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La parole politique des artistes

La parole politique des artistes

Publié le par Bérenger Boulay

Colloque "Laparole politique desartistes": jeudi 25 septembre prochain à la MSH ParisNord

Matinée : 9h00 – 12h30 : La parole et le geste artistiques, enjeux de politiques

Accueil et ouverture : Christine CADOT et Violaine ROUSSEL, Université Paris VIII

Présidence : Geneviève KOUBI, Professeur de droit public, Université Paris VIII

Session 1 : 9h30 – 11h : La parole artistique aux prises avec ses usages politiques


• Laure BLEVIS, Maître de conférences en sociologie à l'Université Paris X et Claire ZALC, chargée de recherche au CNRS :
« Ce que l'art fait au discours scientifique. Retour sur une expériencede commissariat d'exposition au sein de la Cité Nationale de l'Histoirede l'Immigration »

Cetteintervention est à la croisée de l'analyse sociologique et du simpletémoignage : de 2006 à 2008, nous avons travaillé comme commissairesassociées sur l'exposition inaugurale de la Cité Nationale del'Histoire de l'Immigration. Institution dédiée à l'histoire, avec uneambition d'enseignement civique, la CNHI souhaitait par cetteexposition portant sur les étrangers au temps de l'exposition colonialerépondre à une série de critiques concernant le lieu même de soninstallation, le Palais de la Porte Dorée, ancien musée des coloniesbâti précisément pour l'exposition coloniale de 1931. L'expositionavait pour objectif, selon ses commanditaires, de rappeler cetteorigine, et donc d'évoquer l'exposition coloniale internationale, maisplus encore de creuser, à travers cette entrée, la question desrelations entre immigration et colonisation.
Au sein d'uncommissariat résolument pluridisciplinaire, nous avons dû nousconfronter et nous affronter à d'autres savoirs-faire, à d'autreslogiques disciplinaires, en particulier à la pensée muséographique. Làoù nos réflexes et habitudes de sociologues et d'historiennes nousincitaient à la prudence et à la nuance, souhaitant avant tout plongerle visiteur dans la réalité de la présence étrangère en France en 1931,ce qui impliquait d'exposer non seulement des documents d'archives,mais également des cartes et des graphiques statistiques, leshistoriens de l'art et les spécialistes de muséographie nousrépondaient que de tels documents étaient illisibles, plats (puisqu'àdeux dimensions) et surtout inesthétiques. A partir de cetteexpérience, cette intervention tâchera donc de réfléchir sur lestensions entre logiques scientifiques, politiques et artistiques àl'oeuvre dans une exposition à visée civique et pédagogique.

• Sarah GENSBURGER, Post-doctorante à l'Institut des sciences sociales du politique :
« Les artistes dans les ‘politiques de la mémoire' : un engagement contesté »

Vikki BELL, Professeur de sociologie, Goldsmiths College, University of London :
« Aesthetics, Law and the Nomos: Artworks in Transitional Argentina ».

Cetteintervention examine le rôle que l'art visuel contemporain et lesartistes-militants ont joué dans l'Argentine en transition, en partantde l'idée qu'ils peuvent être compris comme engagés dans la mise enscène d'un changement de grande ampleur suggéré par le terme‘transition'. Nous avons choisi trois points d'entrée dans cetteexploration, constituant trois sections : tout d'abord, les débatsautour de l'avenir du bâtiment Escula de Mechanica de la Armada(ESMA) à Buenos Aires, qui fut utilisé comme centre de détention etd'extermination clandestines pendant la dictature (76-83), et letravail du photographe Marcelo Brodsky en relation avec ces débats ; ensuite, le projet de mémorial toujours en construction à Buenos Aires,El Parque de la Memoria ; et enfin la ré-exposition en 2006 depièces d'art visuel de la période de la dictature, rassemblées dansl'exposition collective Cuerpo y Materia (2006, commissaired'exposition : María Terese Constantín), inscrite dans la commémorationpublique du 30e anniversaire du coup militaire. Nous voulons suggérerque ces trois terrains touchent à des questions de mémoire, detemporalité et d'appartenance qui sont à la fois normatives etpotentiellement créatrices du monde au sens de Robert Cover. End'autres termes, ils font tout autant que les mécanismes légaux formelspartie du processus complexe de transition.

