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« La naturalisation de l’esthétique » (Nouvelle revue d’esthétique, PUF)

« La naturalisation de l’esthétique » (Nouvelle revue d’esthétique, PUF)

Publié le par Alexandre Gefen

« La naturalisation de l’esthétique »

En tentant le « franchissement du gouffre entre matière et conscience » selon Jacques Morizot, les sciences cognitives, dans une triade constituée par la psychologie expérimentale, les neurosciences et théorie de l’information, déploient désormais une variété de niveaux d’analyse et de champs d’expertise, qu’il s’agisse de s’intéresser aux supports moléculaires, cellulaires, neuronaux, comportementaux, sociaux, voire anthropologiques, de la cognition humaine et donc de l’art. Elles s’enrichissent de l’évolutionnisme darwinien, qui propose de montrer comment l’art participe de la nature de l’homme en temps qu’espèce et de son évolution, qu’il s’agisse d’expliquer les aptitudes esthétiques en tant que compétence biologique parasite ou d’aptitude élaborée d’adaptation à un milieu, puis d’analyser en quoi les représentations esthétiques illustrent, exemplifient ou modélisent le jeu de forces biologiques. Au nom d’un naturalisme philosophique et d’un positivisme scientifique, il s’agit de donc décréter que le substrat ultime des faits mentaux est physique, naturel, et que les déterminismes ultimes sont génétiques. Dans le cadre de ce que Quine nomme une « épistémologie naturalisée » le seul ancrage théorique de compréhension de notre savoir, son fondement, doit être celui de la cognition humaine, en tant que phénomène naturel explicable in fine par les sciences, sans recours à des modèles externes métaphysiques ou linguistiques, ce qui impose à l’esthétique « d’employer les ressources des sciences de la nature » (Quine).

Avec le support d’autres champs novateurs, comme l’écopoétique ou la philosophie de l’animal, qui cherchent à confronter la philosophie esthétique à des champs aussi éloignés en apparence que l’éthologie et les sciences environnementales, c’est à un décentrement disciplinaire et épistémologique massif que nous assistons. Au nom de ce paradigme qui relève pour Jean-Marie Schaeffer de « la fin de l’exception humaine », il incomberait à la philosophie esthétique de proposer la naissance d’une nouvelle science de l’art. Assistons-nous, en réponse à l’artialisation de la nature, à une naturalisation de l’art ? En se confrontant frontalement aux études culturelles, comme aux paradigmes antérieurs, de la psychanalyse à l’historicisme, les théoriciens de la naturalisation de l’art se sont opposés aux postures défendant l’insularité et le caractère différentiel des pratiques artistiques en fournissant au contraire un cadre inclusif de compréhension propre à faire aussi massivement bouger les frontières académiques et sociologiques de la recherche que son espace disciplinaire. Peut-on ainsi parler, à la suite de Jonathan Gottschalll de « nouvelles humanités », justifiées par l’échec supposé des sciences humaines face aux exigences scientifiques dans lesquelles elles avaient déclaré s’inscrire au moment du linguistic turn ?

Cette naturalisation de l’art offre des propositions épistémologiques autant qu’institutionnelles séduisantes, en permettant de justifier la place de la philosophie esthétique et de la théorie littéraire dans l’institution, comme, plus généralement, celle du créateur dans la société. Mais elle s’est exposée à de virulentes critiques : réductionnisme, conservatisme, utilitarisme, essentialisme, scientisme, etc. C’est à un examen serein des propositions disciplinaires avancées, dans toute leur richesse et leur ampleur épistémologique, comme au débat sur les enjeux des déplacements possiblement produit par la naturalisation de l’art, que ce numéro voudrait contribuer.

Numéro coordonné par Alexandre Gefen (alexandre.gefen@paris-sorbonne.fr).

La Nouvelle revue d’esthétique :

La Nouvelle revue d'esthétique s'inscrit dans la tradition d'une réflexion sur l'art, réflexion ouverte qui privilégie les œuvres et tente de les penser pour ce qu'elles montrent. Réflexion qui a pour objet le domaine de l'art avec tout ce qu'il comprend : aussi bien les œuvres elles-mêmes que le travail qu'engendrent ces œuvres (critique, histoire, théories) sans oublier le travail culturel que l'art exerce au sein de la société. Pour répondre à cet objectif, chaque numéro comporte un dossier thématique, quelques "varia" accueillant des contributions extérieures, et un large spectre de compte rendus.

  •                         ISSN: 1969-2269
  •                         e-ISSN: 2264-2595
  •                         Directrice de la publication: Carole Talon Hugon
  •                         Rédacteur en chef: Alexandre gefen
  •                         Périodicité: semestrielle
  •                         Prix au numéro : 30,50 €
  •                         Année de création: 2008
  •                         En ligne seulement sur Cairn.info depuis 2014

Comité de rédaction

·      Marc Cérisuelo

·      Dominique Chateau

·      Alexandre Gefen (rédacteur en chef)

·      Jacques Morizot

·      Maud Pouradier

·      Isabelle Rieusset

·      Pierre Rodrigo

·      Jean-Marie Schaeffer

·      Carole Talon-Hugon

Comité scientifique

·      Noel Carroll (USA)

·      Matilde Carrasco-Barranco (Espagne)

·      Fabrizio Desideri (Italie)

·      Daniel Dumouchel (Canada)

·      Jale Erzen (Turquie)

·      Pascal Griener (Suisse)

·      Kenji Kitayama (Japon)

·      Thierry Lenain (Belgique)

·      Jerrold Levinson (USA)

·      Praisley Livingston (Chine)

·      Patrizia Lombardo (Suisse)

·      Maddalena Mazzocut-Mis (Italie)

·      Bence Nanay (Belgique)

·      Pere Salabert (Espagne)

·      Ken-Ichi Sasaki (Japon)

·      Martin Seel (Allemagne)

·      Zhongyi Shi (Chine)

·      Rachida Triki (Tunisie)

·      Wolfgang Welsch (Allemagne)

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Les articles soumis à la revue sont rendus anonymes, évalués au minimum par deux membres du comité de rédaction ou du conseil scientifique, et éventuellement par un ou deux évaluateurs extérieurs. La décision de publication est prise après délibération collective du comité. Dans le cas d’un appel à contribution pour un dossier thématique, une première sélection est faite sur la base de la note d’intention envoyée par l’auteur. Les articles sont ensuite soumis à la procédure normale d’évaluation.

Ils doivent être envoyés en version papier à 

                  Nouvelle revue d’esthétique

                  Presses Universitaires de France

                  6 avenue Reille

                  75685 Paris cedex 14

                  France 

et en version électronique à Carole.TALON-HUGON@unice.fr

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