Questions de société
La loi sur les fonctionnaires, définitivement adoptée I, II & III (Indépendance des chercheurs 24/07/09)

La loi sur les fonctionnaires, définitivement adoptée I, II & III (Indépendance des chercheurs 24/07/09)

Publié le par Bérenger Boulay

La Science au XXI Siècle

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Blog international du Collectif « Indépendance des Chercheurs » (France)

Voir aussi le 25 juillet: Ne pas promulguer la loi sur les fonctionnaires (I)

Le 23 juillet, bénéficiant d'une étonnante passivité de la part desorganisations syndicales, le Sénat et l'Assemblée Nationale ont procédéà l'adoption définitive de la loi dite « relative à la mobilité et auxparcours professionnels dans la fonction publique ». Notre collectifs'adressera dans les prochains jours à la Présidence de la Républiquepour demander que cette loi ne soit pas promulguée. Le caractèreartificiel de la procédure dite « d'urgence », alors quele projet de loi a été mis en attente pendant un an et n'a été remis àl'ordre du jour qu'après les élections européennes, nous semblejustifier une telle démarche. Le caractère anormal de cette situationapparaît de manière évidente au simple examen des débats du Sénat.Comme nous l'avons déjà exposé dans des articles récents, cette loiaura des conséquences particulièrement néfastes pour les personnels dela recherche publique, de l'enseignement supérieur, de l'éducation, dela santé... A fortiori, dans un contexte de privatisation des services publics, de démantèlement d'organismes comme le CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique) et les autres EPST (établissements publics à caractère scientifique et technologique) français, de « passage à l'autonomie » des universités, ou encore de « réforme » des hôpitaux, de l'école ou du lycée.

Suite: La loi sur les fonctionnaires, définitivement adoptée (I)

Le 24 juillet, le Nouvel Observateur dont le directeur général délégué et directeur de la publication Denis Olivennes a participé à la conférence de Bilderberg de mai dernier, publie un entretien de Pierre-André Taguieff. Présenté en tant que directeur de recherche au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Taguieff s'en prend encore une fois aux « théories du complot », à l'internet et aux « professionnels du conspirationnisme». Dans un tel discours, les allusions au Cercle de Bilderberg et à lamondialisation ne pouvaient pas manquer. Mais la réalité est que la loidite « relative à la mobilité et aux parcours professionnelsdans la fonction publique » définitivement adoptée la veille constitueune véritable démolition de l'Etat français, et que la loi Hadopi IIrisque d'être adoptée dès septembre. Précisément, la loi sur lesfonctionnaires ne manquera pas de s'appliquer aux personnels du CNRSdans un contexte de démantèlement de la recherche publique française.Paradoxalement, alors qu'une certaine propagande bat son plein, lescentrales syndicales restent étrangement discrètes et ne semblent guèrechercher à mobiliser fonctionnaires et citoyens. Comment comprendre unetelle situation ?

Suite: La loi sur les fonctionnaires, définitivement adoptée (II)

La loi sur les fonctionnaires, définitivement adoptée (III) :

Le 25 juillet, deux jours après l'adoption par le Parlement français de la loi dite « relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique », les médias évoquentl'adoption par le Congrès californien d'un budget comportant descoupures drastiques dans l'éducation et dans la santé publique, ainsiqu'une réduction des salaires des agents de l'Etat de Californie. Cesont donc les « petits citoyens », qui devront payer la facture d'unecrise déclenchée par la prétendue « bonne gouvernance » que lescoupoles financières et les « élites gestionnaires » ont infligéependant deux décennies aux populations des pays que l'on appelait «riches ». La situation en France n'est pas fondamentalement différente,après l'adoption de la loi de licenciement massif des fonctionnairesdans un contexte de démantèlement des services publics de la recherche(notamment, du Centre National de la Recherche Scientifique, CNRS), de l'enseignement supérieur, de l'éducation, de la santé... Mais la procédure qui a conduit à l'adoption improvisée de la « petite loi » sur les fonctionnaires peut choquer autant, sinon encore plus, que le contenu destructeur de la loi elle-même.

Y a-t-il encore un Parlement dans le pays ?

C'est laquestion que l'on peut se poser à l'examen du dossier du projet de loi« relatif à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonctionpublique ». Une question grave, qui vient s'ajouter à celles quesoulève par elle-même la teneur du texte de loi adopté.

