La journée d'étude « L'image dans le discours scientifique », qui doit contribuer à lancer une vaste réflexion sur le thème, se propose d'aborder la question, débattue, d'une spécificité de l'image scientifique.
Plusieurs pistes de réflexion peuvent être suivies.
En premier lieu, on pourra se livrer à des considérations relevant de la sémiotique. Existe-t-il une spécificité inhérente aux techniques de production des images scientifiques — micro- et nano-photographie, photographie satellite, radiographie, scanning, pet scanning et autres imageries médicales, imagerie en chambres à bulles, diffraction aux rayons X, chromophotographie en substance gazeuse, photographie en terrain ethnographique, zoologique ou botanique… ? Quels sont dans ce cas les transcodages appliqués aux images, depuis la captation jusqu'à l'interprétation ? Comment décrire les syntaxes d'enregistrement et de visualisation des objets ? On le voit, cette piste mène vers le problème de la production des images et des modalités de l'intentionnalité qui les met en oeuvre.
En deuxième lieu, il importe de se demander si la spécificité de l'image scientifique ne devrait pas plutôt être cherchée au niveau de sa « textualité », autrement dit dans l'organisation interne des énoncés sémiotiques. On cherchera alors à voir comment les images s'intègrent aux textes, comment elles se lient aux commentaires ainsi qu'aux graphiques et aux tableaux de données, comment elles peuvent offrir des points des vue complémentaires, mais aussi innovants, sur les événements étudiés.
En troisième lieu, la spécificité de l'image scientifique doit être recherchée au niveau de son interprétation au sein des pratiques communicationnelles. On distinguera notamment ainsi entre les « images d'expérimentation » et les « images exemplaires », qui reflètent un consensus existant déjà au sein de la communauté scientifique. Le but est alors d'interroger les différents statuts argumentatifs et rhétoriques de l'image scientifique, son insertion dans des discours visant des prédications aussi variées que la vérification, la démonstration, l'exposition, la vulgarisation ; par ce biais, on sera amené à évaluer les régularités et les différences existant entre un protocole de laboratoire, un rapport d'expertise, un paper, un article de divulgation, etc.
Enfin, des questions générales, de nature épistémologique, pourront émerger de ces investigations. Comment passe-t-on du voir à l'inférer ? Mais comment aussi passe-t-on de l'inférer au voir ? Et comment se fait-il qu'entre le voir et l'inférer deux parcours soient possibles ?
L'objectif de cette journée est de mettre en avant les propriétés de l'image dans le domaine des sciences, tout en ne perdant pas de vue son caractère culturel, que la comparaison avec d'autres types d'images, dans d'autres domaines — juridique, religieux, artistique… — aidera à faire ressortir.
Programme
Vendredi 30 mars 2007
9:00 Salutations de Jean-Marie Klinkenberg
9:30-10:10
Jacques Fontanille (Université de Limoges)
Effets d'échelle et de technologie dans l'image scientifique. La manifestation visuelle
10:10-10:50
Jean-Marie Klinkenberg (Université de Liège)
L'interaction eido-graphique dans le discours scientifique
Pause
11:10-11:50
Anne Beyaert-Geslin (Université de Limoges)
Le portrait anthropométrique
11:50-12:30
Maria Giulia Dondero (Université de Liège)
Les images anachroniques de l'histoire de l'univers
REPAS
14:30-15:10
Bruno Latour (Sciences-Politiques, Paris)
Le parcours des déictiques dans la démonstration d'après le livre de Reviel Netz sur la géométrie antique
15:10-15:50
Pierluigi Basso (Université Iulm, Milan ; IUAV, Venise ; Université de Bologne)
Se faire une image : la représentation scientifique de l'activité cérébrale dans le sommeil et dans le rêve
Pause
16:10-16:50
Francis Edeline (Université de Liège)
L'emprise spatiale des symboles dans les images scientifiques
16:50-17:30
Vinciane Despret (Université de Liége)
Rendre visible l'invisible : le cas de l'éthologie
17:30-18:10
Sémir Badir (FNRS, Université de Liège) : Conclusions