Thiscontribution considers the role that contemporary visual art andactivist-artists have played in transitional Argentina, beginning fromthe premise that they might be understood as involved in the staging ofa wide-ranging shift implied by the term transition.  We have chosenthree points of entry into this exploration, discussed in threesections: first, the debates around the future of the building Esculade Mechanica de la Armada (ESMA) in Buenos Aires, which was used as aclandestine detention and extermination centre during the dictatorship(1976-83) and the work of the photographer Marcelo Brodsky in relationto those debates; secondly, the memorial project that is El Parque dela Memoria, which is still under construction in Buenos Aires, andthirdly, the 2006 re-exhibition of visual artworks from the period ofthe dictatorship (1976-83) brought together as the group show Cuerpo yMateria (2006), curated by María Terese Constantín as part of thepublic marking of the 30th anniversary of the military coup.  We wishto suggest that these three sites engage questions of memory,temporality and membership that are both normative and, potentially,world-making in Robert Cover's sense.  In other words they are as mucha part of the complex enactment of any transition as are the formallegal mechanisms.


Session 2 : 11h15-12h30 : Paroles d'artistes en contexte d'instabilité politique


• Anemona CONSTANTIN, Allocatairemonitrice à l'Université Paris X:
« Le 'fascisme' dépolitisé ou la radicalisation à l'extrême droite des jeunes écrivains roumains des années 1930 ».

Le27 juin 1927 se créait à Iasi, une des villes les plus importantes deRoumanie, la « Légion de l'Archange Michel ». Dix ans plus tard, d'unesecte mystique à ses débuts, la Légion était devenue la troisième forcepolitique du pays. Le discours ultranationaliste et les méthodesd'action violentes lui ont valu, tant de la part des contemporains quedes historiens de la période ultérieurement, l'étiquette de« fasciste ». Parmi ses adeptes, nombre de jeunes intellectuels del'entre-deux-guerres, s'auto-désignant comme la « Jeune génération »,dont les plus connus restent à présent Mircea Eliade (historien desreligions), Emil Cioran (philosophe) ou Constantion Noica (philosophe),lui ont voué une admiration sans bornes. Contrairement aux approchesqui évaluent trop souvent ces engagements d'un point de vue éthique etsous un angle individuel, notre analyse propose d'en rendre compte eninterrogeant les conditions de possibilité qui ont présidé auralliement de la « Jeune génération » au fascisme. Inspiré par unesociologie des intellectuels (F. Matonti, H. Serry, Ch. Charle) quichoisit l'engagement militant comme angle d'attaque opérant pouréclairer les modalités utilisées par les acteurs afin de concilier unedouble appartenance –professionnelle et politique-, vécue souvent commecontradictoire, le cas de la « Jeune génération » nous permettra derevenir sur les conceptions mécanistes qui établissent une corrélationévidente entre la position de dominé et le choix d'un répertoired'action spécifique. A travers l'analyse de la production  d'unevariante locale et dépolitisée de « fascisme » qui trouve sa raisond'être dans les conditions d'existence sociohistoriques,intellectuelles et politiques de la Roumanie des années 1930, notreenquête nous donnera également la possibilité de dépasser le préjugéselon lequel il serait impossible de comprendre comment des« intellectuels ont pu manifester un tel enthousiasme pour des idéesprofondément anti-intellectuelles» (Alexandru Paleologu). 


Discussion : Laure DE VERDALLE, CNRS Laboratoire Printemps, UVSQ


Après-midi : 14h00-19h00 : Mobilisations d'artistes en politique

Présidence :Gérard MAIRET, Professeur de philosophie, Université Paris VIII

Session 3 : 14h00 – 16h10 : Parler pour les « sans-voix »

Jean-Gabriel CONTAMIN, Professeur de science politique, Ceraps, Université Lille II :
« La parole politique des artistes : entre légitimité et illégitimation: L'exemple de la pétition des cinéastes contre le projet de loi Debré–février 1997 »

Le12 février 1997, une cinquantaine de ‘jeunes' cinéastes françaisrendent public un appel à la désobéissance dans lequel ils mettent encause certains articles du projet de loi Debré sur l'immigration alorsen discussion si celui-ci venait à être voté. Les spécificités de cetappel (sa forme corporative pour une cause qui le semble moins, l'échomédiatique et les controverses publiques dont il est l'objet, la forceinédite de la mobilisation qui s'ensuit, le choix final del'autodissolution du collectif) en font une entrée particulièrementféconde pour s'interroger sur les facteurs et les conditions delégitimité et d'illégitimation de la parole des artistes quand elle sefait politique, quand elle se fait la voix des sans-voix dans l'espacepublic. Cette contribution visera donc, à partir de cette mobilisation,à questionner tout à la fois les conditions de possibilité et lesconditions de recevabilité de cette prise de parole artistique enpolitique, en la rapportant notamment à la diversité des universlargement autonomes dans laquelle elle est produite et véhiculée.