Nonseulement parce que le Parlement a obtempéré devant une déclarationd'urgence dont toute signification était devenue de fait caduque aprèsle gel du projet de loi pendant un an, mais aussi parce qu'il a encoreune fois été question de permettre au gouvernement de « compléter » laloi par ordonnance. Une proposition que l'Assemblée Nationale a étéjusqu'à adopter le 7 juillet, sans aucun motif transparent.

Les conséquences de la loi sur les fonctionnaires seront néfastes pour le pays.

Ilne s'agit pas uniquement des cascades de licenciements massifs defonctionnaires qui ne manqueront pas de se développer dès la rentrée.Les salariés du secteur privé feront également les frais de cetteopération.

Par exemple, la dislocation du CNRS, programmée dansson contrat d'objectifs 2009-2013, permettra non seulement de licencierdes agents de la recherche publique mais aussi de transférer de fait ausecteur privé des chercheurs rémunérés par l'Etat et d'ouvrir en mêmetemps la voie à de nombreux licenciements des chercheurs salariés quitravaillent actuellement dans l'industrie privée.

L'Etat financera donc et prendra en charge la recherche du secteur privé.

Le CNRS et la recherche publique ne sont qu'un exemple de ce qui se prépare dans l'ensemble des administrations.

Encoreune analyse évidente, que les coupoles des centrales syndicales ne sesont pas empressées de faire circuler. Pour quelle raison ?

Mais la manière même dont l'examen de ce projet de loi s'est déroulé soulève des questions encore plus inquiétantes.

Sila France dispose théoriquement d'une Assemblée Nationale et d'unSénat, pourquoi faut-il que le gouvernement légifère par ordonnance etsans débat parlementaire préalable ?

C'est pourtant ce que l'Assemblée Nationale avait proposé, dans un article 27 du projet de loi sur les fonctionnaires qui a finalement été écarté par la Commission Mixte Paritaire.

Où était une quelconque « urgence » susceptible de justifier le recours à des ordonnances gouvernementales ?

Suit l'article 27 du texte adopté par l'Assemblée Nationale le 7 juillet.

http://www.assemblee-nationale.fr/13/ta/ta0312.asp

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2008-2009

7 juillet 2009

PROJET DE LOI

relatif à la mobilité et aux parcours professionnels
dans la
fonction publique,

MODIFIÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
EN PREMIÈRE LECTURE.

(Urgence déclarée)


L'Assemblée nationale a adopté le projet de loi dont la teneur suit :


(...)

Article 27 (nouveau)

Dansles conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, leGouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai desix mois suivant la publication de la présente loi, des mesuresrelevant du domaine de la loi et tendant, dans les limites préciséesaux trois alinéas suivants, à modifier les dispositions régissant lestatut des membres du Conseil d'État ainsi que celui des membres ducorps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appelet à adapter les règles d'organisation et de fonctionnement du Conseild'État ainsi que celles relatives aux attributions, à l'organisation etau fonctionnement des tribunaux administratifs et des coursadministratives d'appel.

À ces fins, le Gouvernement pourraadopter des dispositions permettant de confier des fonctionscontentieuses à des conseillers d'État en service extraordinaire etdéterminer les conditions de leur recrutement, de leur rémunération etde la cessation de leurs fonctions. Il pourra modifier la durée desfonctions des conseillers d'État en service extraordinaire. Il pourracréer des fonctions de maître des requêtes en service extraordinaire etdéterminer les conditions de leur recrutement, de leur rémunération etde la cessation de leurs fonctions. Il pourra aménager les conditionsdans lesquelles peuvent être nommés au Conseil d'État des membres ducorps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appelet déterminer les conditions de nomination au tour extérieur pour legrade de maître des requêtes. Il pourra préciser les conditionsgarantissant l'inamovibilité des membres du Conseil d'État dansl'exercice de leurs fonctions juridictionnelles. Il pourra réformer lesdispositions relatives à la commission consultative et adapter cellesrelatives à la discipline des membres du Conseil d'État. Il pourracompléter la liste des membres du Conseil d'État habilités à réglercertains litiges par ordonnance.

