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L’imagination entre réflexion esthétique & transfiguration du réel : la reine des facultés au tournant du XXe siècle

L’imagination entre réflexion esthétique & transfiguration du réel : la reine des facultés au tournant du XXe siècle

Publié le par Perrine Coudurier (Source : Groupe de recherche Nouvelle Fribourg)

Pour son second numéro, Nouvelle Fribourg propose d’investiguer la notion clé d’imagination, en particulier son questionnement entre le XIXe et le XXe siècle.

Objet de nombreuses réflexions à l’époque du Romantisme européen et, ensuite, chez Charles Baudelaire, l’imagination est abordée par les artistes comme une notion totale : dans son Salon de 1859, l’auteur des Fleurs du Mal la définit non seulement comme le pôle opposé d’une représentation stérile de la nature, mais aussi comme la source du « sens moral » de l’homme, fondement et origine de tout monde nouveau, gouvernant la dialectique entre réalité et langage poétique à travers les instruments de l’analogie et de la métaphore. Avant lui, le poète anglais Samuel Taylor Coleridge avait fait de l’imagination un objet de spéculation révélant des aspects fondamentaux de son argumentation sur la création et la contemplation esthétiques. La distinction entre imagination primaire et secondaire permet de saisir le rôle crucial de cette faculté : c’est grâce à l’imagination que le poète peut ouvrir une voie accessible entre l’écriture et l’infini ambitionné par l’art.

Cette conception très vaste se problématise au tournant du siècle, lorsque l’imagination, de pilier d’une réflexion à l’origine esthétique, devient le moyen d’une interaction entre la littérature – pratique naturellement interdisciplinaire – et les nouvelles approches philosophiques, psychologiques et scientifiques poussant vers un retour à l’individu. Ce nouvel humanisme, dépourvu de l’optimisme de son antécédent historique, se sert de l’imagination vue non plus comme la « reine des facultés » contribuant à l’édification d’un univers harmonieux, mais comme la faculté déstabilisante qui montre à l’homme toute la distance entre le monde réel – voire la réalité de l’être – et une réalité rêvée, déformée ou reniée. Faculté révélatrice des distances, l’imagination constitue paradoxalement le seul moyen de les réduire : en se proposant comme transfiguration plus ou moins accentuée de la réalité, elle agit à travers l’art en montrant toute son épaisseur épistémologique. Comme dans la célèbre scène proustienne consacrée à la lecture, l’art permet à l’homme de saisir les changements de son cœur « en imagination », en les accélérant, en vertu de la concentration douloureuse d’un processus qui, dans sa lenteur, se dérobe à sa perception.

Un sens de fuite ou d’abstraction, donc, qui rejette pourtant dans la réalité celui qui en fait l’expérience : l’imagination agit à travers la littérature comme le heaume de Mambrin dans le Don Quichotte de Miguel de Cervantès : plat à barbe ou objet magique, peu importe. La folie du célèbre hidalgo, étendue comme un vernis déformant sur la réalité, nous rappelle à la vertu dont l’imagination est porteuse, c’est-à-dire son pouvoir de dévoilement.

Nous proposons les pistes d’analyse suivantes :

  • Recours à l’imagination et crise du modèle de la mimesis, en littérature comme dans les arts figuratifs du début du XXe siècle.
  • Imagination ou mémoire ? L’imagination se configure-t-elle comme une création ex nihilo ?
  • L’imagination comme création de nouveaux langages ou manipulation de langages déjà existants.
  • L’escapisme et l’expérience de la guerre : l’imagination comme moyen de s’évader d’une réalité tragique.
  • L’autobiographie comme genre suspendu entre fiction et réalité.
  • L’imagination et la réflexion politique dans les genres de l’utopie et de la dystopie.
  • Le rêve, la folie, l’inconscient : les pistes ouvertes par la psychanalyse.
  • L’imagination en France et ailleurs : une analyse comparée de l’évolution de cette notion dans la littérature française et dans d’autres littératures romanes.
  • La distinction entre imagination, fantaisie et sensibilité.

 

Calendrier 

Date limite pour la remise des propositions : 

30 septembre 2015

Date limite pour la remise des contributions :

30 novembre 2015

Vous pouvez envoyer vos propositions de titre accompagnées de 10 lignes de projet et votre profil à l’adresse info@nouvellefribourg.com, avant le 30 septembre 2015. Le Comité scientifique de lecture décidera dans les jours suivants et nous communiquerons ensuite les consignes éditoriales aux auteurs sélectionnés.