Agenda
Événements & colloques
La littérature démoralise-t-elle l'histoire ?

La littérature démoralise-t-elle l'histoire ?

Publié le par Perrine Coudurier (Source : Marie Blaise)

Littérature et/ou histoire.

La littérature dé-moralise-t-elle l’histoire ? XIXe – XXIe siècle.

Journées d’étude : 14 et 15 novembre 2013

 

Le texte de Barthes « Histoire et littérature. À propos de Racine », (paru dans la rubrique « Débats et Combats » de la revue Annales, 1960),  devenu « histoire ou littérature » (Sur Racine, Seuil, 1963) a longtemps marqué une sorte de radicalisation de la tension entre histoire et littérature alors même que son objet est l’histoire littéraire – soit, selon Barthes, une certaine idée d’ordre, inhérente à la discipline historique, qui prévaut sur le texte lui-même. Pour Barthes, « l’histoire littéraire n’est jamais que l’histoire des œuvres ». La littérature, elle, a « pour fonction d’institutionnaliser la subjectivité » ; « la première règle objective » pour le critique est donc « d’annoncer [son] système de lecture, étant entendu qu’il n’en existe pas de neutre ». Outre qu’une telle affirmation vise à conditionner une méthode disciplinaire, elle définit aussi la littérature contre l’histoire – au double sens du terme – puisque l’œuvre est à la fois « signe d’une histoire et résistance à cette histoire ». C’est dans ce contexte que nous voudrions interroger la manière dont le texte littéraire traite l’histoire depuis la constitution des deux disciplines, c’est-à-dire depuis le XIXe siècle.

Si l’on considère les difficultés éditoriales en Allemagne du roman de Edgar Hilsenrath, Le nazi et le barbier, les réactions aux Bienveillantes de Jonathan Littell, ou la méfiance dont Louis-Ferdinand Céline fait encore et toujours l’objet, il semble évident que l’institution littéraire (l’édition, la critique, les manuels…) participe, sans toujours le dire, d’un ordre moral, un ordre que le texte excède.

Dans cette perspective, nos journées se proposent d’interroger les constructions d’écriture et de lecture (positions, choix, postures, modalités etc) des voix narratives ou poétiques qui ont pour fonction de rapporter et de raconter l’histoire ou, plus précisément, tel ou tel événement de l’histoire – visées didactiques (Vigny), pédagogiques, moralisantes (Hugo), compositions d’une identité nationale, ou à l’inverse égalisation ou renversement des points de vue (Umberto Eco, Ignacio del Valle …), ironie (Flaubert, Ourednik…), traitement du détail (Claude Simon…), refus de toute posture d’autorité… Ou encore, les voies de l’impassibilité ou de l’érudition empruntées par certaines fictions historiques sont-elles en rapport à la supposée objectivité de l’historien qui deviendrait, par contre coup, une position d’autorité littéraire ?

Quel rapport la littérature entretient-elle avec l’événement, le trauma, qu’il s’agisse de la Saint Barthélémy (Alexandre Dumas, Balzac, Jean Teulé…), de la Terreur, du massacre des Chouans (Balzac ou Barbey) ou de celui de la Commune (Zola…), de la guerre de 14 (T.S. Eliot, Dorgelès, Remarque, Junger…), des camps de concentration, des guerres africaines ? La formule d’Adorno est célèbre mais quel avant et quel après du discours de « l’indicible » ? Qu’est-ce qui conduit les récits contemporains à réécrire l’histoire contre les attendus liés au trauma et à la réparation éthique qui prévaut dans la littérature lazaréenne (Jean Cayrol)? Et puisque la littérature institutionnalise la subjectivité, à qui s’adressent ces récits, quel lecteur construisent-ils ?

En somme, la littérature dé-moralise-t-elle l’histoire ?


Programme

 

Jeudi 14 novembre 2013

 

 

- 14h30. Sylvie Triaire, CRISES: « Pour une histoire mélancolique : barbares et civilisés, de Carthage aux Tuileries – (Flaubert) »

 

- 15h00. Jonathan Gimeno, CRISES : « ‘’je m'y intéresserais, en raison de la lueur'’ : " Féeries" et crimes aveugles chez Stéphane Mallarmé, Guillaume Apollinaire et Louis-Ferdinand Céline »

 

- 15h30.  Caroline Julliot, Université du Maine : « "Cette guerre, mon père l'a faite, et j'en puis parler". (Quatrevingt-treize, La légende des siècles). L’Histoire selon Hugo, entre voix prophétique et voix personnelle »

 

Discussion et pause

 

- 16h30. Pierre-Yves Kirschleger, CRISES : « Renan dé-moralise-t-il l'histoire du christianisme ? La Vie de Jésus et sa controverse »

 

- 17h00. Elvia Olive, CRISES : « Edgar Quinet et l’héritage révolutionnaire : une remoralisation de l’histoire à travers la littérature ? »

 

 

Vendredi 15 novembre 2013

 

 

 - 9h30.  Marie Blaise, CRISES «“E.l reis no respon mot ne nulha re no ditz“ : le motif de la terre vaine de La Chanson de la croisade albigeoise à The Waste Land. »

 

- 10h00. Jacques-Athanase Gilbert, Université de Nantes, « Histoire et métaphore (Borges, Schwob) »

 

Discussion et pause

 

- 11h00. Suzanne Lafont, RIRRA 21, « Céline ou la dénarrativisation de l’histoire »


 - 11h30. Florence Pellegrini, Université de Bordeaux III, « De Année 24 à Classé sans suite : empathie et ironie chez Patrick Ourednik »

 

- 14h30. Colette Camelin, Université de Poitiers, « Les femmes écrivains et la violence de l’histoire. Quatre écritures des traumatismes de guerre (Gisèle Bienne et Scholastique Mukasonga) » 

 

- 15h00. Sylvie Servoise, Université du Maine, « La classe ouvrière : romans pour mémoire (François Bon, J-P Goux) »


 

Entrée libre

Lieu : Université Paul Valéry-Montpellier 3, site Saint Charles, rue du professeur Henri Serre. 34090 MONTPELLIER

Site de référence : http://crises.upv.univ-montp3.fr/activites/colloques/colloques-et-journees-detudes-2013-2014/la-litterature-demoralise-t-elle-lhistoire/

 

Responsables : Sylvie Triaire (sylvie.triaire@univ-montp3.fr) et Marie Blaise (marie.blaise@univ-montp3.fr)