Le Gouvernement pourracompléter les dispositions relatives au statut des membres du corps destribunaux administratifs et des cours administratives d'appel pourconsacrer leur qualité de magistrat. Il pourra aménager lesdispositions relatives au Conseil supérieur des tribunauxadministratifs et des cours administratives d'appel et celles relativesau recrutement par voie de concours spécial ainsi qu'au tour extérieurdes membres du corps des tribunaux administratifs et des coursadministratives d'appel. Il pourra adapter les dispositions relatives àla discipline des membres de ce corps. Il pourra limiter la durée, dansla même juridiction, de l'exercice des fonctions de chef dejuridiction, fixer les conditions de leur maintien en activité au-delàde la limite d'âge et subordonner l'affectation en cour administratived'appel à des conditions d'expérience professionnelle. Il pourra créerdes fonctions de premier vice-président dans certains tribunauxadministratifs et dans les cours administratives d'appel et distinguerles conditions de promotion et de nomination des magistrats selonqu'ils sont appelés à exercer des fonctions de président de formationde jugement ou de chef de juridiction. Il pourra adapter lesdispositions permettant aux tribunaux administratifs de se compléterpour délibérer et celles relatives aux attributions qui peuvent êtredévolues à des magistrats administratifs honoraires. Il pourra aménagerles dispositions relatives à la compétence des tribunaux administratifset des cours administratives d'appel, celles relatives à l'exercice demissions de conciliation et celles permettant de statuer sur deslitiges sans conclusions du rapporteur public.

Il pourra adapterles dispositions relatives à la dénomination, à la composition et auxattributions de la mission d'inspection des juridictionsadministratives et celles relatives aux assistants de justice. Ilpourra élargir les pouvoirs d'instruction du juge administratif pourfaciliter la mise en état des affaires et modifier la procédureapplicable au référé fiscal.

Un projet de loi de ratificationest déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour dutroisième mois suivant la publication de l'ordonnance.

(fin de l'article 27 du texte adopté le 7 juillet par l'Assemblée Nationale)

Rappelonsqu'après le rejet du projet de Traité Constitutionnel Européen par leréférendum de mai 2005, le gouvernement avait été autorisé à légiférerpar ordonnance.

Il n'existait aucune « urgence », mais JacquesChirac entendait réagir au « mauvais vote » des Français par une sériede mesures autoritaires.

Il en a résulté, notamment, le fiascodu Contrat Nouvelles Embauches (CNE), invalité par l'OrganisationInternationale du Travail malgré l'arrêt du Conseil d'Etat favorable augouvernement.

Apparemment, les groupes majoritaires à l'Assemblée Nationale n'ont retenu aucun leçon de ce désaveu historique.

Pour rappel également, l'article 38 de la Constitution Française :

Article 38.

LeGouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander auParlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délailimité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi.

Lesordonnances sont prises en conseil des ministres après avis du Conseild'État. Elles entrent en vigueur dès leur publication mais deviennentcaduques si le projet de loi de ratification n'est pas déposé devant leParlement avant la date fixée par la loi d'habilitation. Elles ne peuvent être ratifiées que de manière expresse.

Al'expiration du délai mentionné au premier alinéa du présent article,les ordonnances ne peuvent plus être modifiées que par la loi dans lesmatières qui sont du domaine législatif.

(fin de l'article)

Voir également nos articles :

Fonction publique, CNRS, universités, services publics... vers la fin des acquis de la Libération ?

Sarkozy, G8, Bilderberg, "sortie de crise" rapide et casse sociale

CNRS : un contrat d'objectifs liquidateur (I)

CNRS et loi de licenciement massif des fonctionnaires

CNRS : un contrat d'objectifs liquidateur (II)

CNRS, loi sur les fonctionnaires et machine à licencier

CNRS, universités, fonctionnaires et liquidation des « classes moyennes »

Non à la loi sur la « mobilité » des fonctionnaires français ! (I)

Non à la loi sur la « mobilité » des fonctionnaires français ! (II)

Non à la loi sur la « mobilité » des fonctionnaires français ! (III)

Le CNRS, établissement public administratif (I)

CNRS : lettre aux personnels des laboratoires

CNRS, EPST, universités... bientôt des "furloughs" pour tous ?

Fonctionnaires : retirer le projet de loi

La loi sur les fonctionnaires, définitivement adoptée (I)

La loi sur les fonctionnaires, définitivement adoptée (II)

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