field of critical tensions?

            The concept of reference is at the heart of these debates. Between the world’s construction orpreexistence, it is less a matter of considering mimetic representation than the conditions of existence and/or access to a referential space. Ultimately couldn’t fiction’s relationto the world and its objects be considered beyond the simple representation of an empirical real and yetshort of the absolute relativism of postmodern thought?

            This topic is open toall literary genres and periods as well as to comparisons with other arts: the only requirement is a comparative perspective. Proposals for contributions (3000 characters or 500 words), accompanied by a brief bibliography and a short author’s note should be sent in Word format before May 19, 2014 to lgcrevue@gmail.com. Selected articles must be sent by September 8, 2014.  The Journal of General and Comparative Literature TRANS- accepts articles written in French, English and Spanish.

 

 

La referencia

 

            Condenada al ostracismo por los partidarios de la autoreferencia, como Ricardou, quien llega a calificarla de “parte obscurantista de la representación”, la referencia ha sido utilizada durante largo tiempo como antimodelo y asociada a la ilusión estéril de una lectura bovarista. Aunque haya sido pensada a menudo como un simple soporte de la relación mimética, especialmente por medio de la “función referencial” de Jakobson, la referencia no puede, sin embargo, ignorar los fundamentos sobre los que se apoya. Ya tomen la forma de citas o de alusiones, ya tengan valor de autoridad o permitan denotar el mundo, estas referenciasnecesitan la relación con un objeto exterior, la construcción de una relación de connivencia pero también el compartir un contexto común. Son precisamente esas relaciones múltiples entre el lector, el mundo y el libro las que deseamos explorar en este número.

            Pensar la erudición literaria conduce por ejemplo a relativizar la idea de la realidad necesaria de un sustrato referencial. A partir de la Satira Menipea, numerosas ficciones manipulan la inversión de la relación con lo real provocado por las investigaciones eruditas (Flaubert), las citas (Mark Z. Danielewski, Pierre Senges), las digresiones (Sterne, Diderot), las rescrituras (Joyce) o las parodias (Scarron): allí donde el mundo es, antes que nada, un libro la referencia cuestiona el carácter ficcional de estos textos construidos en segundo grado. Pensada de modo ligeramente diferente, la teoría de los mundos posibles (T. Pavel, V. Dolezel) se basa por su parte en una concepción de la ficción como un mundo estipulado a partir de referencias a la vez actuales, ficcionales y tomadas de otros universos (F. Lavocat). Esas posibilidades referenciales de la ficción (Jorge Luis Borges, Philip K. Dick, HarukiMurakami) llegan incluso a ser esencializadas por Nelson Goodman para pensar lo real. Al evocar la referencia actual como una versión entre otras muchas, se trataría entonces de negar cualquier esencia del mundo más allá de una construcción o de un acceso. Dicha posición es objeto de vivas críticas por parte de pensadores contemporáneos que, por medio de un “materialismo especulativo” (Quentin Meillaussoux) o una ontología “plana” (Graham Harman, Tristan García) desean salir de la dependencia absoluta entre el mundo y su representación, entre la cosa y el sujeto. ¿Cómo considerar la obra literaria y artística en este campo de tensiones críticas?

            La noción de referencia se halla en el centro de estos debates. Entre construcción o preexistencia del mundo, no se trata tanto de considerar la representación mimética como las condiciones de existencia y/o de acceso a un espacio referencial. No cabría en definitiva analizar la relación de la ficción con el mundo y sus objetos a la vez más allá de la simple representación de una realidad empírica sin incurrir en el relativismo absoluto del pensamiento posmoderno?

            Este tema no excluye ningún género literario ni ningún periodo y puede dar lugar a comparaciones con otros artes: el único requisito es una perspectiva comparatista. Las propuestas de colaboración (3000 signos), acompañadas de una breve bibliografía y de una corta presentación del redactor deben enviarse antes del 19 de mayo de 2014 en formato Word a la dirección lgcrevue@gmail.com. Los artículos seleccionados habrán de ser enviados el 8 de septiembre de 2014. Recordamos que la Revista de literatura general y comparada TRANS- acepta los artículos redactados en francés, inglés y español.