• Sandra TRIGANO, Doctorante, Modys, Université de Saint Etienne :
« La mise en scène du corps ouvriers comme geste politique »

Nousnous proposons de montrer comment la mise en scène du corps ouvriercontribue à la formulation d'une parole politique de la part demetteurs en scène rencontrés dans le cadre d'une enquête réalisée dansNord-Pas-de-Calais. Nous postulons que le propos de ces metteurs enscène est proche de la critique de la théorie de la domination telleque l'a, par exemple, formulée James Scott. Le traitement de laquestion du corps ouvrier leur permet de dénoncer certains aspects dela condition ouvrière mais aussi d'afficher une proximité avec leurpropre situation d'artiste (utilisation du corps comme outil detravail, précarité professionnelle, …)

Sophie BARREAU, Doctorante, CERLIS, Université Paris III :
« Les usages politiques de l'art cinématographique documentaire : le film comme outil de changement social »

Lecinéma documentaire représente un genre artistique pleinement impliquédans les problématiques politiques par les fonctions de représentation,de « document » de la réalité qu'il remplit. Ses auteurs et sesthématiques principales s'inscrivent traditionnellement dans uneperspective sociopolitique, qui n'est pas neutre, revendiquée par lesdocumentaristes eux-mêmes comme partisane. Ils consacrent généralementleurs sujets à ceux qui ne possèdent pas de parole dans l'espacepublic. Dans quelle mesure le cinéma documentaire participe t-ilfortement pour ses acteurs d'un engagement citoyen ?
De surcroît,nous observons, depuis la fin des années 1980, l'organisationprogressive des professionnels du documentaire autour d'une critique dela politique publique audiovisuelle française et de l'affaiblissementde ses objectifs culturels. 
Dans une perspective historique, nous relierons les usages politiquesde l'art cinématographique documentaire à l'évolution des rapports quece dernier entretient avec les politiques culturelles etaudiovisuelles.

Discussion : Bleuwenn LECHAUX, Université de Rennes I

Session 4 :16h20 – 18h30 : La politique dans les formes artistiques : éclairages américains

Michael KAMMEN, Professeur d'histoire et de culture américaines, Cornell University :
« The Changing Political Agendas and Perspectives of American Artists, 1812-1972 »

Bienqu'initialement politisés par le nationalisme des débuts de laRépublique - un mouvement qui a persisté durant la plus grande partiedu XIXe siècle – les artistes américains depuis la Deuxième Guerremondiale ont tendu à être bien souvent étonnamment apolitiques, toutparticulièrement les expressionnistes abstraits et les artistes pop, endépit de certains usages de leur art par d'autres dans des buts depropagande durant la Guerre froide. A la fin des années 1960, quandcertains artistes américains ont pris la parole, ils ont tendu à suivrele modèle d'européens, tels que Hans Haacke  et certains français quis'étaient radicalisés avant même 1968.

Althoughinitially politicized by nationalism during the early Republic, a trendthat persisted for much of the nineteenth century, American artistssince World War II have quite often tended to be surprisinglyapolitical, especially the Abstract Expressionists and Pop artists,despite some of the ways in which their art was mobilized by others forpropaganda purposes during the Cold War.  During the later 1960s, whensome American artists became vocal activists, they tended to follow thelead of Europeans, such as Hans Haacke as well as French nationals whohad been radicalized even prior to 1968.

Jean-Pierre ESQUENAZI, Professeur d'information et communication, Université de Lyon III :
« Enjeux politiques et sociaux dans la série américaine Law and Order : entre logiques commerciales et engagement désintéressé »

