Actualité
Appels à contributions
La chanson politique en Europe

La chanson politique en Europe

Publié le par Bérenger Boulay (Source : Céline Cecchetto)

Appel à contributions – Revue Eidôlon

« La chanson politique en Europe »



En vue d'un nouveau numéro de la revue du LAPRIL, Eidôlon, le groupe de recherche « Représentation du politique » se propose d'approfondir la relation entre chanson et politique.

Chanson et politique

Parce qu'elle n'existe qu'en performance, réelle ou reproduite, parce qu'elle « court encore dans les rues », même après que les poètes ont disparu, la chanson est un objet culturel qui se signale dès ses origines comme ayant fort affaire avec la vie de la cité. Protéiforme, elle est aussi bien un moyen d'information, de lutte, ou de propagande. Entre le chanteur et son public, elle est un écran qui tempère et exacerbe à la fois les violents remous des affaires publiques, qu'ils concernent le rapport au pouvoir ou la vie sociale dans son ensemble. Malgré son caractère populaire, elle est loin d'être insignifiante sur le plan politique et sa « popularité » lui confère un statut communicationnel prégnant, qui traverse le corps social dans toute son épaisseur. Elle est ainsi un outil essentiel pour saisir les images du politique et de la politique dans un espace culturel donné.
Dans ce numéro d'Eidôlon, nous voulons interroger la chanson, genre pluridisciplinaire par excellence, sur les divers systèmes de signes qu'elle met en place pour articuler ses rapports au/à la politique : comment s'impose-t-elle comme discours majeur, malgré la doxa qui semble la vouer à la légèreté ? Comment, dans un temps extrêmement bref (trois minutes en moyenne), la concentration de matériaux signifiants à l'oeuvre dans la chanson rendent-ils compte de la complexité de la vie de la cité ? Les perspectives suivantes proposent aux contributeurs des pistes de recherche.

« Cher vieux continent »

Si « La France est le seul pays à pouvoir écrire son histoire en chanson » (J. Charpentreau), la chanson française ne détient pas , loin s'en faut, le monopole du chant politique. Chaque pays d'Europe conserve profondément ancrées en lui les mélodies qui annoncèrent ou accompagnèrent les évolutions et les bouleversements politiques. L'unité, problématique certes, de ces pays autour d'une histoire largement commune, nous pousse à envisager le discours politique de la chanson sur une large échelle géographique, et les contributions concernant un pays, ou un groupe de pays particulier sont largement souhaitées.
Du côté de la perspective historique, on pourra sans peine remonter jusqu'au Moyen-Age, pour montrer la vigueur politique des premiers troubadours et minnesänger , ou encore les satires des cancioneros espagnols. Des « voix de ville » assassines qui secouèrent les monarchies aux grands mouvements sociaux du XIXème, et jusqu'aux évènements majeurs du XXème siècle, le rapport de l'homme à la cité s'est modifié, et son chant en est tout à la fois l'annonce et le témoignage.
Les communications qui soulèveront des aspects historiques et géographiques pourront ainsi montrer la manière dont la chanson se distingue comme mode d'expression d'une collectivité particulière, qu'elle contribue, dans le même temps, à créer et à fédérer. La « mouvance » (Paul Zumthor) de ces rapprochements, d'une époque, d'un pays, d'un parti à l'autre, seront particulièrement fécondes à analyser. Car si « chanson = parole + musique », ainsi que l'a démontré Denis Laborde , et intéresse le chercheur en lettres et le musicologue, elle n'en est pas moins un objet largement sociologique, un outil de connaissance des sociétés, que l'on pourra sonder autour de questions diverses : quels rapports entre chanson et pensée dominante à un moment donné de l'histoire sociale ; la chanson politique est-elle possible dans l'économie de marché ; est - elle un manifeste, un programme, ou se situe-t-elle plutôt sur le terrain du symbolique ?… Ainsi pourra se révéler le « hors-chant » de la chanson.

« Je ne suis qu'un cri » , la chanson en acte.

A penser ensemble politique et chanson, il faut également s'entendre sur les méthodes et finalités de l'investigation. Ainsi que l'a souligné Anthony Pecqueux, on peut d'abord postuler « qu'une chanson contient dans ses paroles des éléments ressortissant du politique ; il s'agit de la chanson que l'on appelle de contestation, engagée, etc… » ; mais il faut aussi considérer « la chanson politique , au sens où la chanson en elle – même constitue une proposition politique. […] En ce sens il convient d'analyser plutôt que des énoncés une énonciation » . On pourra donc s'interroger avec profit sur les diverses modalités mises en oeuvre par les auteurs, les compositeurs, les interprètes , pour produire par le chant un discours et /ou un acte politique :
- Modalités génériques : la chanson politique fait-elle appel à la fiction, se place t-elle du coté de la chronique, de la satire, ou participe-t-elle davantage d'une entreprise lyrique ?
- Modalités stylistiques : quels styles musicaux sont convoqués (rock, rap, folklore…), et à quel type de discours sont-ils associés pour prendre position sur la scène publique ?
- Modalités énonciatives, qui concernent l'aspect essentiel, en politique, de la situation communicationnelle : qui (auteur, compositeur, interprète, producteur…) prend en charge le message, comment la chanson met-elle en place ses stratégies de destination…?

______________

Autour de ces problématiques, très générales et non exhaustives, les contributions proposées pourront aussi bien prendre la forme de monographies sur tel ou tel auteur ou interprète ; d'analyses d'une ou de plusieurs chansons choisies (dans une perspective sémiologique et/ou historique), d'analyses transversales sur un thème politique, sur une modalité d'expression ; de commentaires sur des pans particuliers d'une Histoire locale, nationale ou internationale ; de discussions plus théoriques sur les moyens scientifiques mis à la disposition du chercheur pour établir des liens solides entre chanson et politique…
Les propositions d'articles (500 caractères au maximum) sont à transmettre avant fin février 2007. Après accord de principe de la rédaction, les textes (30000 signes au maximum) seront à remettre au plus tard fin juin 2007.

Céline Cecchetto, celine.cecchetto@yahoo.fr
Michel Prat, prat-michel@wanadoo.fr