L'indigencede notre compréhension de la scène culturelle américaine rend trèsdifficile de comprendre comment et pourquoi certains produits culturelsconstituent des interventions politiques importantes sur cette scène.Difficile de percevoir pour nous, par exemple, combien le libéralGeorges Lucas tient un discours peu discret autour de la conception dela démocratie d'un Georges Bush. Pourtant un regard quelque précispermettrait de mettre en question notre modèle canonique et ardorniende l'art engagé se révoltant seul contre l'ordre établi.
Jevoudrais dans cette intervention prendre l'exemple de Dick Wolf,scénariste et producteur dont le nom est célèbre dans les facultés dedroit américaine, puisque sa série Law and Orderconstitue une référence de la réflexion en matière juridique, ce quin'empêche pas en même temps celle-ci d'être un produit grand publicdiffusée par NBC (la plus grande longévité de toutes les sériesaméricaines actuelles, 17 saisons à 22 épisodes). Dans cette série,puis dans les séries qui lui sont associées, Law & Order : Special Victims Unit etLaw & Order : Criminal Intent,les réflexions autour de problèmes juridiques et moraux se multiplient,toujours présentées à l'intérieur d'un double point de vue par leshéros eux-mêmes ou souvent contre les héros. Particulièrement lesévénements du 11 septembre et la réaction qu'ils ont suscité de la partdu gouvernement Bush ont suscité immédiatement (le premier épisode surle sujet date de décembre 2001) des épisodes qui mettaient en doute lebien fondé ou discutaient les conséquences de cette politique.
Jeprésenterai d'abord le contexte de la production télévisuelle américainet l'habitude prise puis longtemps ─ explicitement de puis les annéessoixante dix ─ de discuter grâce à travers la fiction des enjeuxsociaux, historiques, juridiques du pays. Je montrerai également lerôle joué par certaines individualités comme Steven Bochco ou DickKelley dans cet usage de la télévision.
Puis je passerai en revue les quelques épisodes des deux séries oùl'état des Etats-Unis après le 11 septembre est explicitement discuté.L'on verra comment non seulement les problèmes posés le sont à traversdes narrations exemplifiantes tout à fait remarquables, mais commentils sont discutés et argumentés grâce en particulier à la mise en scènede l'aire judiciaire.
Enfin j'essaierai de tirer quelques conséquences de cette descriptionpour notre champ culturel français. En particulier, sera examiné lecoût culturel et politique d'un mythe : celui de l'entretien de labarrière mythique entre arts classiques et « arts de masse », entreégalement deux conceptions de la production culturelle, l'uneparfaitement désintéressée (financièrement) et vouée à l'exercice d'unpouvoir (seulement symbolique) et l'autre désespérément commercial.

François BRUNET, Professeur d'études américaines, Université Paris VII :
« Photographie et écologie aux Etats-Unis: le discours au secours des images ? »

Ilexiste dans la tradition artistique nord-américaine un lien ancien etvigoureux entre paysagistes et écologistes, les deux rôles ayant étéparfois réunis chez un individu (Thomas Cole en peinture, Ansel Adamsen photographie); cette liaison s'est précisée depuis les années 1970dans toute une série de pratiques photographiques liées au militantismeenvironnementaliste. Cette communication s'attelle à la question desavoir quel(s) rôle(s) les images elles-mêmes ont pu jouer dans cesengagements, et si ce n'est pas plutôt dans bien des cas le discoursdes artistes — voire celui des historiens et critiques  et plusgénéralement des faits d'usage et de contexte — qui ont explicité descontenus ou des intentions politiques que les oeuvres tendaient nonseulement à laisser dans le doute mais parfois à contredire. Troisétapes sont étudiées qui permettent d'esquisser une histoire de cetteproblématique. 
a) La création du Parc National de Yellowstone(1872), laquelle aurait été acquise, selon une légendehistoriographique, grâce à des distributions opportunes au Congrès dephotographies du paysagiste-explorateur William H. Jackson. 
b) L'oeuvre et la carrière d'Ansel Adams, qui trahit le paradoxe d'unephotographie de paysage ultra-soignée dont l'aspect classique etconsensuel dessert le message conservationniste qui la sous-tend. 
c) Plusieurs ouvrages et expositions récents (1975-2000) qui ont réunides oeuvres illustrant soit la démystification-déconstruction du grandpaysage iconique soit les diverses modalités de l'altération et de ladestruction des paysages naturels, mais conservant des aspects despectaculaire et de fini léché qui semblent contrevenir au "message" deleurs auteurs. 

Discussion : Bruno PEQUIGNOT, Université Paris III, CERLIS

Conclusion : Philippe BOUQUILLION, Professeur d'information et de communication à l'Université Paris VIII

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Accèsaucolloque :
MSH ParisNord,
4 rue de laCroix Faron, Plaine Saint Denis, 93210 Saint Denis

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Depuis le RER :sortieavenue du Président Wilson. Traversez le square des Droits de l'enfant,tournezà gauche, et tout de suite à droite, passage Boisé. Continuez toujourstoutdroit. Après le passage sous un immeuble, prenez la rue sur votredroite, ruedes Blés, puis au bout à gauche, rue de la Croix Faron.

Au n°4 : sonnez àl'interphone « MSH Paris Nord » et suivez l'accès fléché (via lepatio du premier étage) pour accéder à nos locaux.


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